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Im Dokument De fragments en traces (Seite 23-39)

CECR Cadre européen commun de référence pour les langues CGVO Conseil général du Val-d’Oise

CILFAC Centre international Langue française et Action culturelle DLC Didactique des langues et cultures

FLE Français Langue étrangère

OFAJ Office franco-allemand pour la Jeunesse UCP Université de Cergy-Pontoise

UFR Unité de Formation et de Recherche UPO Université Préfectorale d’Osaka UV Unité de Valeur

UVO Université de la Ville d’Osaka.

Pour la lecture des mots japonais  

Pour faciliter la lecture de locuteurs francophones, nous n’avons pas adopté la transcription standard en vigueur du japonais et n’avons pas noté les différences dans les longueurs de voyelles. Par exemple, le nom de ville d’Osaka devrait être transcrit comme « Oosaka » ou bien les mots

« Kanku » (voir ci-dessous) et « kuko » (aéroport) écrits de la manière suivante : respectivement « kankuu » et « kuukou ». Les groupes « ai » et

« ei » sont obligatoirement diphtongués ; le groupe « ch » se prononce

« tch » ; « u » vaut pour « ou ».  

Fudai : appellation familière de l’Université Préfectorale d’Osaka formée à partir du nom en japonais : Osaka Furistu Daigaku

=> Fudai

Ichidai : appellation familière de l’Université de la Ville d’Osaka formée à partir du nom en japonais : Osaka Ichiritsu Daigaku =>

Ichidai ; l’appellation « Shidai » se rencontre aussi, formée sur une autre lecture possible du kanji intermédiaire.

Kanku : appellation abrégée pour la version en japonais d’« Aéroport international du Kansai » ou Kansai Kokusai Kuko.

Une affaire d’État aux répercussions locales

À l’instar des membres du G8, mais aussi de l’ensemble des pays de l’Union européenne engagés ensuite dans le processus de Bologne1, le Japon a, depuis une vingtaine d’années, entrepris de repenser sa politique éducative en matière de mobilité étudiante (Oba, 2013  ; Pungier, 2017c)2, ce qui est analysé quelquefois ailleurs comme le signe de « sa diversification » (Garneau, 2006, p. 14), de « son institutionnalisation » (Garneau, 2006, p.  14  ; Garneau, 2007  ; Ballatore, 2007, p.  8  ; Ballatore, 2011), de sa massification réelle ou non (Ballatore, 2017), de sa marchandisation (Ballatore, 2017 ; Nafti-Malherbe et Palme, 2017).

L’élément principal de cette nouvelle donne concernait dans un premier temps « le plan d’accueil de 100 000 étudiants étrangers », pour s’aligner ainsi, comme précisé officiellement, sur un pays comme la France3.

1 Déclaration de Bologne du 19 juin 1999 : « Adoption of a system of easily readable and comparable degrees […] in order to promote European citizens employability and the international competitiveness of the European higher education system […] ; Promotion of mobility by overcoming obstacles to the effective exercise of free movement with particular attention to :

• for students, access to study and training opportunities and to related services ; • for teachers, researchers and administrative staff, recognition and valorisation of

periods spent in a European context researching, teaching and training, without prejudicing their statutory rights. »

Il est à noter que le système éducatif japonais fonctionne déjà sur la trilogie LMD (licence, maîtrise, doctorat) avec la particularité que le cycle de la licence, qui donne accès à un diplôme de « sortie d’université » (卒業/sotsugyo), dure traditionnellement quatre ans.

2 Cf. À propos du développement de nouvelles mesures pour les études à l’étranger (rapport de commission)  – Viser à l’élargissement des échanges d’étudiants étrangers et à une amélioration de leur qualité, Organisation centrale pour l’éducation,

16  décembre année Heisei 15, (新たな留学生政策の展開について(答

申)~ 留学生交流の拡大と質の向上を目指して ~平成151216 中央教育審議会). Document non paginé  :  <http://www.mext.go.jp/b_menu/

shingi/chukyo/chukyo0/toushin/03121801.htm>.

3 « Si on compare [avec les chiffres] internationaux, par exemple, en France, c’est 7,6 % [d’étudiants étrangers] accueillis, et 2,6 % [d’étudiants envoyés à l’étranger], on ne

Cet objectif a été atteint en 2003 et les rapports plus récents, bien que privilégiant toujours la dimension réceptive4, ont mieux intégré le principe de réciprocité du phénomène. L’internationalisation des campus japonais est devenue un nouveau mot d’ordre. La mobilité étudiante apparaît ainsi comme un « phénomène de société » à très grande échelle et aux multiples facettes5 : elle « s’adresse à des nouveaux publics, d’autres milieux socio-culturels, sans toutefois oublier qu’elle obéit aussi à des pressions socio-économiques et à des modèles de comportement  » (Papatsiba, 2003, p. 1).

Pensant ainsi accroître ses chances de rester compétitif, le Japon promeut certaines pratiques éducatives valorisées ailleurs et envoie donc lui aussi ses étudiants à l’étranger. La primauté de l’anglais comme première langue étrangère avérée dans tout le système scolaire oriente très fortement les possibilités de mobilité académique vers les territoires anglophones6. Elles ne sont pourtant pas les seules. L’Université Préfectorale d’Osaka (ci-après UPO) offre ainsi à ses étudiants l’opportunité de participer à un séjour en immersion court, trois semaines environ, à l’Université de Cergy-Pontoise (ci-après UCP) (Terasako, 2004  ; Molinié et Pungier, 2007), de partir pour la France, dont Mariko Himeta (2006) pense qu’elle bénéficie d’une image paradoxale dans l’imaginaire japonais,

« entre aspiration et refus » (p. 38).

Si cette expérience de mobilité courte se décline déjà en termes de moyen et de fin dans une situation d’enseignement-apprentissage linguistique locale, fragilisée par les réformes de l’enseignement supérieur, et qu’elle oriente ainsi des discours (Terasako, 2004), des pratiques

peut pas dire que les niveaux de notre pays soient satisfaisants » (これを国際的に 比較すると, 例えば, フランスでは, 受入れは7,6%, 派遣は2.6%となってお り, 我が国の水準は, まだ十分とは言えない。) ; deuxième section : situation actuelle et problèmes des échanges d’étudiants (2 留学生交流の現状と課題).

Document non paginé : <http://www.mext.go.jp/b_menu/shingi/chukyo/chukyo0/

toushin/03121801/003.htm>.

4 Les rapports annuels concernant la question et accessibles sur internet Rapport sur le système des étudiants étrangers dans notre pays (我が国の留学生制度の概 要) comportent le sous-titre suivant  :  « 受入れ及び派遣/accueil et envoi  ». Les pages consacrées au premier cas sont plus nombreuses que celles abordant le second.

<http://www.mext.go.jp/a_menu/koutou/ryugaku/main4_a3.htm>.

5 Elle n’en reste pas moins un phénomène numériquement minoritaire qui « ne touche encore qu’1 % d’étudiants européens » (Ballatore, 2007, p. 8).

6 Il existe cependant une érosion du nombre des candidats au départ depuis quelques années, y compris vers les pays anglo-saxons.

quotidiennes de classe et des relations avec les apprenants (Pungier, 2007, 2008a, 2008b, 2009a, 2009b, 2010, 2011a, 2011b, 2012, 2014a), il lui manque pour être mieux comprise d’être abordée du côté de ce qu’en

« disent » ses principaux acteurs, les stagiaires eux-mêmes.

Problématique

Les recherches antérieures menées dans le champ de la didactique des langues et des cultures étrangères sur des cas européens, en particulier celles qui se préoccupent des questions d’interculturel, de plurilinguisme et de pluriculturalisme (Radenkovic et Zarate, 2004 ; Gohard-Radenkovic et Murphy-Lejeune, 2008 ; Zarate, Lévy et Kramsch, 2008), d’interculturalité ou de diversité (Abdallah-Pretceille, 2005, [1999] 2013, 2011  ; Dervin, 2008a, 2008b, 2008d, 2009a, 2009b, 2010a, 2010b, 2010c, 2011a, 2011c, 2017) et souvent menées à partir de méthodologies spécifiques – entretien biographique (Cain et Zarate, 2006), enquête, plus rarement matériel écrit (Papatsiba, 2002, 2003  ; Gohard-Radenkovic, Bera-Vuistiner et Veshi, 2003)– établissent qu’il ne suffit pas de se proclamer « mobile », d’expérimenter la mobilité pour transformer ses représentations de l’identité et de l’altérité, ses rapports à l’autre. N’est pas un étudiant-voyageur accompli qui veut : E. Murphy-Lejeune (2000, 2003, 2004, 2008a, 2008b), V. Papatsiba (2003), P. Kohler-Bally (2001), M. Anquetil (2006, 2012), et d’autres encore pointent à plusieurs niveaux les difficultés, les insuffisances ou les inégalités devant les expériences de mobilité académique longue, telles celles du programme Erasmus. Par ailleurs, dans bon nombre d’expériences européennes (et sauf exceptions comme Kohler-Bally, 2001 ; Gohard-Radenkovic et Kohler-Bally, 2005 ; Anquetil, 2006  ; Lepez, 2012), la mobilité à l’étranger paraît donnée comme allant de soi et ne suscite pas de mise en place de dispositifs spécifiques permettant des retours réflexifs sur l’expérience vécue, ni en amont, ni pendant, ni en aval du séjour.

Qu’en est-il de celle proposée par l’Université Préfectorale d’Osaka et par son partenaire français l’Université de Cergy-Pontoise ?

Entre mobilités européennes et japonaises, certains questionnements peuvent paraître de prime abord similaires en termes de démarches portant sur le doublet identité/altérité, et en même temps, d’autres diffèrent. Ainsi, puisqu’il s’agit d’une expérience se produisant dans un contexte franco-japonais, un certain horizon d’attente visant les relations

avec autrui et sous-entendu par la construction d’une unité politique européenne (Papatsiba, 2003, p.  269) devient totalement caduc. À la place s’instaurent des relations dialectiques comme celle de la paire Japon/France, s’appuyant sur des bases historiques (Inalco, 1974 ; Kessler et Siary, 2009), ou bien, d’autres semblent accentuées comme celle qui concerne le couple « pays d’origine (ou Japon)/étranger », constituée à la base sur des considérations plus géophysiques (Pelletier, 1997).

Par ailleurs, l’expérience de mobilité construite par l’UPO se trouve inscrite de facto et à toutes les étapes dans un contexte institutionnel, ce qui génère de multiples contraintes pour ses acteurs : période et durée limitée du séjour ; emploi du temps et contenus linguistico-culturels préétablis pouvant donner lieu à l’obtention de crédits  ; lieux d’enseignement-apprentissage et d’hébergement fixés d’avance (en région Île-de-France) ; présence d’accompagnateurs issus de l’institution  ; composition d’un groupe de participants homogène, etc.

La question de l’intégration à la société d’accueil ne se pose donc pas, voire pas du tout, dans les mêmes termes que pour des étudiants en séjour long de mobilité et celle des contacts avec les « autochtones », avec ce que cela sous-entend d’effets et de conséquences espérés, souhaités, rêvés (progrès linguistiques, processus de maîtrise de savoir-faire, savoir-être en contexte socioculturel différent…), est liée aux possibilités offertes par l’institution : soit qu’elle organise des rencontres avec des Français, soit qu’elle ouvre des plages de « temps libre » que chaque stagiaire peut occuper à son goût, y compris dans celui de la recherche de contacts humains personnalisés. Les apprentissages et acquisitions linguistiques, culturels ou interculturels se trouvent aussi tributaires des compétences préacquises dans ces domaines et des représentations les conditionnant (Pungier, 2007), de la place qui est accordée à l’autre (Himeta, 2006 ; Pungier, 2011c, 2014a), imaginé ou réel, dans ces processus.

Mais comment en savoir plus sur cette expérience que nous avons considérée comme unique  ? L’existence de productions écrites avant, pendant ou après le séjour (Pungier, 2008a), quelquefois même provoquées à notre demande, nos recherches exploratoires antérieures sur ces matériaux écrits (Pungier, 2008a) ou non (Pungier, 2007) dans le cadre de notre situation professionnelle (Molinié et Pungier, 2007, 2011), notre formation académique en histoire aussi, nous ont poussée à ne pas nous engager sur le chemin balisé d’un travail avec une méthodologie prédonnée ni à essayer de rattraper d’anciens stagiaires pris dans le tourbillon de leurs vies mais au contraire à emprunter une voie

plus hasardeuse en focalisant sur les fragments et les traces de restitution laissés par les étudiants au moment de la réalisation de leur expérience de mobilité.

Dans cette recherche, nous nous intéressons aux sources issues des troisième et quatrième Séminaires de langue française et cultures francophones et disponibles pour les années 2007 et 2008, le choix de ces deux années étant dicté dans un premier temps par « le hasard des circonstances », soit la date de début de cette recherche (2008)7. Alors que nous possédions des documents pour les années 2005 et 2006, nous avons souhaité élargir l’échantillon de départ permettant d’aborder les questions de perception et d’expression de l’altérité et de l’identité, quoique dans le cadre d’une mobilité encadrée (voire « encadrante »).

En 2008, en effet, les étudiants japonais ont bénéficié, pour la première fois dans l’histoire du stage, d’un week-end dans une famille française.

L’année 2007 devenant alors l’autre terme de la comparaison, nous pouvions espérer y lire des transformations dans la manière de parler des Français et peut-être de soi et déterminer, par exemple, si des effets de

« lissage de la trajectoire biographique » (Bertaux, 1986, cité par Gohard-Radenkovic, 2007a, p. 52) étaient perceptibles ou pas.

Par ailleurs, la présente recherche s’inscrit directement dans le prolongement de notre univers et de notre questionnement professionnels en didactique des langues et cultures (DLC). Mais il s’agit moins d’une recherche-action dans la mesure où les acteurs de l’expérience ne sont pas sollicités dans une perspective réflexive sur leurs agirs que d’une « recherche-implication » (Anquetil, 2006, p. 52) voire d’une « pratique-recherche » (Hosokawa, 2010, p. 127)8. La finalité de notre travail de recherche est le développement d’un environnement favorable à la mobilité et à la réflexivité sur cette expérience, favorisant chez nos étudiants des «  enrichissements  » multiples visibles (humains, interculturels, linguistiques) ou invisibles (intimes).

Dans cette recherche, nous souhaitons, à travers une approche socio-anthropologique, dégager des éléments permettant de développer dans le cursus de formation académique offert par l’UPO, dans l’amont et l’aval de son effectuation, voire pendant, une réflexion sur la notion de séjour

7 En réalité, il y a sans doute beaucoup moins de «  hasard des circonstances  » que l’expression ne le laisse entendre : il s’agit plus d’une suite logique à l’enchaînement d’un certain nombre d’événements intervenus dans notre vie professionnelle.

8 En japonais « 実践研究 » (jissen-kenkyu) : cf. Hosokawa (2007, 2008a).

court à l’étranger non pas seulement comme construction institutionnelle mais comme projet individuel et aussi comme travail d’initiation, ou mieux comme formation et prise de conscience de la complexité des sociétés, favorisant chez les étudiants une prise de distance avec l’expérience vécue, une capacité à observer et à analyser ce qui se joue dans les rapports avec les autres, et ce quels qu’ils soient et où qu’ils se trouvent.

Questionnement de départ

C’est dans cette première appréhension de l’environnement d’origine de cette expérience de mobilité internationale encadrée courte que plusieurs séries de questions ont émergé concernant la manière dont les étudiants japonais expérimentent leur séjour dans ce contexte, que nous envisageons comme un lieu d’« hyper-contraintes », à propos desquelles il est aussi possible de se demander s’ils les acceptent ou non, jusqu’à quel point et comment.

Nous nous sommes d’abord demandé quelles étaient la nature et la forme (ou bien les natures et les formes) de cette expérience de séjour en immersion. Quels moments, quelles situations, quels objets, quels individus étaient-ils investis pour dire cette expérience de l’altérité dans un cadre construit institutionnellement ?

À partir de cette double interrogation, les perspectives de questionnement se dégageant de cette expérience de mobilité sont apparues pluridirectionnelles et extrêmement denses. Trois d’entre elles ont semblé constituer a priori la trame de l’objet de recherche abordé ici et l’ont nervuré : l’espace, le temps, les expériences, celles de soi et pour soi, celles des autres et celles des apprentissages.

Le stage commence d’abord par une expérience spatiale, c’est-à-dire qu’il correspond en premier lieu à un voire plusieurs déplacements dans et entre des espaces de référence ou de découverte. Mais quelle est la nature de ces espaces parcourus et investis ? En quoi diffèrent-ils de ceux qui ne le sont pas ? S’agit-il d’un ordre de réalité géopolitique ou imaginaire ? À certains moments, l’espace est découpé, figé, des «  endroits  » sont sélectionnés. Le regard s’y concentre, s’y arrête ; les pensées s’y condensent, s’y figent. Des lieux sont reconnus comme significatifs. D’autres le deviennent. Comment le quadrillage de l’espace, la sélection des lieux et leur l’occupation se construisent-ils et s’organisent-ils ? En vue de quels objectifs ?

Tout en même temps, il s’agit aussi d’une expérience temporelle.

Comme l’espace, le temps constitue un élément qui est investi, rempli.

Parallèlement, il sert de critère d’étalonnage dans la mise en perspective de soi avec les autres. À partir de quelle(s) temporalité(s), les étudiants abordent-ils les espaces et les lieux de référence ou de découverte de leur séjour ? Des basculements de temporalité se produisent-ils ? Dans quelles conditions ? Pour quels effets ? Quels rapports entre soi et les autres se dégagent-ils alors ? Quelle dialectique pour le binôme identités/altérité dans le cas d’une relation franco-japonaise spécifique est-elle possible, vécue, ressentie, affirmée ?… ou tue ?

Mais si l’espace et le temps peuvent être considérés comme des éléments non seulement constitutifs mais déterminants pour la compréhension de l’expérience mobilitaire, le rapport qui les unit passe aussi par le mouvement des acteurs les traversant via des activités (d’ailleurs, ils ne peuvent être conçus qu’à partir de ces derniers). Or de quel ordre est l’expérience vécue ? Doit-elle être considérée comme une expérience ontologique individuelle, auquel cas elle touche au plus profond de l’individu et de « son identité », de « ses identités » ? Participe-t-elle à ouvrir la « mécanique » identitaire à l’œuvre dans chaque individu ou bien à la refermer pour assurer son unité ? L’expérience de mobilité constitue-t-elle un acte spécifique de socialisation ? Logiques individuelles et logiques collectives sont-elles repérables dans l’expérience de mobilité ? À quel degré ?

Enfin, l’expérience mobilitaire entre le Japon et la France induite par le stage se veut formative. Mais de quelle nature sont les « savoirs » escomptés ? Purement cognitifs ? Linguistiques ? Culturels ? Interculturels ? Esthétiques ? Émotionnels ? Autres ? À qui s’adressent-ils ? Les « savoirs » retirés de l’expérience s’insèrent-ils dans une dimension sociale collective ou individuelle ? Quelle part revient alors au linguistique et au culturel dans les «  profits  » retirés (s’il y en a)  ? Quelles peuvent en être les conséquences pour le rapport pensé (ou non) de l’identité/altérité avant qu’il soit vécu et après ? Des modifications de celui-ci se font-elles jour ?

Ce questionnement foisonnant est celui auquel ont été soumises plusieurs séries de restitutions écrites produites par les stagiaires sur leur expérience mobilitaire en France. Il s’agissait de chercher des réponses dans des données d’une écriture, a priori, distanciée (temporellement, spatialement, humainement d’avec le moment de sa rédaction et de la lecture par d’autres). N’étaient-elles pas justement réifiées, devenant un lieu essentiel de cette expérience franco-japonaise ? Entre le vécu « brut »

et les mises en mots figeant l’expérience, quels éléments – lieux, moments, individus, objets, faits – pouvaient-ils être sélectionnés par les étudiants et réellement couchés sur le papier, restitués, transmis ? Quels éléments survivaient à la distance temporelle et spatiale et pourquoi ?

Notre question de départ s’est alors condensée dans la formule suivante : en quoi consiste et que représente une expérience de mobilité encadrée courte, voire ultra-courte, en France pour des étudiants japonais d’après les productions écrites qu’ils en laissent ?

Organisation générale du travail de recherche

La première partie (partie I, « Les mobilités et leurs composantes ») offre un panorama géographique et culturel élargi de l’état des recherches sur la mobilité académique internationale et nous permet de resituer notre problématique dans ce contexte global (chapitre 1, « Recherches antérieures : un état des lieux »). La situation européenne apparaît ainsi comme un lieu privilégié d’observation et de réflexion dans le domaine mobilitaire, comme effet du phénomène Erasmus et de l’émergence des principes du plurilinguisme et du pluriculturalisme. Nous l’avons complétée par une incursion dans l’aire nord-américaine et asiatique. Or nous constatons que, de tous côtés, le critère d’une certaine durée (six mois, un an ou plus) et celui d’un niveau minimum de maîtrise de la langue étrangère sont présupposés et qu’ils orientent les travaux dans le sens d’un questionnement sur les acquisitions (compétences, capitaux…) qui seraient consécutives voire inhérentes à l’expérience à l’étranger.

Outre le fait qu’il s’agit souvent de mesurer les différences entre un avant et un après, que le changement est posé comme allant de soi, tout comme les enrichissements, nous observons que ces orientations épistémologiques, mais aussi celles, méthodologiques, qui s’ensuivent, ne peuvent pas permettre de comprendre une expérience de mobilité ultra-courte avec des étudiants ayant un « faible »9 niveau à communiquer langagièrement, ne se présentant pas dans un dispositif conceptualisé de l’amont à l’aval du séjour (à la différence d’expériences ou de recherches-actions menées à Hong-Kong, à Macerata (Italie), à Fribourg (Suisse)…).

9 Nous utilisons ici le terme «  faible  » par commodité. En réalité, dans une

9 Nous utilisons ici le terme «  faible  » par commodité. En réalité, dans une

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