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Les situations de mobilités académiques pensées à partir d’un contexte plurilingue et pluriculturel

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RECHERCHES ANTÉRIEURES :  UN ÉTAT DES LIEUX

1.1 Les recherches sur les mobilités académiques internationales en Europeinternationales en Europe

1.1.4 Les situations de mobilités académiques pensées à partir d’un contexte plurilingue et pluriculturel

En fait, l’activation constante de la notion d’individu dans le champ des sciences humaines et sociales en général et dans celui de la DLC en particulier a permis un renouvellement de la recherche sur les mobilités et spécialement sur les mobilités académiques (Castellotti et Huver, 2012), ouvrant ainsi comme une nouvelle « ère » dans le domaine.

C’est dans cette dynamique épistémologique et historique que nous situons donc le groupe de recherches suivantes  :  E.  Murphy-Lejeune (2000, 2003), P. Kohler-Bally (2001), V. Papatsiba (2003), M. Anquetil (2006), F. Dervin (2008a).

Tous ces travaux possèdent entre eux des rapports de continuité  – la centration sur l’individu, sur l’acteur social – mais aussi des rapports de différence suivant la catégorie de relation que cet individu, que cet acteur social privilégie dans son expérience de séjour de mobilité : s’agit-il de s’intéresser uniquement à celles qui sont intersubjectives (Murphy-Lejeune, 2000, 2003  ; Dervin, 2008a)  ? À son insertion linguistico-culturelle dans un environnement donné (Kohler-Bally, 2001)  ? Ou bien, l’expérimentateur du séjour en mobilité est-il pensé comme aussi en relation avec un cadre académique et institutionnel (Anquetil, 2006) ? Comme engagé dans un parcours (Robin, 2014a)  ? Ou bien encore,

12 Contre un capital d’autochtonie ? C’est en tout cas la proposition faite par M.-H. Soulet (Soulet, 2008, p.  163). Si le fait d’être mobile est socialement valorisé car pensé comme pourvoyeur de nouvelles ressources symboliques, le contraire (c’est-à-dire ne pas l’être) ne signifie pas pour autant une absence de ces dernières. Elles permettent de s’insérer au niveau local d’une société donnée.

13 Pour une définition, voir section  1.1.4.1, «  L’étudiant-voyageur et son capital de mobilité (E. Murphy-Lejeune) ».

14 Pour un autre recensement dont nous nous inspirons, cf. Yanaprasart (2009, p. 164).

15 Nous remercions vivement Muriel Molinié de nous avoir communiqué ce document.

cet étudiant est-il suivi dans sa relation à un outil pour dire l’expérience (Develotte, 2006 ; Molinié, 2011a)16 ?

1.1.4.1 L’étudiant-voyageur et son capital de mobilité (E. Murphy-Lejeune)

Dans cet ensemble se découpe la figure de «  l’étudiant-voyageur  » dégagée par E.  Murphy-Lejeune (2003) à partir de la sociologie de G. Simmel ([1908] 1999) et du paradigme « proche-lointain », comme figure d’un nouvel étranger qui «  s’insère  » et «  est inséré  » dans une société d’accueil donnée, avec plus ou moins de bonheur, suivant qu’il se trouve détenir plus ou moins d’un certain capital, «  le capital de mobilité  » qu’elle décline en quatre composantes  :  «  Ce capital de mobilité comprend quatre composantes principales : l’histoire familiale et personnelle, les expériences antérieures de mobilité ainsi que les compétences linguistiques, les expériences d’adaptation, et enfin certains traits de personnalité » (Murphy-Lejeune, 2000, p. 138)17.

Les travaux d’E. Murphy-Lejeune (2000~2008) s’inscrivent dans un espace géographique particulier qui a vu se développer un système de mobilité académique dans l’Union européenne, le système Erasmus et une réflexion approfondie sur l’apprentissage des langues et des cultures accompagnant la mise en place d’une «  communauté  » historique transnationale (Endrizzi, 2010 ; Defays et Meunier, 2012 ; Erlich, 2012 ; Robert, 2013).

1.1.4.2 L’étudiant Erasmus dans un contexte plurilingue18 (P. Kohler-Bally)

Dans le même temps, comme nous l’avons signalé précédemment, les notions de plurilinguisme et de pluriculturalisme (Beacco et Byram, 2003  ; Hufeisen et Neuner, 2004  ; Beacco, 2005  ; etc.) en ont laissé éclore de nouvelles : individu plurilingue (Moore et Castellotti, 2008 ;

16 Sur ce point, voir section  1.2, «  Les recherches portant sur l’analyse de traces matérielles de restitutions d’expérience de mobilités académiques internationales ».

17 En 2008, elle porte ce nombre à six composantes  :  l’histoire familiale  ; l’histoire personnelle ; les expériences de mobilité ; les compétences linguistiques et culturelles ; les expériences antérieures d’adaptation  ; des traits personnels (Murphy-Lejeune, 2008a, p. 30).

18 Il s’agit d’un contexte très précis : celui du Centre d’enseignement et de recherche en langues étrangères de l’Université de Fribourg (cf. Gohard-Radenkovic, 2005b).

Zarate, Lévy et Kramsch, 2008 ; etc.), compétence plurilingue, compétence plurilingue et pluriculturelle (Castellotti et Moore, 2011), compétences culturelles (Gohard-Radenkovic, 2000), compétences interculturelles19, ou simplement au singulier, la compétence interculturelle (Byram, 2003  ; Coste, Moore et Zarate, [1997] 200920  ; Byram, 2011), répertoire plurilingue et pluriculturel (Castellotti et Moore, 2010), didactique du plurilinguisme (Gohard-Radenkovic, 2005b), didactique du FLE dans une perspective plurilingue et pluriculturelle (Gohard-Radenkovic, 2011), approches plurielles des langues et des cultures (Candelier, 2008 ; CARAP ; Candelier et Di Pietro, 2011)21, l’interculturalité liquide (Dirba et Dervin, 2006), etc.

Ainsi, à côté du courant socio-anthropologique des débuts de la didactique des langues et des cultures, une approche plus pragmatico-linguistique de l’expérience d’un séjour à l’étranger se dégage. C’est la perspective adoptée par P. Kohler-Bally (2001) qui examine la question de la mobilité académique du point de vue de l’acquisition, par un individu, de la compétence à communiquer langagièrement telle qu’elle peut être présentée dans les travaux du Conseil de l’Europe, en particulier dans le Cadre de référence pour les langues (CECR). Dans son étude, la dimension sociologique ou socioculturelle des apprentissages n’est pas ignorée mais elle est systématiquement envisagée comme croisée avec

19 Coste, D. (2001). « La notion de compétence plurilingue », dans Edusol. Séminaire.

« L’enseignement des langues vivantes, perspectives »  :  <http://eduscol.education.fr/

pid25239-cid46534/la-notion-de-competence-plurilingue.html> ; Zarate, G. (2001).

«  Les compétences interculturelles  :  définition, place dans les curriculums  », dans Edusol. Séminaire. « L’enseignement des langues vivantes, perspectives » : http://eduscol.

education.fr/pid25239-cid46537/les-competences-interculturelles%C2%A0-definition-place-dans-les-curriculums.html>.

20 Et Moore et Castellotti (2008).

21 «  Nous appelons “Approches plurielles des langues et des cultures” des approches didactiques qui mettent en œuvre des activités d’enseignement-apprentissage qui impliquent à la fois plusieurs (= plus d’une) variétés linguistiques et culturelles. Nous les opposons aux approches que l’on pourrait appeler “singulières” dans lesquelles le seul objet d’attention pris en compte dans la démarche didactique est une langue ou une culture particulière, prise isolément. Ces approches singulières ont été tout particulièrement valorisées lorsque les méthodes structurales puis “communicatives”

se sont développées et que toute traduction, tout recours à la langue première était banni de l’enseignement. Nous distinguons quatre approches plurielles[  :] l’éveil aux langues[  ;] l’intercompréhension entre les langues parentes[  ;] l’approche interculturelle[  ;] la didactique intégrée des langues  »  :  <http://carap.ecml.at/

Keyconcepts/tabid/2681/language/fr-FR/Default.aspx>.

la dimension sociolinguistique. Ainsi, les individus dont elle essaie de comprendre la construction et la signification du séjour de mobilité sont-ils présentés aussi comme des « apprenants » en situation d’« immersion » qui adoptent différentes stratégies dans des situations formelles et informelles d’apprentissage. Des évolutions de nature sociolinguistique ou socioculturelle peuvent apparaître durant le temps du séjour en mobilité (Gohard-Radenkovic et Kohler-Bally, 2005).

1.1.4.3 La mobilité comme dispositif d’insertion dans des contextes locaux (M. Anquetil)

Si M. Anquetil (2006) met toujours au centre de sa problématique un individu, un acteur social, elle le replace dans une situation d’interrelations non pas seulement avec d’autres mais aussi avec des institutions, des contextes locaux contraints, c’est-à-dire qu’elle interroge la dimension d’ingénierie éducative de la mobilité. De ce fait, elle intègre à la fois la question de la construction de ce cadre dans ses travaux (mise en place d’une recherche-action : Anquetil, 2006, pp. 51–52 ; 2012) mais aussi renforce le questionnement sur les compétences interculturelles d’étudiants. «  La seule expérience de dépaysement  » (Anquetil, 2006, pp. 1–2) ne pouvant suffire à l’ancrage et à la maîtrise de compétences interculturelles, opérantes pour et par l’individu, lui sert de point de départ à une expérience de formation qui s’étend aussi bien en aval qu’en amont du séjour. Elle se montre ainsi sensible à un critère particulier de l’expérience de mobilité : la durée.

1.1.4.4 Les situations de mobilité : communautés et rencontres sous tensions (F. Dervin)

Les recherches menées par F. Dervin (2004, 2007a, 2007b, 2008a, 2009a, 2009b, 2009c, 2010a, 2010b, 2010c, 2011a, 2011b, 2011c, 2013) se rattachent au courant d’interrogation de l’interculturel via une déconstruction des discours sur la culture (Abdallah-Pretceille, 2005 ; Dervin, 2009a, 2009b, 2010b, 2011b, 2013) et de l’idée même de « compétences » interculturelles, et ce en particulier en contexte de mobilité (2004). Ce chercheur, partisan d’une approche discursive fluide des identités, finit pourtant par repérer ici et là des points de solidification identitaires (2008a, 2008b). Il pose donc la question de la nécessité d’une formation à l’interculturel (Dervin, 2007b, 2009c ; Barbot et Dervin, 2011), d’une approche anthropologique de l’interculturalité (Dervin,

2011c ; Dervin et Fracchiolla, 2012) et d’une réflexion théorique plus solide qui s’adresseraient autant aux étudiants qu’aux didacticiens (Dervin, 2010c). À l’instar de M. Abdallah-Preteceille (2005, 2011) ou Pretceille ([1999] 2013), il se préoccupe aussi des aspects axiologiques sous-tendus par les pratiques dites interculturelles (2008a, 2008d). À travers un grand nombre de ses travaux, F.  Dervin, en effectuant un grossissement focalisant sur la figure de l’étudiant Erasmus, du stagiaire FLE et de leurs « impairs » de niveau interculturel, souligne en filigrane le fait que toute rencontre entre deux individus se développe sur un axe d’où les tensions ne sont pas absentes, malgré les apparences. L’analyse et la compréhension des échanges verbaux ou non, des pensées secrètes de l’un ou de l’autre passent par l’entérinement du fait qu’ils ne se façonnent que dans un contexte qui, pour faire sens, doit être élargi à l’ensemble des relations intersubjectives directes (sa famille, ses amis, ses « collègues ») ou indirectes (ses contemporains, ses ancêtres), ce réseau relationnel donnant sa couleur à un individu à un moment donné de son existence.

Les travaux de F. Dervin portent au final sur l’hypothèse d’une mouvance de toutes choses, positions statutaires sociales, identifications, dont il convient d’essayer de prendre conscience (au niveau des didacticiens-praticiens), de faire prendre conscience (au niveau des étudiants candidats à un séjour de mobilité) : « En d’autres termes, il ne s’agit pas de décrire un autre ou un même de façon “objective” mais d’examiner comment cultures et identités multiformes (dépassant la culture nationale) sont co-construites – et cela de façon instable – en interaction et utilisées pour se définir » (Dervin et Vlad, 2010).

1.1.4.5 Le séjour de mobilité : un lieu d’expériences diverses (V. Papatsiba)

Tous les travaux cités ci-dessus ont en commun de suivre les étudiants en situation de mobilité à travers des séries d’entretiens (libres ou semi-dirigés : Kohler-Bally, 2001 ; Anquetil, 2006 ; Dervin, 2008c). Il existe un deuxième groupe de travaux qui privilégient non pas le matériau verbal, pour accéder à une compréhension des acteurs sociaux en situation de mobilité, ou du moins pas en exclusivité, mais le matériau écrit (Papatsiba, 2002, 2003). C’est le cas de V. Papatsiba, qui reprend le

« dossier » des « effets formateurs [d’un] séjour à l’étranger » (Papatsiba, 2003, p. 49) à travers un corpus d’écrits qu’elle a sélectionné. D’après son analyse, les étudiants laissent entendre que le séjour à l’étranger est un lieu d’expériences de natures diverses (académique, touristique, relevant du

quotidien) qui hésite entre « aventure » et « rite de passage ». V. Papatsiba essaie, par ailleurs, de dégager les constantes des effets formateurs du séjour de mobilité qui sont revendiquées par chacun des individus dont elle a retenu le rapport, ce qu’elle assimile à une «  auto-évaluation  » de l’expérience. Les apprentissages de toutes sortes (disciplinaires, linguistiques, intellectuels, socioculturels, relationnels, etc.) côtoient des sentiments de prise de conscience sur soi et les autres, sur soi en relation avec d’autres, sur « l’individu comme membre d’une culture » (Papatsiba, 2003, p. 116) où « le sentiment national ne conduit pas nécessairement au repli identitaire, à la fermeture et au rejet des autres » (ibid., p. 117) pas plus que cette prise de conscience ne débouche automatiquement sur l’affirmation d’une identité européenne. L’autre et l’ailleurs restent très souvent descriptibles suivant des schémas mécaniques de portraits nationaux ou de contenus touristico-culturels à s’approprier. V. Papatsiba souligne aussi dans les textes des étudiants l’importance des relations humaines dans leur manière d’« apprécier » le séjour, soit au niveau basique du vécu quotidien, soit au niveau réflexif qu’ils expriment. Il semble en effet que si l’exposition de l’intimité est évacuée, celle de la singularité est mise en forme (ibid., p. 216), voire revendiquée (à travers différentes stratégies : d’implication ou de distanciation (ibid., p. 200)), de persuasion (ibid., p.  204). Cette chercheuse pense que la matérialité de l’écriture permet d’entrevoir un jeu subtil entre différentes figures du sujet mais aussi qu’elle dévoile des relations à différents niveaux d’altérité : dans son rapport, l’étudiant s’adresse, à tort ou à raison, à un pair culturel (autrui) pour lui raconter une expérience vécue ailleurs en interrelation effective ou non avec d’autres. Ainsi, l’écriture de l’expérience de mobilité, même produite avec du recul et un temps de réflexivité potentiel, ne garantit pas toujours la relation d’une prise de conscience de la position qu’avait le scripteur dans sa société d’accueil, ne préjuge pas du dégagement d’une

« introspection culturelle » (ibid., p. 243). Reste que, dans les discours tenus sur le séjour, les expériences de communication interpersonnelle apparaissent essentielles : elles peuvent provoquer méfiance et replis sur soi et sur le groupe Erasmus ou enclencher un renouveau de la manière de regarder l’autre et soi (même constat par exemple chez Perrefort (2008, pp. 85–86) ou chez Barbot et Dervin (2011, p. 8)).

1.2 Les recherches portant sur l’analyse de traces

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