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Bibliographe par vocation, Beuchot l’est aussi par métier. Avant même ses travaux sur Voltaire, il est en effet connu, au début du xixe  siècle pour son rôle au Journal de l’imprimerie et de la librairie.

D’ailleurs, même quand il est question de Voltaire, le rapport à cette activité bibliographique n’est pas loin. La moquerie non plus, tant cette fonction brille peu à cause de son caractère répétitif, et du rapport tenace qu’elle entretient avec la censure au moment de sa mise en place par l’ad-ministration napoléonienne. Reprenons cet extrait cité précédemment : Il y a longtemps que mon ami Musset-Pathay m’a bercé de l’espoir de pouvoir communiquer avec vous autrement que par l’intermédiaire 85. « En cherchant dans mes papiers, c’est-à-dire dans le peu que j’ai apporté à Rouen, j’en ai trouvé un Mémoire où il est aussi question des Discours académiques de Voltaire. Je crois aussi avoir promis ce morceau que je présume inédit (mai 1834) ; mais ma qualité de normand, et, plus encore, la révolution de Juillet m’ont empêché de tenir parole. Je me proposais de publier ce mémoire dans les Mélanges littéraires, dont j’étais chargé, et que je n’ai pas donnés. Je vous en envoie, ci-contre, les pre-mières pages. Si vous le possédez, imprimé ou manuscrit, j’en resterai là avec vous, sur ce point. Si vous ne le connaissez pas, et que vous le désiriez, dites un mot (dic verbum…), et je vous adresserai vite le reste » (Clogenson, l.a.s. à Beuchot, Rouen, 4 mai 1834, BnF, n.a.fr. 25134, f° 260).

86. Conservé à la BnF, n.a.fr. 14301, 124 f°. Voir infra, ch. 5.

87. Béatrice Ferrier, Stéphanie Géhanne Gavoty, Romuald Goudeseune et Magali Soulatges (dir.), « L’Esprit de collection », Voltaire numérique, n° 4, Société Voltaire, 2015. http://societe-voltaire.org/vn4.pdf

de votre Journal bibliographique. Car il m’a mandé sous la date du 25 février dernier : « Mon ami Beuchot doit vous écrire pour voltairi-ser. C’est un homme d’esprit, d’un caractère estimable par sa grande véracité (en cela nous marchons du même pied car j’appelle toujours un chat un chat) et qui fait mieux que son journal88. »

Lorsque Cayrol cherche à entrer en contact avec Beuchot, c’est autant à cette occupation qu’à son intention de « voltairiser » qu’il fait référence. Ce dernier est avant tout présenté comme le rédacteur d’un journal consacré à l’activité bibliographique, Le Journal de l’imprimerie et de la librairie, qui référence pour l’Administration du livre tous les ouvrages publiés. Organe de la censure sous Napoléon lorsque Beuchot en reprend la rédaction en 1811, ce journal reste semi-officiel sous la Restauration. C’est sans doute ce qui explique la raillerie de Musset-Pathay. Beuchot vaut certes plus que « son journal » et n’a rien à voir avec la censure. « Homme d’esprit », fuyant « l’esprit de parti », il est même monté aux barricades pour publier trois opuscules afin de défendre la liberté de la presse entre 1814 et 1815. Mais rien de tel dans ce périodique, il y est, du moins à première vue, essentiellement question de bibliographie : « J’annonce dans le Journal de la librairie tout ce qui est déposé et enregistré dans les bureaux de la direction de la librairie : je n’annonce pas ce qui ne l’est pas89. »

S’il prétend rester en dehors des querelles politiques de son temps, et met en avant son objectivité, Beuchot n’en occupe pas moins une position centrale dans le monde de l’édition à Paris au début du xixe  siècle. L’intérêt pour la bibliographie existe déjà depuis le xvie siècle au moins. Mais on lui préfère les énumérations de certaines bibliothèques choisies notamment pour leur luxe. L’apparition de la Bibliographie annuelle et universelle entre 1748 et 1750 marque le pas-sage à un intérêt pour la production courante. Il s’agit en effet de por-ter l’attention sur ce qui vient de paraître, de la façon la plus exhaustive qui soit. Mais cette statistique reste non officielle, puisqu’elle se base sur les chiffres des libraires privés90. D’après Jean-Yves Mollier91, c’est

88. Cayrol, l.a.s. à Beuchot, Moulins, 4 octobre 1826, BnF, n.a.fr. 25134, f° 46.

89. Beuchot, l.a.s. à Cayrol, 28 décembre [1827], IMV, MS 34-12.

90. Robert Estivals, Statistique bibliographique de la France au XVIIIe siècle, Paris, Mouton & Co, 1965, p. 361-362.

91. Jean-Yves Mollier, Une autre histoire, op. cit., p. 114.

à Panckoucke que revient l’intuition commerciale de l’intérêt que pouvait susciter une revue bibliographique publiée à large échelle dans les milieux littéraires. C’est en 1782 qu’il pose les premiers jalons de ce périodique, lorsqu’il joint au Catalogue hebdomadaire, feuille biblio-graphique qui publie la liste des productions courantes depuis 1763, le Journal de la librairie qu’il vient de racheter. Il adjoint ces deux titres au Mercure de France qu’il dirige alors. C’est à lui, en outre, que l’on doit le recours à ce type de publication pour dresser une statistique qui prend un caractère officiel : « Suivant l’Arrêt du Conseil d’État du Roi, du 23 décembre 1785, aucuns ouvrages ne peuvent être annoncés dans les autres journaux et feuilles périodiques, qu’ils ne l’aient été préalablement dans la Gazette de France, le Journal de la librairie, sous les peines y portées92. » Dans une de ces alliances étranges entre les intérêts de privés ambitieux et ceux du pouvoir en place, Panckoucke obtient de son côté l’exclusivité de ce marché florissant. Du côté du pouvoir royal, on dispose en parallèle d’un lieu où publier des arrêts et d’un instrument de statistique des publications privées93.

C’est ce dernier aspect sans doute qui a suscité l’intérêt de Napoléon. Il comprend très vite l’importance de la presse pour influencer l’opinion publique. Il a besoin d’un organe de censure pour contrôler tout ce qui est publié. La Direction générale de l’impri-merie et de la librairie, dont les membres reçoivent le titre officiel de censeurs impériaux, est fixée par un décret du 14 décembre 1810.

Lorsque Beuchot reprend en main la publication, en novembre 1811, celle-ci porte le nom de Bibliographie de l’Empire français ou Journal de l’imprimerie et de la librairie94. Il faut néanmoins se méfier et ne pas tirer de conclusions trop hâtives quant à la présence de Beuchot aux côtés de Napoléon. Ne s’est-il pas en effet montré un virulent critique

92. Journal de la librairie, ou Catalogue hebdomadaire, Paris, Ph.-D. Pierres, 1782, t. XX, p. 1.

93. Pour approfondir ces questions, on peut se référer à l’article de Gilles Feyel,

« Presse et publicité en France (xviiie et xixe  siècles) », Revue historique, 4/2003 (n° 628), p. 837-868.

94. Henri Welschinger, dans son ouvrage La Censure sous le Premier Empire avec documents inédits, Paris, Charavay, 1882, p. 33, note 1, relève même la présence de Beuchot au sein du « bureau de l’esprit public », nom que l’on donne, semble-t-il, au collège des censeurs impériaux. Ceux-ci perçoivent en outre un traitement annuel fixe de 1 200 francs en plus d’une « rétribution annuelle proportionnelle à leurs travaux sur les fonds de la direction générale ».

de son pouvoir dans un opuscule au titre évocateur, Oraison funèbre de Buonaparte95 ? Peut-on l’accuser d’opportunisme, alors qu’il s’y moque, avec beaucoup d’ironie, précisément de ceux qui ont retourné leur opinion ? Toujours est-il qu’après les Cent-Jours, le journal garde des attributions en partie étatiques et fonctionne comme dépôt légal.

Il diffuse également les lois sur la presse promulguées sous les règnes de Louis XVIII, Charles X et Louis-Philippe.

C’est au moment de la fin de l’Empire que la publication change de titre et devient la Bibliographie de la France ou Journal général de l’imprimerie et de la librairie. Si ce journal n’est plus officiellement un organe de la censure sous la Restauration, il reste une véritable « Bible96 » pour les bibliophiles de l’époque. La réfé-rence aux professions du livre nous indique également qu’il est adressé aux corps de métiers de l’imprimerie et de la librairie.

Voir son livre y figurer en bonne place est important pour tous les artisans qui participent à l’élaboration d’un ouvrage, de l’auteur à l’éditeur en passant par le libraire. Malgré l’absence de données chiffrées sur le lectorat, le succès de cette publication est indé-niable. Le prix de l’abonnement, relativement modique comparé aux autres journaux, suffit à convaincre du succès commercial de la Bibliographie de la France97. La permanence d’un périodique, sa longévité, est d’après Jean Sgard un marqueur du succès, un signe de la rencontre du journal avec son lectorat98. C’est donc une publi-cation qui positionne Beuchot comme un acteur incontournable du monde du livre de l’Empire à la Seconde République. Même si cette activité mécanique suscite le mépris de certains, dont Barbey d’Aurévilly qui va jusqu’à qualifier Beuchot de « bête » dans une lettre à Trébutien.

95. [Beuchot], Oraison funèbre de Buonaparte, par une société de gens de lettres ; prononcée au Luxembourg, au Palais-Bourbon, au Palais-Royal et aux Tuileries, Paris, Aux dépens des auteurs, Chez Delaunay, Blanchard, Pélicier, Dentu, 1814.

96. Le terme employé par Jean-Yves Mollier, Une autre histoire, op. cit., p. 114.

97. D’après Françoise Parent, il en coûtait par exemple 112 francs pour s’abonner au Monsieur pendant un an, et 72 pour Le Constitutionnel (Henri-Jean Martin et Roger Chartier, Histoire de l’édition française, t.  II, p.  613). Ces chiffres sont confirmés par Élisabeth Parinet, Une histoire de l’édition à l’époque contemporaine :

XIXe-XXe siècle, Paris, Seuil, 1992, p. 30.

98. Jean Sgard (dir.), Dictionnaire des journaux, 1600-1789, Paris, Universitas ; Oxford, Voltaire Foundation, 1991.

Beuchot vaut Brunet. Oui, mais quand j’ai cité Beuchot, j’ai cité le bibliographe, l’homme du document et de l’étiquette du sac. Je n’ai pas cité l’homme d’esprit, absent depuis qu’il est au monde. J’ai cité un nom officiel pour cette populace de la lecture en vue de qui (c’est la honte des auteurs les plus fiers !) on écrit toujours. Si vous aviez un autre bibliographe de notoriété, moins bête que Beuchot, je lui donnerais bien sa place99.

Même considéré, par certains, comme dénué d’esprit, Beuchot n’en reste pas moins la figure incontournable en matière de biblio-graphie. C’est d’ailleurs à ce propos qu’une partie non négligeable de ses correspondants l’interpellent. C’est le cas par exemple de Cayrol, lequel prend plusieurs fois contact avec Beuchot pour avoir accès aux lignes de son journal  : « Au 1er  moment je donnerai trois ou quatre lignes au plus dans le Journal de la librairie sur votre bible de Moulins100. » Cette réponse fait plus précisément suite à une demande de Cayrol de parler dans le Journal de la librairie d’une découverte qu’il aurait faite sur la datation de la Bible de Moulins, où il réside alors. Cette demande est renouvelée régulièrement dans la correspon-dance entre les deux hommes, démontrant bien l’intérêt que peut avoir Cayrol à entrer en relation avec Beuchot. Même si elle se déroule sur le ton de l’amitié et reste toujours très courtoise, la relation entre les deux hommes est en effet, aussi, par moments, intéressée. C’est finalement tout à fait compréhensible : Cayrol vit en province, entre Compiègne, Moulins et Amiens. Il utilise la connaissance de Beuchot du monde de la librairie parisienne et lui demande de lui acheter des livres et de pouvoir bénéficier de ses prix de libraire. C’est presque un échange de bons procédés lorsqu’il met ensuite son travail sur la Correspondance de Voltaire à disposition de Beuchot pour son édition.

Soulignons enfin que la rédaction du Journal de la librairie est une position à partir de laquelle Beuchot peut développer son réseau.

Cet emploi lui offre une place en vue, au centre de la vie éditoriale de l’époque. À partir de là, il lui est plus aisé de trouver des appuis ou de nouer des connaissances. Sa publication reste avant tout statistique. La

99. Barbey d’Aurévilly, lettre à Trébutien, Paris, 28  juin  1856, Correspondance générale, t. V, 1856, Paris, Les Belles lettres, 1985, p. 166.

100. Beuchot, l.a.s. à Cayrol, 2 avril [1830], IMV, MS 34-40, f° 1.

continuité de la ligne éditoriale et un ton, par-delà les différents chan-gements de régimes politiques au cours du xixe siècle, presque toujours strictement factuel confirment qu’il ne s’agit pas d’une publication à visée propagandiste. Elle n’est en outre pas rattachée explicitement à l’un ou l’autre des camps politiques. La liste des ouvrages est pré-cédée d’une rubrique « Avis », qui rappelle le coût de l’abonnement – de 20 francs par an. Quant aux interventions directes de Beuchot, elles servent surtout à apporter des précisions bibliographiques et historiographiques relatives aux publications annoncées. Encore une fois, c’est en compilateur de bibliographies qu’il travaille le plus sou-vent. Son intérêt se pose en effet sur les détails qui permettent de différencier une édition par rapport à une autre : le format, le mode de publication, le prix, le papier, les préfaces, les notes… tout ce qui touche de près ou de loin à la confection d’un volume.

Quérard relève bien les mérites de Beuchot dans le soin que ce dernier apporte à cette publication, malgré qu’il s’agisse d’un journal en partie toujours lié à la censure101. Beuchot quitte pourtant, parfois, l’apparente neutralité et le sérieux de l’érudition bibliographique dont il se réclame. Lorsque, par exemple, sous le couvert de descriptions très factuelles, il profite de sa position pour dénigrer une édition des Œuvres complètes de Voltaire concurrente, et sans doute influencer par ce biais la réception de celle-ci dans un sens qui l’arrange.

L’indigne Beuchot ne s’est pas contenté de l’article de son journal, il vient de le faire imprimer dans le n° 21 du Globe, avec un préambule et une fin de la plus insigne mauvaise foi. J’y ai répondu comme il le mérite, et le journaliste s’étant refusé à imprimer ma lettre, je lui ai signifié sommation judiciaire de l’intérêt. J’attends. Ce Beuchot est un bien vilain homme, quelque jour vous serez de mon avis102.

101. Déplorant l’aspect purement statistique pris par la revue à partir de 1841, Quérard précise que  : « Successivement il [Beuchot] y avait introduit des infor-mations qui étaient appréciées des bibliophiles et des personnes qui s’occupent d’histoire littéraire. […] Il était possible d’améliorer encore ; mais enfin tel qu’il était, avec toutes ces informations, ce journal offrait plus d’utilité aux libraires et aux amateurs de livres qu’il n’en offre aujourd’hui » (J.-M.  Quérard, Littérature française contemporaine, op. cit., p. 437).

102. Delangle, l.a.s. à Clogenson, « reçue le 7  novembre », [novembre  1824], Oxford, Voltaire Foundation, MS 78.

Ce passage n’est pas sans rappeler l’importance de l’activité jour-nalistique décrite notamment dans les Illusions perdues de Balzac. En l’occurrence Beuchot attaque Delangle, libraire et codirecteur d’une édition des Œuvres complètes de Voltaire (1824-1834, 95 vol. in-8°) à laquelle participe entre autres son correspondant Jean Clogenson.

« Entre autres », en effet, tant l’édition des libraires Dalibon et Delangle réunit une pléiade d’hommes de lettres de l’époque  : MM. Daunou103, Dubois104, Étienne105, François de Neufchâteau106, Leclerc107 et Nodier108 accompagnent Clogenson sur la couverture du premier volume. La liste des collaborateurs présents sur la page

103. Archiviste et bibliothécaire, Daunou collabore également à la Biographie universelle ainsi qu’au Journal des savants. Proche de l’Institut, constitutionnaliste convaincu, il se distingue de Beuchot en refusant la position de censeur impérial dont voulait l’honorer Napoléon. (Baron Walckenaer, Notice historique sur la vie et les ouvrages de M. Daunou, Paris, Firmin Didot, 1841 ; Henri Welschinger, La Censure, op. cit., p. 32-33.)

104. Dubois succède à Beuchot comme éditeur du Voltaire-Perronneau. Voir infra, ch. 4 et ch. 6.

105. Charles-Guillaume Étienne, élu libéral à la Chambre des députés en 1820, il a également été un temps proche de Napoléon. Nommé censeur impérial en 1810, il a également collaboré au Journal de l’Empire. Il est avant tout un écrivain et auteur dramatique. Il est également connu comme journaliste pour ses collaborations dans la Minerve française. (Ephraïm Harpaz, L’École libérale sous la Restauration.

Le « Mercure » et la « Minerve », 1817-1820, Genève, Droz, 1968 ; Léon Thiessé, M. Étienne. Essai biographique et littéraire, Paris, Firmin Didot frères, 1853 ; Henri Welschinger, La Censure, op. cit., p. 32-33.)

106. Écrivain et homme politique un temps proche des conventionnaires, puis de l’Empereur, François de Neufchâteau arrive au terme de sa vie au moment où débute l’édition Dalibon-Delangle. Plus surprenant encore, s’il semble favorable à la publication d’une édition d’un « Voltaire classique », il souhaite qu’il s’agisse d’une édition choisie des Œuvres de Voltaire. Il y a de quoi sourire quand on sait que l’édition sur laquelle figure son nom atteindra presque les cent volumes.

(Dominique Margairaz, François de Neufchâteau. Biographie intellectuelle, Paris, Publications de la Sorbonne, 2005, notamment p. 14.)

107. Théodore Leclerc est connu comme dramaturge, bien qu’il se soit spécialisé avant tout dans les proverbes, encouragé dans cette voie par Mme de Genlis. Proche de Fiévée, avec lequel il vit en « ménage masculin », il répugne, comme Beuchot, à se ranger derrière une bannière politique. (Josiane Bourguet-Rouveyre, « Théodore Leclerc ou le regard d’un Parisien sur d’autres Parisiens sous la Restauration », Être parisien, Paris, Publications de la Sorbonne, 2004, p. 465-477.)

108. Position ambivalente que celle de Nodier, lui qui professe des sentiments royalistes et se tient dans le même temps, proche de libéraux comme Delangle.

(Jacques-Remi Dahan, Visages de Charles Nodier, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2008 ; Charles Nodier, Actes du colloque du deuxième centenaire. Besançon, mai 1980, Paris, Les Belles Lettres, 1981.)

de titre suggère un choix des éditeurs Dalibon et Delangle  : est-il politique ou scientifique ? Ils semblent avant tout vouloir s’entourer d’hommes de lettres confirmés et si certains sont proches des idées libérales, d’autres, à l’exemple de Nodier, le sont moins. Ces diffé-rentes carrières évoquent en partie celle de Beuchot. L’absence de celui-ci dans le projet de Dalibon et Delangle découle-t-elle moins des idées politiques de Beuchot que d’une défiance plus personnelle à son égard ? N’est-il considéré que comme un compilateur de données bibliographiques ? Jouit-il, d’un point de vue littéraire, de moins de crédit que ses collaborateurs ? Rien, dans tous les cas, ne vient for-mellement justifier l’absence de Beuchot dans ce projet.

Sans doute un peu vexé de ne pas en faire partie, Beuchot craint-il déjà en 1824 que l’édition ne fasse de l’ombre au projet d’édition qu’il médite ? Toujours est-il qu’il se plaît à relever qu’au quatrième volume, le « total des notes historiques, scientifiques et lit-téraires de MM. Arago, Clogenson, Daunou, L.  Dubois, Étienne, François de Neufchâteau, Leclerc, Ch. Nodier [est de] zéro109 ». Il accuse donc l’éditeur de publicité mensongère, en démontrant par les chiffres qu’il n’accomplit pas le travail qu’il s’est contractuel-lement engagé à livrer à ses souscripteurs. Intransigeant avec ses concurrents, Beuchot n’épargne pas ici non plus l’un de ses amis, partie prenante de ce projet. Impitoyable, pointilleux, vindicatif, Beuchot montre là une des facettes sans doute les plus sombres de sa personnalité.

Son attitude illustre surtout le pouvoir de la presse, qui peut faire ou défaire des réputations. Ce pouvoir, il y a accès avec son Journal.

D’ailleurs, il conserve son poste de rédacteur jusqu’à sa retraite, un an avant sa mort. C’est la preuve sans doute de l’importance stra-tégique de cette position, mais aussi, surtout, de son importance matérielle sur le plan des revenus de Beuchot. L’absence de chiffres à ce propos nous force à en rester à la supposition : mais l’activité de journaliste à la Bibliographie de la France constitue sa principale et plus régulière source de revenu. Reprenons le fil de la biographie par

D’ailleurs, il conserve son poste de rédacteur jusqu’à sa retraite, un an avant sa mort. C’est la preuve sans doute de l’importance stra-tégique de cette position, mais aussi, surtout, de son importance matérielle sur le plan des revenus de Beuchot. L’absence de chiffres à ce propos nous force à en rester à la supposition : mais l’activité de journaliste à la Bibliographie de la France constitue sa principale et plus régulière source de revenu. Reprenons le fil de la biographie par