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SECTION III.A L E PARTAGE DU TRAVAIL FAMILIAL EN F RANCE

III. A.2.2 Le temps parental et le temps professionnel

La montée du travail féminin dans les années 1970 et 1980, change le partage des tâches à l’intérieur du couple. Les années 1980 confirment l’inscription des femmes sur le marché du travail, d’abord à le temps partiel. M.-A. Barrère-Maurisson a mis en évidence l’évolution du partage du travail professionnel, depuis un modèle conjugal à un apporteur, vers un modèle à deux apporteurs, d’abord inégaux puis, depuis peu, équivalents (1992 : 207).

Cependant, le travail professionnel n’est pas partagé à égalité dans le couple, même si la norme de la double activité professionnelle à temps complet est maintenant majoritaire.

La répartition des tâches en deux catégories, le travail professionnel d’un côté (rémunéré) et le travail domestique et parental de l’autre (non-rémunéré), met en évidence le déséquilibre global dans le partage du «travail familial»174, du à la répartition inégalitaire du professionnel : ainsi, sur une journée théorique de 24 heures, les femmes font en moyenne 11h de travail dont : 4h20 de temps professionnel, 4h30 de temps domestique et 2h10 de temps parental ; il leur reste alors 13 heures pour le hors travail (moins de 4 heures pour le temps personnel et plus de 9 heures pour le temps physiologique). Les hommes, eux, effectuent

173 Cette constatation polarise l’impact des politiques publiques sur le partage du travail parental : premièrement, tous services, institutionnalisés ou non, qui agissent sur les transports, les facilités d’accès, la proximité des lieux, ainsi que sur les réseaux de communication, de même que les services liés à l’externalisation et la délégation du domestique, influencent la répartition du travail parental. Mais, leur action modifie le volume du travail, peu sa répartition entre les genres. Deuxièmement, une action qui agirait sur les activités de socialisation familiale (par une disponibilité en temps pour des activités conjointes), toucherait directement la logique de partage du travail parental, encourageant les pratiques masculines d’encadrement, d’éducation et de socialisation (et donc un partage plus égalitaire).

174 Nous rappellerons notre définition du «travail familial» qui décrit l’ensemble du travail négocié, travail parental, domestique et professionnel, au sein de la famille.

Tâches de

moins de 10h de travail dont : 6h30 de professionnel, 2h10 de domestique et 1h de parental, contre 14 heures de hors-travail (4 heures 30 de temps personnel et plus de 9h30 de temps physiologique) (Barrère-Maurisson ; Minni ; Rivier ; 2001).

Le temps consacré à l’activité professionnelle est directement lié au parental.

L’influence de la présence de jeunes enfants se fait réellement sentir à partir des naissances de rang deux, «lorsque les membres d’un couple exercent tous les deux une activité salariée, il faut au moins deux jeunes enfants (de moins de 6 ans) pour faire baisser la durée moyenne hebdomadaire du travail de la femme : cette diminution est alors d’une heure en moyenne ; elle est compensée par un allongement équivalent du travail du conjoint.» (Maurin : 96). On voit de grande différence entre les catégories socioprofessionnelles175. Cet effet de réduction de temps de travail est très visible pour les femmes cadres : elles avaient peu recours au temps partiel avant la naissance, contrairement aux autres catégories socioprofessionnelles qui travaillaient à temps partiel même sans enfant (les ouvrières ou les employées) (Fermanian ; Lagarde 1999).

Le parental influence également les mécanismes de partage du professionnel dans le couple. L’effet d’entraînement de la durée du travail professionnel de l’homme sur celle de la femme est maximal lorsque les enfants sont plus âgés (plus de 6 ans). Inversement, il est beaucoup plus faible lorsque les enfants sont plus jeunes. Il varie suivant les catégories socioprofessionnelles : si l’homme appartient à la même catégorie professionnelle que sa conjointe, sa durée hebdomadaire de travail enregistre une baisse (en présence d’au moins un enfant). Si la situation professionnelle est supérieure à celle de sa femme, son temps de travail s’allonge en présence d’enfant(s) (Fermanian ; Lagarde 1999)176. Par ailleurs, l’inactivité de la femme influence l’activité professionnelle de l’homme : la durée hebdomadaire de travail pour les cadres et les professions intermédiaires l’allonge, et ce, plus encore, en présence de jeunes enfants.

Par contre, les horaires de travail professionnel (et non de la durée) sont indépendants (Fermanian ; Lagarde 1999).

Le tableau 24 (ci-dessous) représente les parts respectives du temps parental et du temps professionnel en fonction du sexe et de la présence d’un partenaire. Le temps parental moyen (calculé sur l’ensemble des parents) représente un tiers du temps global (temps parental ajouté au temps professionnel). Cette proportion est légèrement plus importante pour les familles monoparentales, elle est la plus élevée pour les mères en couple, et elle est d’environ un cinquième pour les pères.

175 La répartition du travail domestique varie en fonction des catégories socioprofessionnelles. Les indépendants, les agriculteurs, et à moindre degré les ouvriers, participent le moins aux tâches ménagères. Par ailleurs, ce sont dans les milieux où les femmes se consacrent le plus aux tâches ménagères que les hommes y participent le moins. Par contre, un homme cadre participe aussi souvent qu’un employé mais se contente d’avantage d’une participation modeste (E. Maurin 1989 : 39). On retrouve une stratégie du «coup de main».

176 Ces variations de temps ne peuvent survenir que dans les professions qui offrent une certaine flexibilité d’horaire, comme les cadres et les professions intermédiaires (Fermanian ; Lagarde 1999).

Tableau 24 Répartition du temps professionnel et du temps parental, en %

Temps parental Temps professionnel Total

PARENTS 33,3 66,7 100

Dont pères 23,7 76,3 100

Dont mères 40,3 59,7 100

PARENTS EN COUPLE AVEC ENFANTS 33,9 66,1 100

Dont pères 23,9 76,1 100

Dont mères 40,7 59,3 100

PARENTS MONOPARENTAUX 34,6 65,4 100

Source : enquête MATISSE - DFT 1999

Le temps consacré au travail parental varie en fonction de l’activité professionnelle. Le tableau 25 montre que le parent a une activité professionnelle plus importante lorsque le temps parental se réduit. Mais il ne s’agit pas d’une simple disponibilité en temps qui se transfère d’une activité sur l’autre, car il varie de façon différente suivant le genre : les hommes actifs, à temps complet, effectuent 12h05 de temps parental en moyenne contre 20h15 pour les femmes dans la même situation.

Tableau 25 Temps parental selon l’activité professionnelle (en heures et minutes par semaine) (*)

Homme actif à temps complet 12h05 Femme active à temps complet 20h15 Femme active à temps partiel 23h20

Femme inactive 29h15

(*) Individus en couples

Source : enquête MATISSE-DFT-1999 (Barrère-Maurisson ; Marchand ; Rivier 2000)

Les femmes passent une demi-heure par jour (7 minutes pour leurs partenaires) pour réaliser le travail parental domestique (cf. Tableau 26 et 27). La charge éducative et affective des enfants, ce qui équivaut au temps parental scolaire et au temps parental de sociabilité, représente en moyenne 8 minutes par jour pour les mères et 6 minutes pour les pères (Brousse 1999 : 139).

Tableau 26 Temps parental moyen (soins et activités de sociabilité) en minutes par jour pour les personnes vivant en couple

Hommes Femmes

1986 1999 1986 1999

Soins aux enfants et aux adultes 6 7 34 28

Jeux, éducation des enfants 5 6 9 10

Source : Brousse (1999 : 139)

Tableau 27 Soins aux enfants et aux adultes en heures et en minutes par jour en 1986 et 1999

Femmes actives

Femmes au foyer

Hommes inactifs

Hommes actifs

«Emploi du temps» 1985-1986 24 32 5 9

«Emploi du temps» 1997- 1998 27 26 6 11

Sources : Dumontier 1999

Dans les couples à deux actifs, le nombre d’enfants est un facteur déterminant dans la répartition des tâches parentales et domestiques : la part de temps attribuée aux tâches domestiques dans les couples croît avec le nombre d’enfants. L’âge, et plus particulièrement la limite des 6 ans, est un autre facteur clef. Plus les enfants sont jeunes, plus la part de temps parental est importante. Or, plus la part de travail parental domestique est importante, plus le partage est inégalitaire : en effet, plus il y a d’enfants (et d’enfants jeunes), plus la participation masculine est faible.