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> Rapport forestier 2015 État et utilisation de la forêt suisse OFEV / WSL 2015
3.1 Exploitation du bois et accroissement
Christoph Fischer, Paolo Camin
> Le volume de bois sur pied dans la forêt suisse augmente, puisque l’accroissement net dépasse la quantité de bois exploitée annuellement.
> L’accroissement du bois en Suisse est en moyenne de huit millions de mètres cubes par an. L’épicéa et le hêtre y contribuent pour plus de la moitié.
> En Suisse, l’exploitation des résineux est trois fois plus importante que celle des feuillus.
> Sur le Plateau, l’exploitation des épicéas est forte et dépasse l’accroissement net. Elle est par contre plus faible dans les Alpes et les Préalpes, où elle est inférieure à l’accroissement net.
Exploitation et accroissement
L’exploitation du bois dans la forêt suisse a augmenté au cours des 30 dernières années : elle était de 5,4 millions de mètres cubes par an entre les Inventaires forestiers nationaux (IFN) 1983/85 et 1993/95 (Brassel und Brändli 1999) ; aujourd’hui (IFN 1993/95 jusqu’à IFN 2009/13), elle atteint 7,3 millions de mètres cubes par an. Les différences régionales sont cepen- dant marquées : la forêt est la plus fortement exploitée sur le Plateau (fig. 3.1.1), nettement moins dans le Jura, les Préalpes et les Alpes et encore moins au Sud des Alpes. La part du bois de résineux exploité est presque trois fois supérieure à celle du bois de feuillus (fig. 3.1.2).
Les IFN effectués entre 1993/95 et 2009/1 montrent que l’accroissement du bois est resté à peu près constant. Il convient de faire ici la distinction entre l’accroissement brut et l’accroissement net : le premier mesure aussi bien l’accrois- sement des arbres vivants que celui des arbres morts, alors que le second mesure seulement l’accroissement des arbres vivants. L’accroissement brut en Suisse est de 9,9 millions de mètres cubes de bois par an, ce qui correspond à 9 mètres cubes par hectare et par an (m3/ha/an). Ce chiffre place la Suisse en tête des pays européens (Forest Europe et al. 2011).
L’accroissement net est déterminant pour le développement du volume sur pied et représente une valeur importante pour la comparaison avec l’exploitation. En Suisse, l’accroissement annuel net moyen s’élève à 8,1 millions de mètres cubes, soit 7,4 m3/ha/an.
Les différences régionales sont considérables. L’accrois- sement net est le plus élevé sur le Plateau, où se trouvent des sols riches en éléments nutritifs (fig. 3.1.1). Dans le Jura et les Préalpes, les valeurs sont proches de la moyenne suisse. L’ac- croissement annuel net est en revanche beaucoup plus faible dans les Alpes et au Sud des Alpes que dans les autres régions.
Les résineux contribuent presque deux fois plus que les feuil- lus à l’accroissement annuel net (respectivement 4,9 m3/ha et 2,4 m3/ha). Deux essences seulement comptent pour plus de la moitié de l’accroissement annuel net : l’épicéa (3,1 m3/ha) et le hêtre (1,4 m3/ha ; Brändli et al. 2015).
L’exploitation comparée à l’accroissement
La comparaison entre l’accroissement et l’exploitation du bois est un indicateur important pour évaluer la gestion durable des forêts. L’économie forestière est durable lorsque l’équi- libre entre l’exploitation et l’accroissement se maintient à long terme.
Fig. 3.1.1 Exploitation et accroissement net du bois entre 1993 et 2013 dans les cinq régions de production de Suisse.
Source : IFN
Exploitation (m3/ha/an) 7,5 7,3
7,3 8,6
2,7 5,1
1,0 4,2 13,8 11,5
Accroissement net (m3/ha/an)
Suisse : Exploitation 6,6 m3/ha/an ; accroissement net 7,4 m3/ha/an
> 3 Exploitation 3.1 Exploitation du bois et accroissement 61
Dans la forêt suisse, l’accroissement annuel net de 7,4 m3/ha dépasse la quantité annuelle de bois exploité qui est de 6,6 m3/ha. L’économie forestière n’exploite donc pas complè- tement l’accroissement annuel net et le volume sur pied aug- mente (point 1.2). Cela est notamment dû au fait qu’il est dif- ficile d’accéder aux ressources de bois dans certaines régions.
La desserte forestière est ainsi peu développée dans les régions de montagne, ce qui fait que les coûts de récolte du bois y sont élevés. Les structures d’exploitation de petites dimen- sions, les faibles prix du bois, les attentes de la société envers la forêt et les restrictions écologiques telles que les réserves, la promotion de la biodiversité et la protection des paysages, sont d’autres facteurs importants qui font que le potentiel de l’accroissement du bois n’est pas partout mis à profit. Les dif- férences régionales sont ici aussi notables : sur le Plateau, l’ac- croissement net est exploité à 122,6 %, alors qu’il ne l’est qu’à 20,4 % au Sud des Alpes. Il existe aussi des différences selon les essences : l’exploitation annuelle de l’épicéa sur le Plateau dépasse de 3,2 m3/ha son accroissement, ce qui entraîne une diminution du volume de l’épicéa dans cette partie du pays (point 1.2).
La Suisse possède un volume sur pied élevé en compa- raison aux autres pays européens (point 1.2). À l’échelle régio- nale, l’exploitation peut dépasser l’accroissement net durant une brève période sans mettre en danger la durabilité de la forêt. Une étude sur le potentiel d’exploitation du bois en Suisse (Hofer et al. 2011) a calculé plusieurs scénarios d’ex- ploitation pour la période 2016 à 2026 et leurs conséquences pour la gestion forestière. Elle montre qu’il est possible de récolter entre 7,5 et 9 millions de mètres cubes de bois par
an sans mettre en danger la durabilité de la forêt ; l’exploi- tation peut même être temporairement augmentée jusqu’à 10 millions de mètres cubes par an (ces chiffres ne sont pas directement comparables avec les résultats de l’IFN). La Poli- tique forestière de la Confédération s’est donné comme objec- tif d’accroître l’exploitation du bois à 8,2 millions de mètres cubes par an d’ici à 2020.
Fig. 3.1.2 Exploitation du bois en Suisse selon les essences principales. Source : IFN 2009/13
0 500 1000 1500 2000 2500 3000 4000
Exploitation (1000 m3/an)
Épicéa
Sapin blanc Pin Mélèze
Arole Autres résineux
Hêtre Érable
Frêne Chêne
Châtaignier Autres feuillus