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Faire confiance, c’est bien; faire confiance et contrôler, c’est mieux

Dans un projet qui, comme celui de l’Expo, met en jeu un haut degré de complexité et la pression du temps, la confiance joue forcément un rôle important. Dans sa thèse en économie d’entreprise, intitulée «La confiance dans une structure organisationnelle complexe: le piège de l’Expo», Claudia Hubschmid constate que la confiance est un facteur décisif pour qu’un dispositif organisationnel complexe fonctionne et qu’elle contribue par conséquent de manière déterminante au succès d’un projet de ce type. Mais elle s’empresse de souligner que la confiance ne doit pas être dévoyée en confiance aveugle car cette dernière restreint le champ de perception. Quelques exemples tirés d’Expo.01: confiance aveugle accordée par le Comité stratégique à la Direction générale, confiance aveugle des responsables de l’Expo dans leurs propres compétences couplée à une défiance vis-à-vis des tiers, confiance aveugle de la Confédération vis-à-vis des organes respon-sables de l’Expo. Le contrôle est la meilleure arme contre ce genre d’aveuglement. Il ne remplace pas la confiance, mais la complète.

5.2 Bonne organisation du service juridique et de la gestion des contrats

Le rapport Kaufmann constate que les carences observées pour le service juridique et la gestion des contrats sous le régime d’Expo.01 ont été comblées après la crise de 1999. Sur décision de la Direction générale, une cellule juridique interne bien dotée en personnel et en moyens financiers a été mise sur pied au printemps 2000 ; elle possédait suffisamment de compétences pour

concrétiser son travail de manière efficiente et effective, même sur le plan opérationnel. Le rattachement de la nouvelle unité aux organes de gestion du plus haut niveau a été assurée, les interfaces opérationnelles et stratégiques clairement réglées et la circulation verticale de

l’information au sein de la structure (avec la direction des finances, notamment) organisée de manière efficace. Fort de cette organisation, la cellule juridique présente un bilan positif, gérant plus de 4000 contrats en l’espace de deux ans. Le nombre restreint d’actions en justice témoigne de la qualité du travail accompli.

Dans ce contexte, les contrats type, dont la conception remonte à l’époque d’Expo.01, ont joué un rôle essentiel. Le travail fondé sur les contrats type découle d’une recommandation stratégique formulée par la cellule juridique d’Expo.01/02. Le pool d’experts a rédigé les premiers contrats dans ses réunions, avec pour objectif de mettre entre les mains des chefs de projet et des direc-tions un instrument apte à les soutenir dans leur tâche, qui était de négocier des contrats, de la manière la plus concrète et la plus efficace possible, tout en préservant les intérêts de l’Expo. Mais l’idée était aussi de standardiser les procédures pour les collaborateurs en gardant la vue

d’ensemble sur les risques juridiques pour l’Expo.

Pour que des instruments soient utilisés au sein d’une organisation, ils doivent remplir trois condi-tions. Premièrement, les collaborateurs doivent savoir que ces instruments existent (problème de l’accessibilité). Deuxièmement, ces instruments doivent se révéler utiles aux yeux des personnes appelées à en faire usage, ce qui est le cas lorsque leur utilisation apporte un avantage, un gain de temps, par exemple. Troisièmement, l’organisation doit imposer l’utilisation de ces instruments aux collaborateurs (compétence de mise en œuvre de l’organisation). Il ressort des interviews réalisées dans le cadre du mandat Kaufmann que ces trois conditions ont été réunies avec la mention bien pendant Expo.02. Les contrats type passent aussi à leur avantage l’examen matériel : leur cons-truction est logique, prestations et contre-prestations ressortent bien, l’expression est claire et le texte facile à lire. Qui plus est, au bénéfice de l’expérience acquise au fil de l’Expo, les contrats type ont encore progressivement gagné en précision et en qualité.

5.3 Le rôle accru de la Confédération

Comme le constate le rapport Interface, la relation entre l’Expo et la Confédération n’a que peu changé du point de vue formel par rapport à la phase de crise. Dans l’ensemble, les représentants étatiques utilisèrent leur influence de manière plus importante dans la phase de réalisation

d’Expo.02 que dans la phase de préparation d’Expo.01. Une comparaison des organigrammes met aussi ce fait en lumière (Figure 7 et Figure 5).

Les principaux changements intervenus dans les structures internes à l’administration fédérale par rapport à la phase précédente résident dans le renforcement de la surveillance et la séparation de l’accompagnement général du projet de l’Expo et de l’accompagnement spécifique des projets de la Confédération, pour lesquels le chef du DFE a été désigné comme mandant. Un organe placé

sous la direction du Département fédéral de défense, de la protection de la population et des sports (DDPS), constitué de hauts représentants de différents départements, du président du Comité directeur et du Directeur artistique de l’Expo, a été chargé d’exercer la surveillance sur les projets de la Confédération. La direction et l’exécution des projets sont revenues au DDPS, plus particulièrement au Groupement de l’armement (GDA).

Figure 7: Liens entre la structure de l’association et la Confédération pendant Expo.02

Source: Rapport Interface, p. 65

Abstraction faite de l’organisation des nouveaux projets de la Confédération, les services fédéraux en contact avec l’Expo sont restés les mêmes. Cela dit, les contacts, qui revêtaient un caractère ad hoc pendant la crise, sont devenus réguliers dans la phase de réalisation, notamment à travers les rapports trimestriels. Les organes qui avaient partie liée avec l’Expo pendant la phase de réalisa-tion sont les suivants :

Conseil fédéral: l’engagement du Conseil fédéral a perduré après la crise. La délégation du Conseil fédéral, formée des chefs du DFE, du DETEC et du DDPS, a rencontré la direction de l’Expo de temps à autre. Deux rencontres ont eu lieu en 2000 et autant en 2001. Le

4 avril 2001, le Conseil fédéral in corpore a assisté à une présentation du contenu d’Expo.02, faite par la Direction générale. De plus, le chef du DFE était tenu de renseigner régulièrement la Délégation des finances, tout au moins au début de la phase de réalisation. Il se mettait en contact avec la direction de l’Expo préalablement à chacune de ses séances d’information.

DFE: le DFE, qui était le département en charge du dossier de l’Expo, a été notamment épaulé par la Délégation des finances, qui assumait un rôle d’accompagnement. La Délégation des fi-nances a exigé régulièrement un avis du DFE sur les rapports trimestriels de l’Expo. Les res-sources humaines mises à la disposition du Secrétariat général du DFE pour cette fonction d’accompagnement ont cependant toujours été très limitées.

Organes législatifs: les organes législatifs ont joué un rôle bien plus important dans la phase d’Expo.02 qu’auparavant. Au cours de cette phase, le Parlement a approuvé à trois reprises

Assemblée

Comité directeur

Direction générale

Conseil fédéral

DFE DFF DDPS autres départments Parlement

CSEC

représentant DFF représentant DDPS

DélFin

CDF délégation

représentant DFE Chef du DFE

GDA CdG

surveillance projets Conf.

l’octroi de prestations financières à l’Expo. La commission en charge de l’examen préalable du dossier était la CSEC. Toutefois, c’est la Délégation des finances qui, dans sa fonction de sur-veillance, a le plus travaillé sur le dossier de l’Expo. A travers les rapports trimestriels, l’Expo figurait à l’ordre du jour de toutes les séances ordinaires ou presque de la Délégation des finan-ces. La Délégation des finances a en outre procédé à des inspections sur place et rencontré les responsables de l’Expo. Enfin, la CdG s’est aussi penchée sur le dossier de l’Expo. Le 30 juin 2000, elle a confié à sa sous-commission DFE/DFF le mandat d’examiner rétrospectivement les problèmes rencontrés dans la préparation et l’organisation d’Expo.01 et d’en tirer des leçons pour l’avenir. Cette enquête s’est faite au sein de l’administration : les responsables de l’Expo n’ont pas été interrogés ; il n’y a donc pas eu de contacts entre la CdG et l’association. Le rap-port sur l’enquête a été publié le 27 mars 2001.

L’arrêté fédéral du 16 décembre 1999 concernant un crédit additionnel pour l'Exposition nationale a renforcé le rôle du CDF. L’art. 4 dispose : «La direction de l’Association fournit à la Délégation des finances des Chambres fédérales ainsi qu’au Contrôle fédéral des finances (CDF) un rapport trimestriel sur l’état d’avancement des affaires, l’octroi de mandats et la situation financière. Le Contrôle fédéral des finances et la commission de contrôle interne de l’Association ont plein accès aux documents et informations nécessaires que détient l’Association.»

Par la suite, dans la phase d’Expo.02, le CDF a exercé une surveillance financière accrue. D’une part, il rédigeait pour chaque rapport trimestriel un avis à l’intention de la Délégation des finances ; d’autre part, il a procédé à différents contrôles spéciaux sur des questions spécifiques. Pour l’année 1999, ces contrôles ont porté sur l’octroi des mandats ; pour 2000, sur le sponsoring, le controlling et la planification financière ; pour 2001, sur les projets de la Confédération, le control-ling stratégique et le domaine du personnel ; pour 2002, sur le démontage, le sponsoring, les liquidités, les contrats de travail et les projets de la Confédération. Certains de ces contrôles ont débouché sur des mesures tout à fait concrètes. Dans le cadre de son examen du sponsoring d’Expo.02, le CDF a par exemple exigé de contrôler tous les versements aux entreprises chargées du sponsoring. Le contrôle a mis au jour le paiement de provisions et d’honoraires excessifs (rap-port du CDF du 7 août 2002), qui ont par la suite pu être en partie recouvrés par Expo.02.

Par ailleurs, le CDF, en se basant sur les rapports trimestriels d’Expo.02, a relevé à plusieurs reprises le risque important de surévaluation des recettes attendues du sponsoring et de la billette-rie. Il convient de préciser que, sans une connaissance spécifique approfondie de la problématique propre à l’organisation d’une grande exposition, l’appréciation matérielle des projections d’Expo.02 a forcément ses limites.

5.4 Les problèmes non résolus

Le rapport Interface indique que certains problèmes ont perduré dans la phase d’Expo.02, ce qui donne à penser que les problèmes d’Expo.01 ne tenaient pas exclusivement à des questions de personnes.

Le Comité directeur, associant pourtant les milieux économiques, n’a pas non plus réussi à rassembler sans problèmes les contributions de sponsoring escomptées. Les entrées attendues du sponsoring privé étaient aussi trop optimistes dans la phase d’Expo.02. L’idée d’une exposi-tion largement financée par le secteur privé a été défendue presque jusqu’à la fin de l’Expo.

Les divergences de vues entre la Direction générale et le Comité stratégique concernant le controlling sont manifestement inhérentes au système. On les a retrouvées dans la phase de réalisation (certes de manière plus ténue que dans la phase de préparation) et on ne peut les expliquer que par le «réflexe de défense» des acteurs du niveau opérationnel vis-à-vis de la di-rection stratégique. Au final, la comparaison entre les phases semble indiquer que ce conflit peut manifestement apparaître indépendamment des personnes, surtout dans un projet impli-quant de grosses contraintes de calendrier.

La Confédération a certes joué un rôle plus actif dans Expo.02 qu’au temps d’Expo.01. Il reste néanmoins que le Conseil fédéral est demeuré trop en retrait dans son rôle de promoteur. Un grand nombre de personnes interrogées ont estimé qu’elles auraient attendu un engagement plus marqué du Conseil fédéral dans cette phase. De son côté, le Conseil fédéral a au contraire jugé que ses intérêts étaient bien défendus par le Comité directeur, créé à la suite de son inter-vention, et par la qualité du réseau de son président.

En anticipant quelque peu sur les chapitres 5 et 9, on ajoutera ici qu’Expo.02 n’a pas non plus brillé par son souci d’économie et n’a pas exploité un important potentiel d’économie dans le domaine des achats. De plus, l’optimisme de commande d’Expo.02, loin de s’arrêter aux revenus du spon-soring, s’est aussi appliqué aux recettes de la billetterie.