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Importants déficits dans d’autres grandes expositions

Le rapport Moll propose une comparaison entre Expo.01/02 et d’autres grandes expositions à l’étranger (les principaux critères de comparaison sont exposés à l’annexe 0). Les trois expositions prises comme base de comparaison sont les suivantes : l’exposition universelle de Hanovre en 2000, le dôme du millénaire à Londres en 2000 et l’EXPO’92 à Séville. Expo.01/02 est la seule à avoir été organisée de manière décentralisée (quatre sites) et complètement démontée à son terme. Bien que les quatre expositions diffèrent parfois profondément dans leur conception, leur durée et leur contenu (ainsi que sous l’angle des données disponibles), il est possible de formuler quelques considérations générales.

Dans les quatre cas, il était prévu de financer majoritairement ou intégralement l’exposition par des fonds privés ; l’objectif n’a été atteint nulle part. Expo.01/02 est la seule a avoir réussi à opérer une distinction entre un budget interne et un budget externe.

A chaque fois, l’exposition a donné lieu à des dépassements de dépenses par rapport aux plans initiaux et une part importante des recettes escomptées n’a pas été réalisée.

Les quatre expositions ont entraîné des déficits considérables, qui ont dû être épongés par l’Etat, donc les contribuables. Il est intéressant de relever que, dans le cas de l’exposition uni-verselle de Hanovre en 2000 – contrairement à Expo.01/02 –, la couverture du déficit a été par-tagée entre l’Etat fédéral et le Land de Basse-Saxe.

Dans les quatre cas, l’Etat a assumé un rôle important dans l’organisation et la responsabilité de l’exposition.

Le budget prévisionnel de la billetterie n’a pas pu être respecté pour Expo.01/02, le dôme du millénaire et à Séville ; en revanche, le nombre d’entrées prévu a été atteint pour Expo.01/02 et même dépassé à Séville, alors que les entrées effectives de Hanovre se limitent à 45% des projections.

Dans les quatre cas, on a constaté un haut degré de satisfaction des visiteurs, malgré des carences dans la gestion et la planification.

Les principales leçons peuvent se résumer ainsi : l’évaluation prévisionnelle des coûts doit se fonder sur l’expérience des grandes expositions passées et la prudence est de mise dans la budgétisation des recettes. Les chiffres prévisionnels doivent, le cas échéant, être adaptés très tôt et il faut constituer des réserves pour couvrir les imprévus. Enfin, il est important de pouvoir s’appuyer sur des structures, des procédures et des responsabilités clairement définies.

6 Leçons tirées concernant l’organisation et le mode opératoire

Les analyses présentées aux chapitres 1 à 4 permettent de tirer des leçons concernant les déci-sions stratégiques dans la phase initiale (6.1) et le professionnalisme dans la phase de réalisation (6.2).

6.1 Leçons concernant les décisions stratégiques prises dans la phase initiale

Si la Confédération donne pour mandat d’organiser une Exposition nationale, elle accède, de fait, à une responsabilité politique et financière illimitée.

Le Conseil fédéral et le Parlement doivent être d’emblée conscients que la Confédération porte, en tant que mandant, la responsabilité illimitée – tant politique que financière – des Expositions natio-nales. Il importe donc que les faits suivants soient connus au départ. Premièrement, les coûts totaux d’une Exposition nationale oscillent, expérience à l’appui, entre 0,3 et 0,4 % du PIB, et les collectivités publiques doivent en assumer 50 à 65 %. Ensuite, pour couvrir les risques liés aux recettes, la Confédération ferait bien de prévoir une réserve oscillant entre 10 et 15 % des coûts totaux. Le mandat d’organiser une Exposition nationale ne devrait donc être donné que si la dé-termination reste intacte malgré la connaissance de ce cadre budgétaire. Si la Confédération ne veut pas supporter seule le risque financier, elle doit fixer d’emblée une répartition des responsabi-lités avec les cantons et les communes. Daniel Margot, délégué du Conseil fédéral à l’Exposition nationale de 1995 à 2000, a répété dans le cadre de la consultation la proposition, qu’il avait déjà formulée, de créer pour le financement d’une prochaine Exposition nationale un fonds «Exposition nationale» contrôlé par le Conseil fédéral et de l’alimenter chaque année.

L’accompagnement stratégique, par la Confédération, des grandes manifestations doit s’effectuer au plus haut niveau

La Confédération doit prendre des dispositions spéciales au niveau stratégique pour accompagner une grande exposition. (1) L’accompagnement stratégique doit impérativement être disjoint de tout engagement opérationnel éventuel. (2) L’accompagnement stratégique doit être confié aux plus hautes instances de l’administration, en l’occurrence au Conseil fédéral. (3) La représentation stratégique de la Confédération dans le projet doit être assurée par une personnalité de haut rang issue de l’administration. (4) Le choix du département en charge du dossier ne doit pas être guidé par une quelconque pratique ou «tradition», mais par la volonté dudit département de s’engager et d’assumer un rôle moteur dans le projet. (5) Il ne faut pas instituer de délégué du Conseil fédéral pour l’accompagnement stratégique car, intrinsèquement, il ne dispose pas des prérogatives nécessaires à l’exercice de cette fonction.

Dans le cadre de la consultation, l’Administration fédérale des finances (AFF) relativisa ces leçons.

Selon l’AFF, la possibilité que l’Etat puisse sous-traiter ce mandat par une personne externe de-vrait être laissée ouverte. Le CDF est d’avis que la sous-traitance de mandat à une personne externe n’est pas toujours judicieuse. Dans la mesure où le représentant de l’Etat devrait égale-ment être responsable de la coordination interne au sein de l’administration, une solution qui va dans le sens de la leçon formulée ci-dessus doit de toute manière être favorisée.

Lors du choix d’une forme juridique pour l’organisme responsable d’une grande manifesta-tion, il faut prendre en compte les critères suivants: intégration des partenaires, flexibilité, conditions de responsabilité, adéquation pour l’obtention de capitaux.

Le choix de la forme juridique de l’organe responsable d’une grande manifestation doit être guidé par un certain nombre de principes. Il convient d’apprécier l’aptitude de chaque forme juridique (1) à s’associer la participation des différentes parties prenantes, (2) à s’adapter avec souplesse à des conditions susceptibles de changer, (3) à réglementer clairement la responsabilité des différentes parties impliquées et (4) à lever des fonds propres et du capital auprès de tiers. De manière géné-rale, la forme juridique de l’association présente des avantages sous l’angle des deux premiers critères, tandis que la société de capitaux (SA) est plus favorable sous l’angle des deux derniers critères. Au moment du choix de la forme juridique, il faut s’assurer, autant que faire se peut, de compenser les éventuels désavantages par d’autres mesures. Il convient aussi et surtout d’examiner dans quelle mesure la combinaison des deux formes juridiques (association et SA) permet de remplir tous les critères posés.

Une importance centrale doit être accordée aux études de faisabilité lors de la décision d'organiser ou non un grand projet.

L’importance capitale de l’examen de la faisabilité ressort à la lumière des aspects suivants : face à plusieurs projets de valeur comparable, il faudrait faire une étude de faisabilité avant de trancher en faveur de tel ou tel projet. Il incombe au mandant (la Confédération) de définir les questions posées et l’organe chargé de l’étude. La Confédération doit prévoir un personnel suffisant pour évaluer les rapports des études de faisabilité, le cas échéant en faisant appel à des experts exter-nes (sous la forme d’auditions, p. ex.). Fermer les yeux sur des questions non réglées ou des incohérences se paie comptant par la suite.

Pour une grande manifestation, le choix du concept de projet et celui de l'emplacement doivent être interprétés comme étant des décisions sur l'ampleur des risques à courir.

Dans le choix du concept du projet, il faut, d’une part, procéder à un arbitrage entre les risques financiers et les risques liés au contenu : une stratégie fondée sur un financement privé présente un risque quant au contenu (foire-exposition), tandis qu’une stratégie fondée sur un financement public minimise ce risque en grevant la bourse du contribuable. Il faut, d’autre part, considérer la question du site : en portant le choix sur projet monosite, on réduit les risques en ceci que la res-ponsabilité politique se concentre au niveau décisionnel (un seul canton ou une seule ville est étroitement lié au projet) et que l’organisation est simplifiée au niveau structurel et technique. Le choix d’un projet multisites accroît les exigences au niveau décisionnel (plusieurs cantons et villes sont en jeu), le risque d’erreurs stratégiques découlant de conflits d’objectifs (organisation des procédures) et la complexité au niveau technique (réalisation des structures). En revanche, ce genre de projet peut se révéler plus attrayant, puisqu’il permet d’associer un cercle plus large à l’entreprise.

6.2 Leçons concernant le professionnalisme dans la mise en œuvre

La Confédération doit prévoir des ressources en personnel suffisantes pour

l’accompagnement et la surveillance d’un grand projet. Les compétences sont à régler, de manière détaillée, dans les cahiers des charges.

Ce constat confirme et prolonge la leçon selon laquelle l’accompagnement stratégique d’une grande manifestation, au sein de la Confédération, doit être géré au plus niveau. Au-delà du niveau où se situe l’accompagnement stratégique dans les instances fédérales, la leçon à tirer ici est que la Confédération doit prévoir des ressources en personnel suffisantes pour les différents types d’accompagnement (accompagnement stratégique, év. accompagnement opérationnel de projets de la Confédération, surveillance du projet, coopération dans certains domaines opérationnels, comme les achats).

L’externalisation partielle du budget n’est admissible qu’à condition de passer des accords contraignants en la matière.

Cette leçon concerne au premier chef la phase initiale, mais aussi toute la phase de mise en œuvre par la suite. Elle recouvre tous les types de projets ou de sous-projets, étant entendu que, dans le cadre des grandes expositions, l’externalisation peut surtout toucher des tâches liées aux infrastructures ou des projets d’exposition. Tous les projets partiels correspondants peuvent uni-quement être externalisés dans le budget lorsque une convention qui règle le cas est disponible.

Le respect absolu de ce principe permet d’éviter des représentations irréalistes sur les prestations de tiers, qui, par nature, sont notablement limitées dans le cas de l’externalisation de domaines relevant de l’infrastructure. Et si un domaine d’infrastructure devait se révéler rentable, on ne voit pas pourquoi l’exposition ne le gérerait pas elle-même, pour investir les recettes dans le finance-ment d’autres activités. S’il est évident qu’un domaine d’infrastructure n’est pas rentable, on ne trouvera au demeurant pas de particuliers pour le prendre en charge.

Un temps d’arrêt doit être introduit après la conception d’une idée de projet, ceci dans l’objectif d’en tester la faisabilité et d’en fonder l’organisation.

Après la réalisation de l’esquisse d’une idée et l’aval des pouvoirs publics, l’organe responsable devrait faire une pause. Ce temps d’arrêt peut être mis à profit pour (1) faire examiner l’idée par des tiers indépendants afin d’en évaluer la faisabilité et pouvoir le cas échéant apporter les correc-tifs nécessaires, (2) mettre sur pied une organisation professionnelle qui ne soit pas sous la coupe des concepteurs de l’idée et des promoteurs régionaux, (3) imposer des garde-fous au rôle joué par le politique dans l’organisation en le limitant au pilotage et à la promotion politiques du projet et (4) pouvoir associer au projet des acteurs qui n’ont pas pu être consultés dans la phase de

conception, mais qui sont indispensables à sa réalisation.

Il ne faut pas abuser des structures de milice et de mandat.

Le travail purement bénévole – dit de milice – au sein des organes stratégiques et le travail effec-tué sur mandat par des spécialistes au niveau opérationnel sont tout à fait adaptés pour démarrer un grand projet. Mais il faut ensuite professionnaliser le travail, au plus tard dès la fin de la phase initiale. Au niveau stratégique, même les bénévoles doivent pouvoir garantir un minimum de pro-fessionnalisme (surtout sous l’angle des compétences et du temps disponible) ; il faut en outre

prévoir un soutien professionnel pour épauler les bénévoles dans leur activité. Au niveau de réali-sation technique, il faut créer une structure dotée de cadres dirigeants engagés à demeure sur une base contractuelle. Si l’on ne parvient pas à trouver les spécialistes nécessaires, il faut interpréter cela comme le signe que certaines conditions de départ ne sont pas remplies.

Il faut opérer une séparation claire entre la conduite stratégique, la gestion opérationnelle du projet et la responsabilité d’un secteur des opérations.

La séparation nette entre le niveau décisionnel (gestion stratégique, garants du financement), le niveau de la coordination, de la mise en œuvre et du contrôle (gestion opérationnelle générale) et le niveau technique de l’exécution (responsabilités opérationnelles partielles) doit s’appliquer aussi bien aux personnes qu’aux différents organes. Au niveau des décisions stratégiques, les princi-paux garants du financement doivent être représentés de manière appropriée dans les organes.

Il faut éviter le risque d’asymétrie de l’information entre les niveaux stratégique et opéra-tionnel.

Le problème de l’asymétrie de l’information entre la conduite stratégique et la mise en œuvre opérationnelle est bien connu dans les grands projets. Prendre des mesures contre cette asymétrie à travers des instruments de controlling adéquats incombe essentiellement à l’organe responsable.

Au niveau décisionnel stratégique, il faut instituer un organe de taille restreinte, efficace, constitué de professionnels, qui surveille la mise en œuvre des décisions et puisse intervenir pour corriger le tir. Au niveau de la gestion opérationnelle générale, une direction générale organisée selon une hiérarchie classique se chargera des tâches de coordination, de mise en œuvre et de contrôle. Au niveau technique, des structures et des procédures organisationnelles adaptées devront être mises en place. Le niveau décisionnel stratégique doit se doter d’un organe de controlling stratégique indépendant de la gestion opérationnelle générale et habilité à se procurer toutes les informations utiles, faute de quoi le niveau décisionnel ne pourra pas compenser l’asymétrie de l’information. La conduite opérationnelle générale a besoin d’un controlling opérationnel pour pouvoir gérer ses structures. Les instruments de controlling au niveau opérationnel doivent être conçus pour répon-dre aux besoins d’information du niveau stratégique.

Une équipe conçue sur mesure est nécessaire pour chaque phase d'une exposition.

Cette dernière leçon se fonde sur le constat suivant : les grandes manifestations comme l’Expo évoluent au fil du temps et les besoins et exigences varient en conséquence. Le personnel en charge de la mise en œuvre doit s’adapter, tant qualitativement que quantitativement. Dans cha-que phase d’un projet, (1° esquisse du projet, 2° concrétisation des idées dans la planification et la construction, 3° exploitation de l’exposition, 4° démontage), non seulement d’un point de vue qualitatif mais aussi d’un point de vue quantitatif, il est nécessaire d’avoir des personnes différen-tes. Bien entendu, il faut faire attention à ce que les conséquences de changements fréquents de personnel (problèmes d’occupation, perte de «know-how», augmentation des dépenses) restent infimes. Cela concerne tout particulièrement les personnes à la base de la conception du projet qui ne doivent pas être les principaux responsables dans la phase de mise en œuvre, sous peine de ne pas réussir à prendre distance vis-à-vis des idées originales.