en a le
droit
; suivantlui,
l'émancipation de Neuchâtel peut seule mettre un terme au mécontentement général.Il
insistesur la franchise de ses opinions : «
Etre
Mm'gitemewZ suisse ouc/èfircAer «nemtirepatrie,
voilà plus quejamais ma devise.»Les derniers mots de la défense ont le même cachet de noble fierté : « Au reste, Messieurs,
je
le répète,je
necher-che à émouvoir ni dans les juges, ni dans l'audience, cette sympathie, cette bienveillance si nécessaires à
tout
prévenu.J'ai
mes opinions eiies sont d moi,je
Zes partie;
j'en
accepte tontes Zes cons^uences, çneZZes gne soient Zes suitesgu'eZZespuissent entrafner. » —
Le
verdict dutribunal fut
de suite rendu. Gaullieur et M. G.Petitpierre
furent condamnésà l'amende et à la prison.
A
la même époque, fin de 1831, appartient un pamphlet deGaullieur que nous ne pouvons passer sous silence, malgré et peut-être vu son caractère personnel. Chaqueparti
ren-ferme de ces hommes, dontrien
n'égale l'exaltation de la veille sinonleservilismedu lendemain ; tempéraments ardents à la surface,pliant
suivant les circonstances, protées de con-trebande, poursuivant leurs amisd'hier
des attaques furieuses dont leurs amisd'aujourd'hui
étaient naguèresl'objet.
Les patriotes neuchâtelois comptèrent aussi dans leurs rangs desiPlaidoyer prononcépar ffenri-BusèJe Gaiill/ewr, par devant la cour de jwsiicede iVencftdiei, le vendredi, 2 décembre 1331,dans le procès powrdélit
de presse à Ini intentépar legouvernement. Neuchâtel. 1851. br. in-8° de 20pages.
— —
caméléons de cette espèce.
L'un
entre autres se distinguait par ses brusques volte-face.Gaullieur publia à son adresse Le
ilfaftre
Jdc</«es neucM-telois;
c'est peut-être un des plus virulents et desplus spiri-tuels pamphlets de l'époque.Voici
lafin
de celte curieuse brochure :i
Les grenouilles unjour
se lassant de l'étatdé-» mocratique, demandèrent un
roi
à Jupiter qui leur envoya» une solive ; les grenouilles charmées d'abord de leur
nou-» veau
roi, finirent
par le trouver trop bonace ; elles crièrent» de nouveau, et Jupin leur envoya une grue qui les croqua
» à discrétion. — Sens moral. Les Neuchâtelois se lassèrent
» de
l'état
monarchique ; sans consulter leroi-maitre, ils
» voulurent faire une révolution et
précipiter
leurwce-roi.
» Or, ce
vice-roi
nommé gouvernement,s'il
ne faisait pas> grand
bien,
ne songeaitpoint
à mal et n'en faisait àper-» sonne.
Il
tombade lui-même et sans se défendre beaucoup.» Mais le maître indigné
retira
àlui
le soliveau. Gare la» grue
!»
*Tel
se présenteà nousHenri
Gaullieur durant la crise neu-cbâteloise de 1831. L'orage qui grondait sur la tête des pa-triotes, allait frapper tant de victimes innocentes, tuer le docteur Petitpierre dans sa prison et atteindre si cruellement Rœssinger et l'avocatBille,
ne l'effrayaitpoint. Il
avaitdit
àses juges : o Je suis venu tranquillement à la barre de
votre
»
tribunal,
tranquillementaussije
me constituerai prisonnier,» si vous me condamnez.
Il
faut montrer que l'on n'est pas» un
brouillon
et que, Zorsgît'on entreprend «ne cAose, «ne» </«erre de pîume swrtowf, on sait ce gw'on
/dit
et ô gwoi i'ow» s'expose, »
il tint
parole. Enveloppé dans laproscription
royaliste de 1831, le jeune patriote seretira
d'abord à Lau-'Ze Maître ZacguesiVeacîiâteîofs ou du danger dese mettre au-dessus des lois; Zepon de Zogigueet demoraîe, à /'usage desc/ianceîiers, des conse/tters d'état, desmaires, des capitaines demiiice, des députés au corps Zégisiati/', des awocats, desjournaZistes, <fe., autrement dità Z'usage desgrands etdes petits,par Zf.-ß. CauZZieur. Neuchûtel 1831, br. in-8°.Sanne, prêt à servir la cause de son pays sur une terre
libre,
à l'ombre du drapeau fédéral.
Ici
commence dans la vie de Gaullieur une ère nouvelle.Cette période liée, intimement à la question neuchâteloise, nous appartient cependant, elle regarde plus spécialement le Jura bernois.
Le régime aristocratique avait été renversé dans les can-tons suisses et en première ligne, à Berne. Un des citoyens qui avait le plus contribué à cette révolution, homme de tête et d'action comme
il
en avait manqué un à Neucbâtelpour
triompher,M. X.
Stockmar, avait été nommé préfet de Por-rentruy.Dès son entrée en charge,lei "janvier
1832, ilsongeaàréaliserun desesprojets qui lui tenaientleplus à cœur, doter lepays d'unbonetgrand
journal
quotidien. On en manquait en Suisse, et d'accord avec un réfugié français, M. Sambuc, les Neuchâtelois songeaient à enétablir
un à Lausanne, sous letitre
delà TW'èwtie. M. Stockmar semit
enrapport
avec eux, ainsi qu'avec les libéraux de la Suisse française. L'idée de fonder une feuille dans le canton de Vaudfut
abandonnée, et après être venu àPorrentruy
pour se concerter avec le chef des patriotes jurassiens, Gaullieur accepta lesoffres qui luifu-rent
faites;l'fMüitie
était créée. Cejournal
parut le1"
juil-let
1832 ; M. Stockmar en avait écrit le programme signé du nom de son rédacteur,E.-H.
Gaullieur.L'apparition
du1"
numéro fut un événement à
Porrentruy;
les jeunes gens, nousdit
un témoin oculaire encombraientl'atelier
et le bu-reau pourplier
les feuilles, mettre les adresses faire les pa-quets et les expédier ; chacun voulait rendre des services etl'un
des plus zélés, appelé àjouer
plus tard un rôle impor-tant dans le canton de Vaudfut
le jeuueEytel,
alors chezson oncle, maître d'hôtel en cette ville. La sensation ne
fut
pas moins grande en Suisse, dès qu'eurent paru les premiers numéros.
L'Ifefeéh'« se publiait deux fois la semaine. Gaullieur
fut
d'abord chargé seul de la rédaction. Le dépouillement desjournaux,
les nouvelles suisses et étrangères absorbaient la— —
majeure partie deson temps ;
s'il
nepouvait rédiger beaucoup d'articles defond, il
avait pour le seconder puissamment, M. Stockmar, qui écrivait dans presque toutes les feuilles, M. Marchand professeur àZurich,
se chargeait hénévole-ment des traductions. Une collaboration nombreuse et choisie ajouta, dès les premiersjours, de la valeur aujournal
brun-:trutain
; les cantons allemands eux-mêmes fournissaient sou-:vent leur contingent. Citons parmi ces correspondants, pour le canton de Vaud : Druey, Monnard, Pellis, Leresche,
Sam-bue;
pour Genève: JamesFazy,
Fazy pasteur et même Petit-Senn, dont les vers charmants illustraient le feuilleton ; pourFribourg
: Scballer, Bussard, Kuenlin ;pour
le Valais : Barmann ; pour le Jura bernois et Berne : le doyen Morel, Vautrey (les premières années), Aubry, Denis-Joseph Helg et exceptionnellement, quoique s'intéressant aujournal,
l'avoyer Neuhaus. Les correspondantsneuchâtelois abondaient surtout.L'/Jefoétfe était pour eux une tribune d'où leur voix proscrite disait la vérité aux oppresseurs et relevait le courage des op-primés. L'auteur des FragmentstieucMfetoî's, Ulysse Guinand, se distinguait parmi ces courageux publicistes.
L'JfeZuéffe, organedulibéralisme neuchâtelois, ne tarda pas à encourir les rigueurs du pouvoir prussien. Parler liberté en faveur de Neuchâtel, en dehors même de la principauté,
était
un crime. Le 23août,
lejournal publiait
un article de Gui-nand oùil
discutait les droits delà maison deBrandebourg et disait avec raison : « La sentence de 1707 est une déception» et une déception d'autant plus cruelle qu'elle a lié pour
» longtemps les destinées d'un peuple. C'est une vraie esco-.
» barderie. On nous a escamotés, nous Neuchâtelois, comme
t
on auraitfait
une muscade et c'est là-dessus que sefon-» dent les droits dela maison de Brandebourg
Et
la liberté,»l'existence
d'une nation seraient sujettes àprescription!
» Non, non
il
sera toujours temps et nous serons toujours» en
droit
de réclamer contre celte sentence inique. Unpeu-» pie ne
périt
point, parcequ'il
a plu à douze juges vendus» de trafiquer de son existence. » —
L'effet
de cet article nese
fit
paslongtemps attendre : le gouvernement deNeuchâ-tel
décréta de prise de corps Guinand et Gaullieur, comme prévenus du crime de haute trahison.C'est le cas de parler d'Henri Gaullieur en tant que
jour-naliste. Dans les premiers temps son style n'était pas formé ;il
écrivaitpeu d'articlessaillans ; samanièreétait rude, sacca-dée ; point dephrases insignifiantes, de remplissage ;il
n'étaitpas élégant, mais souvent
il frappait fort
etl'on
disait : a Gaullieur a donné aujourd'hui un deses coups deboutoir.
» Peu àpeu son style se forma, ses phrases sepolirent,
s'en-chaînèrent mieux. Bref, d'aprèsunjuge compétent,il
estde-venu écrivain à l'école de l'IZefoétie,
il
nel'était
pas eny
arri-vant. Sanstravailler
beaucoup en dehors de sonjournal,
Gaul-lieur
se distinguait déjà par son penchant pour les recherches historiques, son amour pourlabibliographie ;il
faisait preuved'érudition
et de connaissances variées.Il y
avaitenlui
l'étoffede l'homme de lettres, qui plus tard devait doterla Suisse de travaux justement estimés.
Insensiblement le personnel de l'Jïetoétfe se compléta. En 1834
il
ne laissait rien à désirer ; lejournal
avait toutpour obtenir
un légitime succès. M. Choffat soignaitla partieadmi-nistrative
et organisait une société d'actionnaires ;M.
Péqui-gnotétait
attaché à la feuille comme traducteur et son talent d'écrivain relevait la partielittéraire
; son stylepoli,
élégant, correct contrastait avec celui de Gaullieur, rude, nerveux,assez peu soucieux de la forme.
M.
Gonzalve Pelitpiereprit
aussi part à la rédaction et par son précieux concours augr menta la valeur de 17/efoétte. C'est l'époque
brillante
de notre presse libérale ; si ellefût
restée en de telles mains,Porren-truy
et le Jura auraient encore un organe de premier ordre.De 1832 à 1836 se
firent
à Porrentruy des créations im-portantes, notamment la première réorganisation du collège, la création du cabinet de minéralogie. Gaullieur applaudis-sait aux progrès del'instruction
publique dans nos contrées;il
aimait àtraiter
les questions pédagogiques ; ses vues en pareille matière étaient judicieuses. Homme essentiellementI