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Une décision contestée de sauver l’Exposition nationale

Une fois la crise ouverte (licenciement de Jacqueline Fendt), la Confédération s’est fortement engagée pour la gérer, sous la conduite du conseiller fédéral Pascal Couchepin. Le Conseil fédéral dans son ensemble a également discuté de l’avenir de l’Exposition nationale à plusieurs reprises, en été/automne 1999. L’élément décisif pour le passage d’Expo.01 à Expo.02 fut alors la décision du 4 octobre 1999, par laquelle le Conseil fédéral se déclarait prêt à demander au Parlement un crédit additionnel. Il avait subordonné le versement de ce crédit (une fois obtenue l’approbation

6 Il importe de souligner que le Conseil fédéral n’a pas donné d’informations cohérentes sur la question. Interrogé le

20 décembre 1999, lors du débat sur le budget 2000, le conseiller fédéral Kaspar Villiger, chef du département des finances, a admis ne pas être précisément informé, mais avoir entendu dire que le risque maximum représenterait

«un montant un peu plus élevé que les 170 millions de francs évoqués» (BO 1999 E, p. 1178). Même en admettant que le ministre des finances ne peut être informé en détail de chaque affaire lors de la discussion du budget qui en concerne un grand nombre, ces réponses différentes sont problématiques aux yeux du Parlement.

nécessaire du Parlement) à un engagement accru de l’économie (380 millions) et à des économies dans le budget de l’Expo (290 millions). La direction de l’Expo avait quatre mois pour satisfaire à ces conditions.

Le CDF conclut, sur la base de différents mandats liés à l’enquête spéciale, que la décision du Conseil fédéral du 4 octobre 1999 ne faisait pas l’unanimité: le conseiller fédéral Couchepin, chef du DFE, avait publiquement laissé paraître ses réserves face au projet d’Expo. Comme le montrent la chronique de l’Expo, des interviews menées dans le cadre de l’enquête spéciale et des comptes rendus de presse, le conseiller fédéral Couchepin préconisait l’abandon de l’Exposition nationale, à l’idée qu’elle ne parviendrait pas à remplir les conditions imposées dans le délai fixé et que des raisons politiques empêcheraient son sauvetage.

Comme le Conseil fédéral avait déjà traité ce dossier sans trouver d’accord le 1er octobre 1999, le DFF a élaboré pendant le week-end la nouvelle proposition exposée plus haut. Le Conseil fédéral l’a adoptée le 4 octobre 1999, décidant ainsi de ne pas mettre fin à l’Exposition nationale.

L’arrêté fédéral du 16 décembre 1999 formulait, à son article 2, les critères de libération du crédit additionnel, tels qu’ils ont été décidés par le Conseil fédéral le 4 octobre 1999: «L’octroi des prêts est subordonné à la condition que les milieux économiques, les communes et les cantons organi-sateurs apportent une contribution supplémentaire appropriée. A compter du 1er janvier 2000, des paiements imputés à ce crédit ne peuvent être effectués que s’il est prouvé que l’engagement ferme global de l’économie privée atteint 380 millions de francs. En outre, le Conseil fédéral doit avoir pris acte, en donnant son approbation, de la manière dont l’Association EXPO 2001 entend combler le découvert pour parvenir à l’équilibre budgétaire à hauteur de 290 millions de francs par des redimensionnements, des mesures d’économies, des contributions supplémentaires faisant l’objet d’engagements fermes conclus par des cantons, des communes et d’éventuels sponsors.»

A la mi-janvier 2000, la direction de l’Expo a présenté au Conseil fédéral un rapport sur la prise en compte de ces critères (voir chap. 3.3).Ce rapport a servi de base à l’arrêté du Conseil fédéral du 26 janvier 2000 concernant la libération du crédit additionnel. Le budget calculé «à la limite de la rupture» devait servir en outre de référence pour les planifications de la direction de l’Expo («bud-get d’Expo.02»). Ce bud(«bud-get intégrait les changements suivants par rapport aux discussions me-nées au Conseil fédéral et au Parlement, voire même au Comité directeur durant la première quinzaine de décembre 1999:

En comparaison du rapport Hayek (1’618,5 millions de francs, y compris 80 millions de coûts dus au report, sans les risques chiffrés à 171 millions de francs), le budget initial renchérissait de 188,4 millions de francs, suite à la réévaluation de certains facteurs de coûts. Les écono-mies calculées, largement supérieures aux 290 millions exigés par le Conseil fédéral et le Par-lement, se basaient sur ce budget initial. Mais comme le Conseil fédéral et le Parlement s’étaient fondés sur le plafond de dépenses défini dans le rapport Hayek, les économies réali-sées par l’Expo par rapport au plafond initial n’étaient plus que de 168,9 millions de francs.

Afin d’équilibrer son budget, la direction de l’Expo partait de l’idée que la Confédération renon-cerait aux recettes de la TVA ainsi qu’aux taux d’intérêt qui devaient lui échoir. Le Comité direc-teur a donc proposé au Conseil fédéral, le 20 janvier 2000, de l’exonérer partiellement de la TVA et de lui accorder des prêts sans intérêt.

Le budget prévoyait des risques et des réserves supplémentaires à hauteur de 320 millions de francs. Afin de les couvrir, le Comité directeur demandait au Conseil fédéral de lui accorder une

garantie de déficit de 300 millions de francs. Faute de quoi il déclinait toute responsabilité dans la réalisation d’Expo.02.

Il ressort des analyses menées par l’administration que les conditions fixées par le Parlement pour les fonds issus du sponsoring n’étaient qu’en partie respectées, et que seul le relèvement du plafond budgétaire avait permis d’atteindre les réductions de coûts exigées. Néanmoins, le Conseil fédéral a libéré le crédit additionnel le 26 janvier 2000, et a chargé le DFE d’élaborer un message sur une garantie de déficit de l’ordre de 320 millions de francs.Comme les procès-verbaux de négociations du Conseil fédéral n’ont pu être consultés dans le cadre de cette étude, on ignore quels arguments et quels rapports de majorité ont conduit à cette décision. Une note de discussion du DFE à l’attention du conseiller fédéral Villiger indique tout au moins que ce feu vert à la libéra-tion du crédit addilibéra-tionnel constituait en premier lieu une décision politique, exigeant une certaine flexibilité par rapport aux conditions formulées dans l’arrêté fédéral. En effet, comme le Parlement avant lui, le Conseil fédéral n’était pas prêt à assumer les conséquences politiques d’un abandon d’Expo.02. Il préférait courir un risque financier supplémentaire.

En février 2000 le Conseil fédéral a expliqué au Parlement, pour justifier la libération du crédit additionnel, que l’évolution des derniers mois avant sa décision, en particulier les changements organisationnels survenus au sein de l’Expo, mais aussi le budget soigneusement élaboré et l’appui croissant de l’économie plaidaient en faveur de la poursuite des travaux et de l’organisation de l’Expo. Le Conseil fédéral reconnaissait que la participation exigée de l’économie n’avait pas été atteinte et que le budget n’était pas équilibré (message du 23 février 2000, p. 1985).Le 16 juin 2000, le chef du DFE déclarait au Conseil national que le Conseil fédéral avait interprété les condi-tions fixées dans l’arrêté fédéral «de manière relativement large» (BO 2000 N, p. 707).

2.1.3 ... et à la contrainte inexorable

L’arrêté parlementaire de décembre 1999 et la libération de crédit par le Conseil fédéral en janvier 2000 limitaient encore la liberté de manœuvre. Et c’est ainsi qu’a débuté un parcours «de

contrainte en contrainte» (conseiller aux Etats Stadler). Jusqu’à fin 2002, le Parlement se voyait contraint d’injecter 548 millions supplémentaires dans Expo.02 (l’engagement total de la Confédé-ration passant de 380 millions de francs à fin 1999 à 928 millions à fin 2002, Tableau 1).

Le mécontentement croissant du Parlement se lit dans les voix du Conseil national opposées aux projets de crédit. Alors qu’en 1996, le crédit d’engagement de 130 millions de francs ne rencontrait que 25 oppositions (dont notamment les membres du groupe des Verts et quelques socialistes), le crédit d’engagement de 250 millions de francs de décembre 1999 suscitait 39 oppositions (groupe des Verts et part importante du groupe UDC). Par la suite, le groupe UDC s’est massivement opposé, avec les Verts, aux autres projets de crédit destinés à l’Expo. Les critiques très dures de l’UDC, citant volontiers l’Expo comme exemple éclatant du gaspillage étatique, pourraient avoir incité les groupes des autres partis gouvernementaux à soutenir plus résolument les projets que s’il n’y avait pas eu cette opposition de l’UDC. Dans le cas du crédit additionnel de 120 millions de francs de mars 2002, le groupe PDC a également rejoint le camp du non. D’où 54 voix négatives contre 118 votes favorables (et de nombreuses abstentions).

Tableau 1: Arrêtés fédéraux sur le financement de l’Expo (crédits d’engagement, données en millions de francs)

Arrêtés

fédéraux Teneur Contributions /

Prêts Garantie

de déficit Total

10.12.1996 décision de principe 110 20 130

16.12.1999 crédit additionnel 250 380

16.06.2000 garantie de déficit 338 338 718

13.06.2001 transformation de la garantie de déficit

(300) en prêt +300 -300 718

14.03.2002 crédit additionnel (120), transformation

de la garantie de déficit (58) en prêt +178 -58 838

11.12.2002 crédit additionnel 90 928

Avec le temps, l’atmosphère aux Chambres a viré au sarcasme et à l’amertume (voir encadré 3). Il a plusieurs fois été question de chantage au printemps 2002, à propos du crédit additionnel de 120 millions de francs. La situation d’Expo.02 évoquait un tunnel à moitié construit, dont l’abandon aurait entraîné des surcoûts, si bien qu’il n’y avait pas d’alternative à la «fuite en avant» (conseil-lère nationale Riklin). Le Parlement ne pouvait plus développer ses propres possibilités d’action et devait se contenter d’un «non de protestation» aux projets qui lui étaient soumis.