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«Ni connu, ni jugé réellement intéressant»

Les responsables de l’Expo n’ont pris conscience du problème du budget externe qu’au cours de la crise de 1999. Au début de cette année, le directeur des finances Burkhalter signalait encore, dans une brochure intitulée «Le financement d’Expo.01»: «Nous estimons aujourd’hui le total des inves-tissements de tiers à près de 800 millions (budget de tiers ou budget externe). Le montant exact n’est ni connu, ni réellement intéressant (p. 3). On y lit encore ceci à propos du concept de centre de profit: «Si un nouveau sponsor se présente ou si un sponsor disparaît, c’est et cela reste l’affaire du département marketing (qui disposera de plus ou moins d’argent) et ne peut mettre en péril Expo.01. Tout le concept est axé sur une stabilité maximale.» (p. 5)

2.2.2 Internalisation constante du budget externe

Par la suite, le budget externe a subi un processus inexorable d’internalisation (Figure 1).Les coûts totaux d’Expo ne varient pas beaucoup pendant les années 1995 à 2002. Alors que le rapport de faisabilité tablait sur 1,4 milliard de francs, les coûts totaux s’élevaient finalement à 1,6 milliard de francs. En revanche, le rapport entre budget interne et budget externe a changé du tout au tout. Au début, le budget externe, soit 893,7 millions de francs, s’élevait à 64% du budget total. Dans le décompte final provisoire de novembre 2002, l’apport externe tombe à 230,2 millions de francs (14%). La correction s’est effectuée essentiellement du temps d’Expo.01. Le budget initial d’Expo.02 (2000/01) misait encore sur un budget externe de 224,8 millions, représentant 16% du budget d’ensemble.

Figure 1: Dépenses des budgets interne et externe d’Expo.01/02, 1995-2002 (en millions de francs)

0 200 400 600 800 1'000 1'200 1'400 1'600 1'800

1995/12 1996/05

1997/04 1998/06

1998/12 1999/06

1999/09 2000/01

2000/12 2001/06

2001/12 2002/05

2002/11 Budget externe

Budget interne

Budgets d’Expo.01: de décembre 1995 à juin 1999; budget «estimate» du rapport Hayek: septembre 1999;

Budgets d’Expo.02: de janvier 2000 à mai 2002; décompte final provisoire: novembre 2002.

Source: annexe 6

2.2.3 Budget interne: explosion des coûts pendant Expo.01

Comme le montre la Figure 2, les coûts du budget interne ont explosé du temps d’Expo.01, suite à l’internalisation de parties toujours plus nombreuses du budget externe.

Les coûts totaux du budget interne ont plus ou moins doublé entre fin 1995 et septembre 1999 (budget «estimate» tiré du rapport Hayek). Les divers secteurs de coûts appellent les remarques suivantes:

Les coûts d’infrastructure (constructions) ont commencé par être revus à la baisse au début d’Expo.01 (notamment parce que l’aide accordée par la Confédération était inférieure au mon-tant demandé). Puis ils ont doublé, passant de près de 200 millions à plus de 400 millions de francs. Cette évolution reflète la situation de blocus subie par la Direction générale (voir 4.5.2).

Les coûts budgétisés pour l’exploitation ont quintuplé, passant de 40 millions dans l’étude de faisabilité à pratiquement 200 millions dans le dernier budget d’Expo.01. Cela tient à ce qu’au début, on avait systématiquement sous-estimé, voire oublié les coûts d’exploitation encore loin-tains. Ainsi, comme le relève le rapport Hayek, les frais d’habillement du personnel de l’Expo n’étaient toujours pas inscrits au budget en milieu d’année 1999.

L’étude de faisabilité ne prévoyait aucun frais pour les expositions proprement dites et les Events (qui devaient être intégralement financés par le budget externe). Or à la fin d’Expo.01, ce poste budgétaire avait grimpé à près de 200 millions de francs.

Les coûts indirects ont passé de 180 millions à près de 350 millions de francs. Ces coûts n’apparaissent que dans un budget global et n’étaient pas ventilés par direction.

Figure 2: Dépenses du budget interne d’Expo.01/02, 1995-2002 (en millions de francs)

0 200 400 600 800 1'000 1'200 1'400 1'600

1995/12 1996/05

1997/04 1998/06

1998/12 1999/06

1999/09 2000/01

2000/12 2001/06

2001/12 2002/05

2002/11 Coûts indirects

Expositions/Events Exploitation

Infrastructure (bâtiments)

Budgets d’Expo.01: de décembre 1995 à juin 1999; budget «estimate» du rapport Hayek: septembre 1999;

Budgets d’Expo.02: de janvier 2000 à mai 2002; décompte final provisoire: novembre 2002.

Source: annexe 6

Pendant Expo.02, les coûts inscrits au budget interne ont évolué dans une bien moindre mesure, passant de 1’215 millions de francs en début d’année 2’000 à 1’371 millions de francs selon le décompte final provisoire. Cette augmentation de 156 millions de francs net correspond à une hausse de 13% (voir annexe 6). Selon le décompte final provisoire d’Expo.01/02 de novembre 2002 (rapport trimestriel 11), cette hausse s’explique par une «augmentation forcée» des coûts (une présentation détaillée est faite au chapitre 8.1).

2.2.4 Budget interne: implosion des recettes pendant Expo.02

La Figure 3 montre l’évolution des recettes. On observe que l’Expo n’a pas systématiquement comptabilisé les aides de la Confédération, et que la répartition des aides fédérales entre le poste

«allocations reçues des pouvoirs publics» et le poste «découvert» (garanti par des prêts de la Confédération) ne correspond pas exactement au caractère des diverses aides fédérales (détails : annexe 6).

Figure 3: Recettes du budget interne d’Expo.01/02, 1995-2002 (en millions de francs)

Budgets d’Expo.01: de décembre 1995 à juin 1999; budget «estimate» du rapport Hayek: septembre 1999;

Budgets d’Expo.02: de janvier 2000 à mai 2002; décompte final provisoire: novembre 2002.

Source: annexe 6

Dans la phase d’Expo.01, les divers postes de recettes du budget interne ont évolué comme suit:

Les recettes attendues du sponsoring ont explosé (de 45 à 318 millions de francs), sous l’effet de l’internalisation constante du budget externe. Or le rapport Hayek a très clairement montré qu’on ne pouvait compter que sur une partie des recettes attendues du sponsoring et a situé pour sa part les recettes attendues à 240 millions de francs.

Les recettes attendues de la billetterie ont également été fortement revues à la hausse. De 120 millions de francs au début, elles ont grimpé à 325 millions de francs – alors même que le nombre d’entrées estimées restait identique.

Les attentes pour les autres recettes n’ont que peu changé jusqu’à fin 1998 (montants attendus:

entre 130 et 166 millions de francs). A la mi-1999, elles ont été revues à la baisse à 66 millions de francs seulement, reflétant l’évolution décevante pour Expo.01 du merchandising et de la concession de licences.

Les allocations des pouvoirs publics inscrites au budget sont restées stables à 195 millions de francs (85 millions des cantons et 110 millions de la Confédération). En ce qui concerne les ai-des de la Confédération, la garantie de déficit de 20 millions a été prise en compte, tandis que les 20 millions d’origine destinés aux projets de la Confédération s’ajoutaient au budget externe.

Le budget «estimate» inscrit dans le rapport Hayek réduisait dans le budget interne les recettes attendues du sponsoring de près de 80 millions pour les ramener à 240 millions de francs. Quant aux recettes attendues des visiteurs, elles n’étaient que légèrement réduites (à 319 millions), alors que les autres recettes attendues affichaient une légère augmentation (à 86 millions). Les aides des pouvoirs publics étaient maintenues à 195 millions de francs. Comme les coûts attendus pour

le budget interne grimpaient simultanément de 363 millions de francs pour atteindre 1’221 millions de francs, il en résultait un découvert de 381 millions de francs pour le budget interne.

Des garanties de déficit et des prêts de la Confédération (sans incidence directe sur le budget du compte de résultat) ont servi par la suite à combler le découvert affiché au cours d’Expo.02. Les divers postes de recettes du budget interne ont évolué pendant Expo.02 de la manière suivante:

Dans le budget initial d’Expo.02 (janvier 2000), les recettes attendues du sponsoring inscrites au budget interne ont à nouveau fortement augmenté (à 357 millions de francs). Or cette opéra-tion reflète moins un changement des attentes générales par rapport au sponsoring qu’un trans-fert du budget externe au budget interne. De même, les «autres recettes» du budget interne ont été revues à la hausse (passant à 159 millions). Quant aux recettes attendues des visiteurs, el-les ont été légèrement corrigées à la baisse (à 295 millions de francs). Enfin, el-les allocations des pouvoirs publics ont grimpé à 170 millions de francs. Or c’est dû à une erreur d’imputation (sous forme de recettes) des prêts accordés par la Confédération par le biais du crédit additionnel de 250 millions de francs adopté par le Parlement en décembre 1999.

Fin 2001, il a fallu revoir nettement à la baisse les attentes du sponsoring, dès lors chiffrées à 247 millions de francs. Le découvert a repassé de ce fait à 270 millions de francs.

Les recettes attendues des visiteurs et les autres recettes n’ont été que légèrement revues à la baisse jusqu’à l’ouverture d’Expo.02. Le résultat effectif devait s’avérer bien moins bon. Ainsi les recettes des visiteurs (165 millions) n’ont atteint que 60% des estimations du budget de mai 2002, et les autres recettes ont même fondu de 44% par rapport à l’estimation de mai 2002.

D’où un bond à 563 millions de francs du découvert affiché dans le décompte final provisoire.

On observe dans l’ensemble que les recettes ordinaires d’Expo.02 (sponsoring, recettes des visiteurs, autres recettes) ont diminué de moitié environ par rapport au budget initial d’Expo.02 (passant de 811 millions à 443 millions selon le décompte final provisoire). Quant aux aides to-tales injectées par les pouvoirs publics pour combler le découvert (supporté par la Confédéra-tion), elles ont plus que doublé, passant de 403 millions à 928 millions de francs.

3 Un manque de précisions au départ peut coûter cher

Une Exposition nationale est un projet exigeant de créer en quelques années une vaste organisa-tion qu'il s'agira ensuite de dissoudre. Cette exigence vise aussi bien l'aspect pratique (terrains d'exposition, pavillons, infrastructure de transports, restauration, etc.) que les questions d'ordre organisationnel (organisme responsable, contrats et financement). Un problème particulier se pose quant au financement, les coûts devant être assumés d'entrée de jeu alors que des recettes es-sentielles tel le produit des visites n'interviennent qu'après l'ouverture de l'exposition. Du fait que les Expositions nationales sont très espacées dans le temps, les expériences faites lors des der-nières manifestations comparables ne sont que difficilement accessibles et doivent de surcroît être adaptées aux circonstances du moment.

Les études de faisabilité menées tout au début du projet revêtent dès lors une importance décisive.

Dans le cadre de son analyse spéciale, le CDF a ainsi mandaté les experts Becker/Gechter &

Partner afin qu'ils évaluent de façon critique les études de faisabilité présentées en 1995 et qu'ils rédigent un rapport à ce sujet. La suite de ce chapitre se réfère en particulier aux conclusions de ce rapport («Rapport Becker/Gechter sur la faisabilité»).

3.1 Les études de faisabilité présentées en 1995 ne répondaient pas aux règles de l'art

1500 pages, tel est le volume des études de faisabilité que l'Association Exposition nationale a livrées en dix exemplaires au Conseil fédéral en décembre 1995. L'association avait confié la mise au point de ces études à la firme AS-Management. Cette dernière avait été spécialement créée à cet effet par le conseiller en management Rudolf Burkhalter (Aarproject) et l'ingénieur Paolo Ugoli-ni (Steiner Engineering SA). Le contrat de plus de 2,5 millions de francs conclu avec la firme Management restait néanmoins très vague quant au produit à livrer. Pour sa part, la firme AS-Management a confié à des tiers nombre de mandats s'inscrivant dans les études partielles. Les bonnes questions ont-elles été posées à ce moment-là, et les questions posées ont-elles reçu les bonnes réponses?

3.1.1 Bonnes questions et bonnes réponses?

Une étude de faisabilité devrait constituer une évaluation indépendante et objective, montrant si un projet donné peut être réalisé ou adjugé d'une manière restant à définir. Une telle étude représente en définitive un modèle de pensée du projet examiné: les attentes, idées et plans des analystes du projet s'y expriment sous forme d'expériences conceptuelles et de modèles mathématiques. Du point de vue de la théorie de la modélisation, deux critères entrent en jeu pour juger de la qualité d'un modèle, indépendamment de tout aspect de créativité et de la liberté artistique dont jouissent les architectes de modèles. Dans cette optique, un modèle – peu importe comment il est conçu – doit être jaugé à la fois en fonction de la capacité de modélisation et de la qualité de la modélisa-tion.

Il s'agit en ce sens d'apprécier si les rapports de faisabilité ont donné une image fidèle de la réalité et quels ont été les moyens mis en œuvre à cet effet (capacité de modélisation).

Reste en outre à se demander si les bonnes questions ont été posées.

Il faut de plus apprécier si les études ont été utiles et ont pu servir à prendre les décisions et à les étayer (qualité de la modélisation). Reste également à se demander si les questions posées ont reçu les bonnes réponses.

Pour un grand projet culturel tel qu'Expo.01/02, une étude de faisabilité devrait examiner de ma-nière approfondie les aspects suivants:

Contexte institutionnel: quelle mission, quel rôle le projet a-t-il dans la société à laquelle il s'adresse, autrement dit dans le contexte régional, national et international? Comment le projet sera-t-il piloté et quel est son concept central?

Analyse de marché: définition du marché; analyse de la concurrence; délimitation de groupes cibles; enquête sur le comportement des visiteurs attendus (prospection qualitative du marché);

enquête concernant une élasticité-prix (compte tenu également des coûts de transaction et d'opportunité de la visite) et établissement de prévisions quant au nombre de visiteurs (prospec-tion quantitative du marché).

Stratégie de développement: quelles conditions le projet requiert-t-il, quel est leur ordre de priorité et comment peut-on les créer? Quelles sont les approbations et autorisations nécessai-res? Quelles sont les conditions-cadres à respecter sur le plan juridique?

Plan-programme: De quels éléments le projet doit-il se composer et comment ces éléments sont-ils dimensionnés?

Plan d'organisation et des effectifs: quels sont les besoins en matière de personnel, comment l'organisation du personnel est-elle prévue et qui en sera responsable?

Plan des constructions et de l'aménagement des sites: où et de quelle façon précise le projet sera-t-il réalisé? Quelles mesures de construction seront-elles nécessaires?

Plan des coûts et du financement: quels coûts le projet impliquera-t-il directement et indirecte-ment et qui les assumera, à quel moindirecte-ment et de quelle manière? Comindirecte-ment a-t-on prévu de ré-gler le problème du préfinancement?

Calcul des prévisions concernant les visiteurs, recettes et dépenses basées sur des hypothèses clairement désignées.