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Évolution de la population

Fragmentation institutionnelle et coopération transfrontalière

3.1 Évolution de la population

Les dynamiques d’urbanisation sont très fortement différenciées selon les parties de l’agglomération. Elles résultent à la fois de tendances nationales spécifiques (Reitel, 2002) dans la région, mais aussi des reconfigurations spatiales propres aux

villes, avec durant les années  1970 un déclin des centres au profit des couronnes suburbaines et périurbaines, puis dès les années 2000, un retour en grâce des villes (Rérat, 2016a).

Bâle a connu son apogée en termes d’habitants pendant les années 1970, avec plus de 212  000  habitants. Après cette période, la ville a connu un fort déclin, perdant 30 000 habitants en dix ans, déclin qui s’observait encore durant les années 1990 (voir carte 4). En fait, c’est toute la partie centrale de Bâle (dont sa première couronne) qui a vu sa population diminuer. En revanche, les communes, alors plus rurales, situées à une quinzaine de kilomètres de la ville, au sud de Liestal ou dans la partie argovienne de l’agglomération, ont connu une croissance plus forte et soutenue (plus de 2 à 3 % par an).

Pendant la période 1982-1999, la partie allemande a vu une croissance de sa population, entre 0,5 % et 1 %, dans quasiment l’ensemble des communes de l’agglomération, grâce à la réunification allemande et à l’arrivée, entre autres, d’Allemands de l’Est ou d’autres migrants en provenance des pays de l’Est (Reitel, 2002). Dans les communes les plus « urbaines » de Weil am Rhein ou de Grenzach-Wyhlen, cette croissance a été moins forte néanmoins. Bien qu’elles existent, les dynamiques de périurbanisation s’observent moins qu’à Bâle. Dans les villes de Weil am Rhein ou de Lörrach, très étendues spatialement, se trouvent aussi, à côté des centres urbains, de grandes zones périurbaines et d’anciens villages.

Durant cette période (1982-1999), c’est dans la partie française que la croissance de la population a été la plus marquée. Si les communes urbaines de Saint-Louis ou de Huningue avaient connu durant les décennies précédentes une croissance plus forte – les nombreux logements collectifs ou « cités » témoignent de cette croissance démographique  –, celle-ci est dorénavant portée par les communes périurbaines.

Dès les années 1970, le Sud du Bas-Rhin connaît une forte périurbanisation (Reitel, 2002). Cette période correspond à une forte augmentation du nombre de frontaliers en provenance de France : entre 1980 à 1990, ils passent de 14  000 à 31  000. Le développement de l’habitat individuel et de l’étalement urbain est également favorisé par les revenus plus élevés des frontaliers (voir chapitre IV, section 3 et chapitre IX, section 4.1).

Durant les années 2000, les dynamiques d’évolution de la population ont changé considérablement (voir carte  5). Tout d’abord, la baisse constante de la population dans le centre de l’agglomération (à Bâle et dans les communes environnantes) a été stoppée, et la courbe s’est inversée entre 2010 et 2015, ce qui correspond à une tendance générale au retour en grâce des centres urbains (Rérat, 2016a). L’emprise spatiale de la ville de Bâle s’étendant quasiment sur l’ensemble du territoire communal, les projets urbains visent à densifier et à valoriser le bâti existant : le nouveau siège de Roche est par exemple le bâtiment le plus haut de Suisse. Un concept de densification en hauteur existe d’ailleurs au niveau cantonal, et de nombreuses tours sont en projet et/ou en cours de construction par différents acteurs économiques (Novartis,

Schopfheim

OFS ; INSEE ; Statistiches Landesamt Baden-Württemberg ; Autorisations frontalières ; ETB; Swisstopo

Carte  4 : Évolution de la population dans l’agglomération transfrontalière de Bâle (années 1980-1990-2000)

Schopfheim

OFS ; INSEE ; Statistiches Landesamt Baden-Württemberg ; Autorisations frontalières ; ETB; Swisstopo

Carte 5 : Évolution de la population dans l’agglomération transfrontalière de Bâle (années 2000-2010)

UBS, CFF, Bâloise assurances, etc.)37, même si deux projets de densification dans le quartier de Bruderholz et dans celui de Hirzbrunnen (le long du Rhin) ont été refusés par la population bâloise. Cet attrait retrouvé pour l’urbain concerne également les communes suburbaines, dont certaines plus fortement que d’autres, par exemple dans la zone d’Oberwil-Therwil. L’Est de l’agglomération, dans la partie argovienne, se caractérise par une forte croissance démographique continue.

Au cours des années  2000, l’augmentation de la population dans la partie allemande de l’agglomération est faible, notamment dans les grandes communes.

Si certaines petites communes, au nord de Weil am Rhein et Lörrach, voient leur population augmenter (Binzen, Schallbach, etc.), d’autres perdent des habitants comme à Grenzach, Steinen ou encore dans les communes périphériques proches de la Forêt-Noire. Dans l’ensemble, la population de la partie allemande de l’agglomération bâloise reste plutôt stable, ce qui la distingue des deux autres parties dont la croissance est plus forte.

La partie française a constaté, pendant les années  2000, une forte augmentation de sa population. Sierentz et Bartenheim, situées le long de l’axe Bâle-Mulhouse, de même que les communes à proximité de la frontière à l’ouest de Saint-Louis (Hésingue ou Hégenheim) connaissent une augmentation de plus de 1,5 % annuellement durant cette période. En revanche, le Sundgau, moins urbanisé et plus périphérique, observe une stabilisation de sa population, voire une diminution. De même, Saint-Louis, qui est pourtant à proximité directe de la frontière, perd des habitants durant cette période (et la précédente d’ailleurs). Comme nous le verrons dans les chapitres suivants, la ville haut-rhinoise a plutôt une mauvaise image, et les habitants de la région privilégient des communes plus rurales à proximité.

À côté de l’évolution de la population, les prix du foncier permettent de mieux comprendre les tendances d’urbanisation dans la région (voir tableau 438). Tout d’abord, les prix français sont clairement les plus bas, suivis des prix allemands et finalement des prix suisses, bien plus élevés. À l’intérieur de chaque pays, des différences s’observent également. En France, les petites communes frontalières à proximité de Bâle font partie des plus chères, avec Leymen (sur la ligne de tram) ou Hégenheim. Saint-Louis est sensiblement moins chère, ce qui renvoie à son attractivité plus faible, mais aussi à la part plus importante d’appartements. Les communes qui se situent au-delà d’une vingtaine de kilomètres de Bâle présentent des prix bien moins élevés, comme à Ferrette dans le Sundgau ou encore à Mulhouse. Dans la partie allemande, les villes de Lörrach

37 Monnat Lucie, 24 heures, 11.12.2014, Bâle prise par la folie des hauteurs, http://www.24heures.ch/

suisse/Ble-prise-par-la-folie-des-hauteurs/story/14091924, consulté le 14.02.2017.

38 Les prix de l’immobilier à l’achat indiqués dans le tableau 4 sont avant tout indicatifs et doivent être interprétés avec prudence, car, ne faisant pas l’objet d’un recensement officiel, les données utilisées proviennent de divers spécialistes de l’immobilier (diversité des données et des techniques [non connues] de calcul, temporalités de récolte, etc.). Pour la Suisse, il s’agit de maisons individuelles (prix au m2 en francs suisses), et en France et en Allemagne, d’une agrégation de maisons et d’appartements (prix au m2 en euros).

et de Weil am Rhein font partie des plus chères de la région, de même que la commune, plus petite, de Fischingen, suivies des deux autres villes de la région, Rheinfelden et Bad Säckingen, et d’une série de petites communes à proximité de Bâle (Binzen, Rümmingen, Schallbach, etc.). Ensuite, dès que l’on s’éloigne du cœur de l’agglomération, les prix baissent. Contrairement au Haut-Rhin, d’autres communes du Sud du Bade-Wurtemberg (dans l’agglomération de Fribourg-en-Brisgau notamment) présentent des prix plus élevés (ou similaires) que ceux des communes de l’agglomération transfrontalière. La spécificité « frontalière » est ainsi moins marquée en Allemagne. Dans la partie suisse, c’est à Binningen, dont le tissu urbain est complètement intégré à celui de Bâle, puis dans le chef-lieu bâlois que les prix sont les plus élevés. Les autres communes principales de l’agglomération ont des prix similaires, autour de 10 000-11 000 francs au mètrecarré.

Quant à Pratteln et Bettingen, elles se révèlent être un peu moins chères. À l’intérieur de Bâle, les prix varient bien évidemment selon les quartiers. Saint-Johann et les quartiers situés dans l’ouest du Kleinbasel (Kleinhüningen, Klybeck, etc.), les plus précarisés, sont les moins chers. Au contraire, les biens situés sur la colline du Bruderholz ou dans la zone Breite/Saint-Alban sont les plus chers.

Tableau 4 : Estimation des prix de l’immobilier (achat) dans une série de communes de l’agglomération transfrontalière

Lörrach +3 500 Leymen 2 461 Binningen 14 097 Innenstadt 7 270

Weil am

Rhein +3 500 Hégenheim 2 425 Bâle 11 694 Breite/

Saint-Alban 8 950 Fischingen +3 500

Village-Neuf 2 412 Riehen 11 403 Gundeldgine 7 190

Rheinfelden 3 000-3 500 Sierentz 2 406 Reinach 10 718 Bachletten/

Gotthelf 7 040

Bad

Säckingen 3 000-3 500 Huningue 2 322 Allschwil 10 540 Iselin 6 640

Binzen, Rümmingen, Wittlingen, Schallbach

3 000-3 500 Saint-Louis 2 187 Muttenz 10 339 Saint-Johann 6 290

Steinen 2 500-3 500 Bartenheim 2 113 Pratteln 8 710 Kleinbasel

West 6 360

Schopfheim 2 500-3 000 Ferrette 1 598 Bettingen 8 315 Kleinbasel

Ost 7 420

Kandern 2 500-3 000 Mulhouse 1 186 Bruderholz 9 350

Provenance des données : Allemagne : Immowelt.de (2016) ; France : Moyenne des estimations de meilleursagents.fr et de efficity.fr (2016) ; Suisse : Wüest et Partner (2012).

Économie

A

u niveau économique, l’agglomération trinationale bâloise compte environ 410  000  emplois dans les secteurs secondaire et tertiaire39, dont plus de 170  000 sont localisés à Bâle. La partie française (surtout) et la partie allemande accueillent clairement moins d’emplois, respectivement 18 000 et 60 050.

La partie française de l’agglomération se trouve en effet dans les aires d’emploi de Bâle et de Mulhouse et est largement résidentielle. En Allemagne, ce constat est moins marqué, même si Bâle (surtout) et Fribourg-en-Brisgau attirent une partie des travailleurs résidant dans l’agglomération. La partie suisse (hors Bâle) compte un peu moins d’emplois que Bâle, malgré son poids démographique plus élevé.

Le chômage (en 2015) est moins élevé dans la partie suisse (3,7 % à Bâle-Ville et 2,7 % Bâle-Campagne) et dans la partie allemande (environ 3,5 % dans le Landkreis de Lörrach) que dans la partie française (près de 8 % dans la zone d’emplois de Saint-Louis)40.

Toute la région est marquée par une forte présence industrielle, notamment dans les branches chimiques et pharmaceutiques. Bien que les plus grands sites et les sièges de ces entreprises soient concentrés en premier lieu à Bâle, comme le campus Novartis ou la nouvelle tour Roche, de nombreux sites de production se trouvent autour de la ville (Stein, Kaiseraugst), y compris en France à proximité immédiate

39 Ces éléments et les suivants sont issus de l’analyse des recensements économiques des trois pays et sont complétés par d’autres sources (publications, rapports, etc.) : il s’agit des données SIRENE en France, du RFE en Suisse et de données directement fournies par le Land du Bade-Wurtemberg en Allemagne.

Notons encore que les données pour l’Allemagne n’étant pas disponibles au niveau de la commune pour le secteur primaire (agriculture, foresterie, etc.), nous n’avons pas pris en compte ce secteur dans les trois pays. Ainsi, nos analyses sont basées uniquement sur les secteurs secondaire et tertiaire (hors emploi dans l’administration – également non disponibles en Allemagne par commune).

40 Sources : SECO, Statistique du Land du Bade-Wurtemberg, Agence de développement d’Alsace (ADIRA).

de la Suisse. L’industrie textile (France et Allemagne), automobile (France, avec l’usine PSA Peugeot-Citröen dans la banlieue mulhousienne) et horlogère (principalement en Suisse, dans le Jura), de même que les branches proches telles que la microtechnique/micromécanique sont également fortement présentes dans la région. Le Sud de l’Allemagne, comme la Suisse d’ailleurs, est également réputé pour ses nombreuses PME (Bourgeois, 2005). On y trouve également de grandes entreprises, comme la marque de meubles Vitra –  avec son centre d’exposition, musée, etc., réalisé par les plus grands architectes – à Weil am Rhein ou la fabrique de Mondelez International à Lörrach qui possède et produit de nombreuses marques de chocolat connues.

Malgré ce fort ancrage historique de l’industrie, l’économie de la région est largement tournée vers le secteur tertiaire, qu’il s’agisse du secteur du commerce et de l’hôtellerie/restauration, des finances et des assurances (Bâle surtout), des activités scientifiques et techniques (Bâle et Fribourg-en-Brisgau principalement) ou encore de l’administration publique et de l’enseignement. Au croisement des secteurs secondaires et tertiaires, les trois pays forment dans la région un « cluster » économique lié aux sciences de la vie (avec la ville/région de Strasbourg également) et se targuent de disposer, entre autres, de la présence de 15  000  scientifiques, 100 000 étudiants et 600 entreprises pharmaceutiques et de technologies médicales dans la région41. Ainsi, Bâle accueille le plus grand nombre d’employés dans les sciences de la vie et présente le ratio (investissement en R & D)/(Produit régional brut) le plus élevé du monde (étude BAK, 2010, citée dans Walther et Reitel, 2013). La ville de Bâle est également connue pour ses foires, dont les plus célèbres sont Baselworld (horlogerie) et Art Basel (arts). Dans le Kleinbasel, la zone de la

« Messe » occupe plusieurs bâtiments servant aux expositions ainsi qu’un hôtel et une salle de spectacles.

En termes d’emploi (voir carte 6), la commune de Bâle est de loin celle qui regroupe le plus grand nombre d’emplois, à savoir plus de 170  000. Plusieurs communes de l’agglomération bâloise (partie suisse) comptent également plus de 10 000 emplois, comme Liestal (avec près d’un emploi par habitant, comme à Bâle), mais aussi Pratteln, Muttenz, Reinach ou Münchenstein. Pour ces dernières, le ratio emploi par habitant est également élevé, entre 0,6 et 0,8  emploi par habitant. Dans la région, c’est à Stein, qui se trouve juste au-delà des limites de l’agglomération statistique, que le ratio emploi par habitant est le plus élevé, à 1,06 : la commune, petite en termes d’habitants, accueille sur son territoire des sites de production de grandes entreprises, comme Novartis ou Syngenta. Au-delà des limites de l’agglomération, le Plateau suisse offre également un grand nombre d’emplois, notamment dans les villes de Granges, de Soleure, d’Olten, d’Aarau, de Baden.

41 Biovalley, The Life Sciences : http://www.biovalley.com/industry/biovalley-the-place-to-be, consulté le 06.04.2017.

Schopfheim

OFS 2011-2012; INSEE 2011; STATISTICHES LANDESAMT BADEN-WÜRTTEMBERG 2011-2012; ETB; Swisstopo

Carte 6 : Ratio emploi-habitant dans l’agglomération transfrontalière de Bâle

Le deuxième pôle d’emplois le plus important est celui de Fribourg-en-Brisgau en Allemagne, avec un peu plus de 100 000 emplois, sans compter ceux situés dans son agglomération. Dans la partie allemande de l’agglomération bâloise, c’est Lörrach qui compte le plus d’emplois (18 000), suivie par Weil am Rhein (près de 10 000 emplois) et Rheinfelden (8  800). Dans les deux premières, on trouve de grandes entreprises, comme Vitra ou Mondelez International. Les communes allemandes de la région présentent des ratios emploi par habitant plus faibles qui se situent autour de 0,3-0,4.

Binzen, qui accueille une grande zone commerciale, et Maulburg, qui compte plusieurs industries importantes, comme Busch (pompes à vide industrielles), Müller Martini (systèmes d’impression) ou Endress +  Hauser Maulburg (instruments de mesure), connaissent des concentrations d’emplois un peu plus élevées.

En France, Mulhouse et Sausheim (où se trouve l’usine Peugeot-Citroën), dans l’agglomération mulhousienne, forment le plus grand pôle d’emplois du Bas-Rhin (55  000), suivi de Colmar (environ 32  000). En revanche, la partie française de l’agglomération présente un visage économique bien différent des parties suisse (surtout) et allemande. On y compte relativement peu d’emplois. Saint-Louis, la plus grande commune de la zone, compte « seulement » 6 781 emplois, avec un ratio emploi par habitant de 0,34. Plus petite, Huningue, limitrophe de Bâle et de Saint-Louis, est un centre d’emplois relativement important de la région frontalière française avec 2  681  emplois, avec les usines de Novartis ou de Weleda (produits de soin) et de nombreuses infrastructures industrielles le long du Rhin. Cette zone industrielle se prolonge en direction de Village-Neuf (991  emplois), où se trouve l’usine DSM, active dans les biotechnologies. Un autre centre d’emplois est constitué par la commune de Hésingue, avec un peu moins de 1 500 emplois et un ratio emploi par habitant de 0,58 (le plus élevé de la partie française de l’agglomération). La commune de Sierentz fait également partie des cinq communes qui offrent les emplois les plus nombreux, avec entre autres une activité commerciale relativement importante. Le développement économique est principalement localisé autour de Saint-Louis, ainsi que le long de l’axe, routier et ferroviaire, Bâle-Mulhouse : le reste de la partie française de l’agglomération trinationale est surtout rural. Notons également la présence de l’Euroairport et des entreprises attenantes, géographiquement situés sur sol français et qui offrent de nombreux emplois. Selon un rapport, près de 5  000  emplois sont directement liés à l’Euroairport et aux entreprises qui y sont implantées : parmi ceux-ci, 86 % relèvent d’entreprises suisses présentes sur le site, le reste, d’entreprises françaises42.