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Tout d’abord, le premier principe de l’autorité parentale est sa nature de fonction

«c’est-à-dire un ensemble de droits et de devoirs corrélatifs : chaque droit reconnu aux pères et mères n’est que l’autre face d’un devoir qui leur ait imposé ; cette fonction est finalisée : elle appartient aux pères et mères pour protéger l’enfant et assurer son éducation.» (Dekeuwer-Défossez 1999 : 71).

Le second principe est celui de d’égalité «la loi a posé le principe égalité des pères et des mères : égalité de droit, mais aussi égalité de devoir.» (Dekeuwer-Défossez 1999 : 71).

Le troisième principe constructif de l’autorité parentale est celui de couple parental :

«c’est-à-dire, l’idée selon laquelle il est de l’intérêt de l’enfant d’être élevé par ces deux parents, dans la famille fondée sur le mariage comme dans la famille créée hors mariage, que le couple parental soit uni ou qu’il soit désuni.» (Dekeuwer-Défossez 1999 : 71).

S’ils ont été réitérés au moment des différentes réformes, chaque principe s’est affirmé avec une force différente à chaque époque. Historiquement, c’est d’abord le principe de l’autorité parentale comme fonction qui s’est affirmé. La fin des années 1980 et le début des années 1990, ont inscrit définitivement le concept d’égalité entre les pères et les mères.

Aujourd’hui, c’est l’idée d’un couple parental qui s’affirme de plus en plus et domine les projets de réforme en France.

Le principe de parité parentale s’ajoute aux trois principes précédents : en effet, l’obligation des parents de s’inscrire dans leurs fonctions, à l’intérieur du binôme parental, est l’un des nouveaux devoirs qui leur incombe, au nom de l’enfant. L’idée est celle d’une coopération parentale après la rupture familiale.

«A l’égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l’accord de l’autre, quand il fait seul un acte visuel de l’autorité parentale relativement à la personne de l’enfant.» (Article 372-2). Cet article inscrit la présomption de coopération entre les parents dans l’exercice de l’autorité parentale (que le couple soit uni ou séparé111). Les situations conflictuelles sont interprétées comme une exception à cette règle de principe.

110 Le «fmcp» critique la procédure de l'enquête sociale en quatre points : elles sont le reflet d'idées traditionnelles ; les techniques des enquêtes sociales desservent les enfants ; les enquêtes sociales sont contraires à la loi et elles servent le conflit, non le consensus.

111 Lors des recompositions familiales, la «beau-parentalité» se distingue de la «coparentalité». «Il y aurait quelque incohérence à affirmer d'un côté le principe de coparentalité, à insister sur la place et sur le rôle du

De plus, le principe d’égalité entre les enfants est un élément constitutif de l’exercice de l’autorité parentale : l’exercice de l’autorité parentale, dans ses effets, ne doit pas différencier les enfants légitimes des enfants naturels.

Par «coparentalité» on entend donc la forme actuelle de l’exercice de l’autorité parentale basée sur les principes d’égalité, de partenariat, s’exerçant conjointement pour les pères et mères, concernant l’ensemble des enfants, quelle que soit la situation matrimoniale des parents. Mais les résistances des institutions à l’exercice de la «coparentalité» sont nombreuses.

parent qui ne vit pas avec l'enfant et, de l'autre, à institutionnaliser une fonction de beaux-parents qui risque fort d'entrer en concurrence avec la fonction parentale.» (Dekeuwer-Défossez 1999 : 89). La commission a choisi de ne pas assimiler le beau-parent à une figure parentale mais de l'assimiler à un tiers pour lequel la commission propose d’étendre les moyens d’action. Le couple «recomposé» est en premier lieu un nouveau couple conjugal.

Sans nier la charge et les relations quotidiennes avec les enfants, elle la distingue de la fonction parentale, liée à l'autorité parentale et à la filiation. On aboutit donc ici à une distinction de plus en plus grande du couple conjugal et de la fonction parentale.

SOUS-SECTION II.B.3 L

A GESTION SOCIALE DU RISQUE FAMILIAL

II.B.3.1 L’obligation d’entretien et l’obligation alimentaire

Nous nous intéressons maintenant à l’expression, dans le code civil, des droits et des devoirs qui unissent les membres d’une même famille. L’obligation parentale d’entretien et les obligations alimentaires, sont inscrites dans le code civil sous le chapitre «des obligations qui naissent du mariage» (Art. 203 et s.). Elle s’inscrit différemment dans les familles légitimes et les familles naturelles.

Pour les premières, l’obligation est liée au lien matrimonial du couple parental, pour les secondes, c’est le lien de parenté avec l’enfant qui la détermine. Le souhait d’harmoniser les statuts des familles légitimes et les familles naturelles, pousse le législateur à se distancier de plus en plus d’une conception restrictive du mariage. Indirectement, c’est donc la référence au couple conjugal légitime qui disparaît, et de façon plus profonde, au couple conjugal112. Les rapports générationnels entre les parents et les enfants, s’autonomisent de plus en plus des rapports conjugaux.

La commission Dekeuwer-Défossez a constaté que de nombreuses situations ne respectent pas les accords sur les pensions alimentaires, les droits de visite et l’hébergement : or, selon l’avis de la commission, plus on supprimera les procédures conflictuelles, plus on favorisera les accords entre parents et plus ceux-ci seront respectés. «Des évolutions se dessinent : les enfants, s’ils résident majoritairement chez leur mère, voient plus régulièrement leurs pères, les pensions impayées traduisent probablement davantage l’insolvabilité des débiteurs que leur mauvaise foi.» (Dekeuwer-Défossez 1999 : 177).

II.B.3.2 La protection sociale du parent seul

Les familles monoparentales sont au centre de ce que Claude Martin appelle

«l’apparition de la nouvelle pauvreté dans le courant des années quatre-vingts, c’est à dire une pauvreté conçue comme une menace pesant sur des personnes aptes au travail, qui ont connu un «accident de trajectoire» (...) Parmi les accidents de trajectoire, on trouve bien sûr au premier rang la perte de l’emploi, mais les ruptures familiales apparaissent également comme une source de désinsertion et d’exclusion. Le CERC (1993) a ainsi mis en évidence récemment, à partir des résultats de l’enquête «situation défavorisée» de 1986-1987, les rapports qui existent entre chômage et rupture conjugale, l’un entraînant l’autre et réciproquement, jusqu’à provoquer des situations de précarité ou d’exclusion sociale» (Martin 1996 : 55).

Une étude du CERC de 1993 (Etude citée par Commaille (1996 : 70)) montre, par la composition des revenus, que le poids des transferts est plus important dans les familles

112 Dans le cadre des réformes sur le droit civil, ce sont les liens de parenté qui sont privilégiés. La commission insiste sur la distinction entre, d'un côté le lien de parenté d'où découle la fonction d'autorité parentale et l'obligation parentale d'entretien, et de l'autre côté, la prise en charge d'un enfant comme dans le cas de la beau-parentalité à la manière d'un tiers (Dekeuwer-Défossez 1999 : 170). C'est pour ces raisons que la commission s'exprime contre le fait de fonder une obligation alimentaire pour le beau-parent.

monoparentales qui ont connu une rupture conjugale. 24,5% des hommes contre 43% des femmes séparées tirent plus de 20% de leur revenu disponible des transferts sociaux ; ce taux atteignant la moitié des revenus pour 23,4% des femmes. Cette dépendance s’atténue, sans cependant disparaître totalement, lorsqu’il y a reconstitution d’un nouveau couple.

Ainsi, les événements déclencheurs de la demande de soutien public, en France, sont le chômage, puis la rupture conjugale en seconde place.

De plus, 80% des mères en situation de monoparentalité perçoivent des prestations familiales et des aides au logement pour un montant moyen de 2570 Fr. [390 Euros] par mois, 20% ne sont pas ou peu couvertes par les prestations familiales (celles qui n’ont pas d’enfant de moins de trois ans ou celles qui ont un seul enfant) (INSEE 1994 : 82). Cette somme prend une part plus ou moins importante dans le budget du ménage, en fonction du niveau de vie et des autres ressources financières. Les écarts sont très importants.

Dans ces 80%, sont comptées les femmes en situation de monoparentalité qui dépendent d’un revenu minimum113, soit 26% d’entre elles (pour elles la part de l’aide publique est supérieure à 18%). Pour les 74% qui ne sont pas dépendantes d’un revenu minimum, plus de la moitié d’entre elles ne reçoivent pas plus de 1000 Fr. [150 Euros] (pour elles la part de l’aide sociale dans le budget est inférieure à 18%).

Les femmes qui n’ont pas d’une activité professionnelle, qui n’ont pas droit aux aides familiales ou qui sont en fin de droit aux allocations chômage et familiales, sont à 26%

dépendantes d’un revenu minimum. En 1993, 35 % des parents célibataires reçoivent un minimum social (API ou RMI (Revenu Minimum d’Insertion )) (Martin 1996 : 56). Une minorité des familles monoparentales font l’objet de mesure de revenu minimal (environ un quart d’entre elles).

Ces chiffres ont été avancés afin de nuancer l’interprétation de la part de l’aide sociale dans les budgets des ménages monoparentaux en rappelant qu’il s’agit d’un groupe très hétérogène.

Les aides publiques représentent respectivement 18% et 12% (cf. Tableau 20) dans la composition financière du budget des mères seules en France114 et en Allemagne115.

113 Les parents isolés se sont révélé particulièrement vulnérables face à la pauvreté et au dénuement (Whiteford, Bradshaw 1994 : 79). Le pourcentage de familles monoparentales situées en dessous du seuil des bas revenus est passé de 18 à 27% entre 1984 et 1990, et de 11 à 16% pour les très bas revenus (Martin 1996 : 56). En 1993, 35% des familles monoparentales reçoivent un «minimum social». Leur situation de précarité se distingue de ce qu'on appelle traditionnellement la grande pauvreté. «La précarité sociale liée à la monoparentalité représente une autre forme de pauvreté, résultat d'une vulnérabilité produite par la brusque chute des ressources non compensée par un statut socioprofessionnel avantageux, par la charge exclusive des enfants» (Commaille 1996 : 70).

114 La part de l’Etat est donc importante dans le budget des familles monoparentales. Pour les couches sociales les moins défavorisées, il s’agit d’un apport d’appoint (allocations familiales ou aide au logement). Pour celles en situation de précarité, le revenu minimum de l’aide sociale est très important, jusqu'à ce que l’entrée sur le marché du travail, ne les en fasse sortir.

115 Le débat relatif à la dépendance par rapport à l'assistance publique ne les épargne pas. Ces discussions sont récurrentes en France et en Allemagne, surtout relayées par les partis les plus conservateurs et les libéraux, même si il n’y a pas de «panique sociale» comme en Grande-Bretagne. «Le débat politique sera en permanence traversé par un débat sur les limites du devoir d'assistance en relation avec le degré de responsabilité de l'individu confronté à une situation de pauvreté(...) Dans tous les débats sur les instruments d'une politique de solidarité étatique, apparaît à la fois la crainte de leur effet désincitateur au travail, de leur effet de

«déresponsabilisation», de leur détournement par des stratégies astucieuses de la part de bénéficiaires abusifs»

(Commaille 1996 : 47-49). Nous avons vu que ces arguments sont apparus lors de la mise en place des allocations spécifiques aux familles monoparentales.

Tableau 19 Composition du revenu des familles monoparentales en France et en Allemagne

FRANCE (**) ALLEMAGNE(*)

Activité rémunérée 54,9% 54%

Retraite 7,1% 12%

Pension alimentaire 6,6% 15%

Aide sociale 18,3% (prestations familiales) 12%

Indemnité chômage 3,2% 6%

Autres 9,9% 1%

(*) Sources : Mikrozensus1985, Sonderauswertung des Stat. Bundesamtes

(**)

Sources : INSEE, enquête Budget Famille 1989

Cette différence s’explique par le fait que la France fait partie des quelques rares pays d’Europe qui ont des aides sociales spéciales aux familles monoparentales, comme l’API. La population d’allocataires ayant droit à cette allocation de soutien recouvre donc toutes les situations de monoparentalité en dessous du seuil de cette allocation différentielle116.

II.B.3.2.1 L’API

Historiquement, les premières aides sociales dont ont bénéficié les familles monoparentales étaient liées à leur statut de veuve. Puis, en 1938, outre le décès du conjoint, c’est le risque familial lié à l’absence ou à la disparition de l’un des deux parents qui est pris en compte. Ces familles bénéficient d’une majoration des prestations familiales. L’aide est principalement indirecte, par le biais de remises fiscales. Cette solution est d’ailleurs encore privilégiée en Allemagne. «A la Libération, la première dérogation à la norme liant le droit aux allocations familiales à l’exercice d’une activité salariée, s’effectuera au profit des veuves de guerre, tandis que le bénéfice de l’allocation de salaire unique était étendu aux mères célibataires» (Lefaucheur 1991 : 125).

Il faudra attendre les années 1970 pour voir de nouveaux changements dans la couverture du risque de monoparentalité. L’allocation pour orphelin créée en 1970 a étendu ses critères en 1975. Puis finalement, c’est en 1976 qu’est apparue l’Allocation pour Parent Isolé (API).

Cette allocation marque le pas vers une reconnaissance et une prise en charge collective de la

Effectivement, dans un contexte où les débouchés sur le marché du travail sont de plus en plus difficiles, «la question de l'Assistance est à nouveau posée pour celles qui n'ont pas les atouts nécessaires pour intégrer le marché du travail (en termes de qualification, d'expérience, mais aussi et peut-être surtout de l'âge) (Martin 1996 : 91).

116 En fait deux groupes se distinguent dans les familles monoparentales : Pour les premières, celles à très faible revenu (inférieur à 65 448 Fr. [9978 Euros]), l'aide étatique est primordiale dans leur budget, elle se partage entre les prestations familiales (40,2%) et les indemnités chômage (11,3%). Le salaire représente moins d'un tiers des ressources (29,1%), l'apport des pensions alimentaires est extrêmement bas (3,7%). Pour les secondes, dés que le revenu du ménage est plus élevé, on voit une autre tendance se profiler : la première source de revenu est le salaire (supérieur à 79 704 Fr. [12151 Euros] ) (pour un peu moins des deux tiers du budget), les pensions pour environ 6% (deux fois plus que pour les ménages les plus pauvres). En France, les salaires des couples représentent 70,7% et les prestations familiales 15,6% de leur budget (INSEE 1989).

situation de pauvreté dans laquelle se trouvent les familles monoparentales. Il ne s’agit plus uniquement de traiter des situations de veuvage, mais de tenir compte des séparations.

L’API est une allocation différentielle, donnée sous condition de ressource. Son montant est dépendant du nombre d’enfants. Sa durée est déterminée par l’âge du dernier-né (jusqu’à ses trois ans) ou bien limitée à un an, à partir de la séparation.

Lors de sa création, l’API fut discutée, dans un relatif consensus, à l’Assemblée nationale et au Sénat (Martin 1996 : 70). Des principaux arguments avancés, nous avons retenu les suivants : les dispositions de l’API permettaient d’éviter le recours à l’aide sociale à l’enfance (pour les enfants), d’éviter le recours à l’interruption de grossesse, et de permettre la sortie du dispositif d’aide sociale ou d’assistance (Martin 1996 : 69). L’API évite d’associer la stigmatisation de l’assistance sociale au risque familial. Les familles monoparentales sont conceptualisées comme une catégorie du droit social.

Créée en 1976, en pleine montée de l’incertitude économique, l’Allocation pour Parent Isolé est le résultat de l’intérêt grandissant à l’égard des familles. La politique familiale du gouvernement Raymond Barre (1976-1981), pendant le mandat du président Giscard d’Estaing, renoue avec les orientations «familialistes». Dans ce contexte, l’API fut la tentative de reconduction de la femme dans un rôle de mère au foyer. Ce salaire maternel n’a pu compenser la perte du deuxième salaire et la détermination des femmes à rester présentes sur le marché du travail. Les mesures ont été justifiées par l’idée que les familles d’au moins trois enfants devaient être soutenues et que la baisse du taux de fertilité devait être combattue. Les mesures prises à l’époque, étaient plus liées aux objectifs natalistes qu’à la défense de l’institution familiale : la multiplication des facilités a aidé l’insertion des femmes dans la vie professionnelle, du moins à mi-temps ; le renoncement à l’activité professionnelle n’est plus un critère d’attribution des aides familiales ; et le gouvernement a créé une aide spéciale aux familles monoparentales. Aussi, nous retiendrons plutôt le terme de «néo-natalisme» de N.

Martin-Papineau (1994) que celui de «familialisme» employé par Lenoir (1991:176) pour décrire cette période des années 1970.

Dans les paragraphes suivants, nous discuterons de la logique de l’API : du critère d’enfant à charge, du critère d’isolement, et des discussions relatives au rapport «aides publiques/du travail rémunéré» [l’API joue-t-elle un rôle de désincitation au travail professionnel ?].

L’API est définie par l’article L. 524-1 du Code de la sécurité sociale de la manière suivante : c’est une allocation destinée à toute personne isolée résidant en France, ayant seule la charge d’un ou plusieurs enfants. Les conditions d’application de l’API et du critère d’isolement117 varient selon les Caisses d’allocations familiales (CAF) (Commaille 1996 : 126). Le critère d’isolement dépend des pratiques locales et plus encore de la seule évaluation du contrôleur des CAF. Les règles internes et arbitraires ont pour effet de provoquer une

117 Deux critères relativisent l'application stricte de ce critère dans la pratique : premièrement, toutes les caisses n'appliquent pas de la même manière le critère d'isolement ; deuxièmement, ce critère concerne peu de situation réelle. En effet, les résultats de l'étude de Claude Martin cité par H. Mendras (1997 : 218) montre que 65% des parents gardiens n'ont pas de nouveau partenaire, et parmi les 35% qui entretiennent une nouvelle liaison cohabitent avec le nouveau partenaire (seulement 9% de l'échantillon). Ces données sont à relativiser par rapport à la durée écoulée depuis la séparation et l'âge de la femme : 45% des jeunes femmes de moins de 30 ans se remettent en ménage, seulement 5% après 45 ans.

gestion des situations selon des critères «de fait» et non pas selon des critères «relatifs à la situation personnelle» de l’allocataire (Commaille 1996 : 129). «L’isolement reste une question appréciée au cas par cas et se fonde plus sur la «mise en couple» que sur une éventuelle collaboration économique» (Sayn 1996 : 14). Les Caisses d’allocations familiales contrôlent «l’isolement» de l’allocataire car l’aide de l’Etat se limite à la situation de célibat.

En effet, on présuppose que le nouveau couple installera une solidarité économique et matérielle. L’Etat joue un rôle de subsidiarité par rapport à la solidarité du couple. Par-là, elle relève plus de la logique conjugale que de la logique parentale.

Néanmoins, le montant de l’allocation augmente en fonction du nombre d’enfants.

Cette majoration est une reconnaissance explicite de la fonction reproductive, puisque ce supplément s’adresse directement au parent dans une logique nataliste.

Une activité professionnelle n’est pas explicitement interdite, mais elle est limitée par le fait que l’allocation soit différentielle. On rappellera que l’API a été créée dans l’idée d’un salaire maternel et son pouvoir «décommodificateur»118 avait été explicitement recherché.

Mais, l’interdiction d’exercer un travail a été levé pour rendre possible un travail à temps partiel.

L’API est une alternative au marché du travail pendant au moins 12 mois. Mais elle a les effets pervers des allocations «décomodificatrices» : elle offre au bénéficiaire une alternative au marché du travail mais lui demande, après la durée de perception, de s’y réintégrer (Lewis 1993 : 20). Or les difficultés de réinsertion sont beaucoup plus grandes pour les femmes que pour les hommes, faisant des familles monoparentales un groupe vulnérable sur le marché du travail.

Même si l’API est conçue comme un revenu de remplacement, elle n’est qu’une phase hors du marché du travail (une transition). C’est un ««revenu de remplacement» mais ce n’est que pour permettre la transition et la recherche d’un emploi, pour éviter le pire [«le placement de l’enfant»] si les femmes ne pouvaient concilier les deux (Martin 1996 : 69).

Et c’est bien là où les opposants trouvent les arguments contre l’API, l’incitation au travail serait insuffisante. Ce sont les effets pervers dénoncés dans les années 1980119 (Le Gall

; Martin 1987 : 79-82) : des situations d’assistance se développeraient, encourageant ainsi les situations de fraude120.

«Une équipe d’économistes, dirigée par Jean-Claude Ray, a spécifiquement étudié cette question des effets de l’API (effets souhaités, affichés, mais aussi jugés indésirables ou pervers) en distinguant les objectifs explicites ou affichés et les objectifs implicites. Ainsi, par exemple, l’accroissement des revenus de certaines familles monoparentales ou la limitation des cas d’avortement sont des objectifs explicites [121]. En revanche, la volonté de limiter la progression du chômage en diminuant le nombre de demandes d’emploi non satisfaites est un objectif inavoué (et non pervers). Pour certaines des mères isolées, la désincitation au travail n’est pas redoutée mais souhaitée. Parmi les effets jugés indésirables, on trouve l’installation

118 Ce terme, traduit de l’allemand et de l’anglais, illustre l’idée selon laquelle l’incitation des politiques sociales

118 Ce terme, traduit de l’allemand et de l’anglais, illustre l’idée selon laquelle l’incitation des politiques sociales