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La Promesse de l’aube : la vie individuelle - une œuvre de la justice récupérée

B. Le système des valeurs chez Gary

2. La Promesse de l’aube : la vie individuelle - une œuvre de la justice récupérée

Le leitmotiv de La Promesse de l’aube est la quête justicière ; le narrateur à la première personne le souligne lui-même à plusieurs reprises parallèlement à l’exposition de son parcours biographique. Il s’agit d’un roman autobiographique écrit à la première personne par un narrateur qui est également l’un des protagonistes, à savoir Romain Kacew. Celui-ci raconte des épisodes de sa vie, aux côtés de sa mère, Nina Kacew, à partir de leur émigration de la Russie à travers la Pologne jusqu’au moment où ils arrivent en France ; c’est, en d’autres mots, une narration rétrospective de la vie du narrateur, plus exactement de son enfance et de sa jeunesse jusqu’à la mort de sa mère. L’itinéraire est parsemé de nombreux obstacles et d’incidents malencontreux ; les personnages ont souvent affaire au manque d’argent, à une mauvaise intégration sociale, mais ils s’en sortent chaque fois pour s’approcher de plus en plus de leur cible, la France. Les deux personnages se confrontent, à travers ce voyage d’une dizaine d’années, à beaucoup de cas d’injustice qui, pourtant, ne les découragent pas, mais renforcent leur volonté de trouver un jour la justice méritée. Le narrateur, en tant qu’enfant, est moins touché par les injustices quotidiennes, dues à son statut d’émigrant ; c’est sa mère, en tant qu’adulte, qui les subit le plus. Le personnage de la mère réussit chaque fois par des efforts acharnés à protéger son fils autant que possible des vicissitudes et des injustices de l’existence et à lui créer l’illusion de la justice. Si le monde lui est hostile, alors elle recrée la justice chez elle. La citation suivante présente Nina de retour chez elle et chez son fils, après toute une journée passée à battre la ville de Wilno pour vendre des chapeaux et pour gagner sa vie : Le visage de ma mère était à présent heureux et apaisé, sans trace de souci. Les marques de fatigue avaient elles-mêmes disparu ; son regard errait dans un pays merveilleux et, malgré moi, je tournai la tête dans sa direction pour chercher à apercevoir cette terre de la justice rendue et des mères récompensées. (L. Pr., 51.) Le narrateur décrit sa mère rétrospectivement, puisqu’au moment de la narration, il est un homme mûr, aux cheveux

«grisonnants» ; il la décrit à travers sa mémoire, plus précisément à travers une mémoire chargée affectivement. Romain recrée ainsi le portrait de sa mère et rend un sens à son existence et à celle de sa mère du point de vue de la justice retrouvée. Nous nous pencherons dans les pages suivantes sur l’acception de la vie comme œuvre de justice qui, à son tour, peut s’identifier à une œuvre littéraire. La quête justicière des deux personnages est chargée émotionnellement, et cela les responsabilise réciproquement mais aussi par rapport aux autres, à travers la fraternité, que le narrateur invoque si souvent. Le passage final du roman, où Romain se trouve sur la plage de Big Sur au bord de l’océan à admirer le paysage et à

rêver d’un monde fraternel et juste, en est encore une preuve éloquente. Le roman désigne donc la promesse d’une vie méritoire que Nina fait à son fils et en même temps la promesse de ce dernier de se réaliser selon les plans de sa mère, c’est-à-dire de récompenser ses efforts et de lui montrer que la justice, dont elle rêve avec lui depuis si longtemps, peut se matérialiser sous ses yeux et de son vivant. Romain fait l’apprentissage de la justice dès son enfance et il cherche déjà, à partir de cette époque, ses multiples facettes et ses modalités de représentation.

a.) Justice métaphysique et justice immanente

Il importe maintenant d’éclairer la notion d’injustice dans la vision des deux personnages : pour Nina, les injustices font partie de la vie, elle en est habituée. Elle est pourtant fermement persuadée que l’homme peut lutter contre celles-ci tout en cherchant sa propre justice qui s’identifie pour elle à une justice métaphysique, synonyme d’une vie accomplie. Or une vie accomplie signifie pour elle donner une bonne éducation et assurer une bonne formation à son fils pour le voir en homme réalisé dans la société. Ce projet de la mère se justifie puisque sa vie se confond avec la vie accomplie de son fils. Pour pouvoir bénéficier de cette justice ultime, il faut subir l’injustice, à ses yeux. Le dialogue suivant entre Nina et son fils nous rend une image plus nette sur la notion de justice, voire d’injustice, que les deux personnages partagent:

[Romain] - Trois ans de licence, deux ans de service militaire…

[Nina] - Tu seras officier, m’interrompit-elle.

[Romain] - Bon, mais ça fait cinq ans. Tu es malade.

- […]

[Nina] - Tu auras le temps de finir tes études. Tu ne manqueras de rien, sois tranquille …

[Romain] - Bon Dieu, ce n’est pas de ça qu’il s’agit…J’ai peur de ne pas y arriver… de ne pas y arriver à temps…

- […]

[Nina] - Il y a une justice. (L. Pr., 177.)

La justice dont parle le personnage de la mère est, comme nous venons de le dire, une force métaphysique qui agit à l’insu des individus, mais qui rend finalement à chacun son dû. Elle rappelle en cela la justice divine. Nina ne semble pas se soucier tant de l’injustice, comme le fait son fils, et ce trait est visible à travers tout le roman dans les plus diverses circonstances.

La mère se fie tellement à la justice finale que les obstacles du parcours ne l’effraient plus, elle ne leur accorde plus d’importance.

En ce qui concerne le personnage du fils, sa vision est opposée à celle de sa mère. Il est trop ancré dans le présent : la fragilité de sa mère, un possible manque d’argent, le temps

qui transforme et qui peut détériorer tout l’inquiètent. Le fils se pose le problème des obstacles qui pourraient arriver et donc entraver sa formation et, en même temps, les projets de sa mère. Or ces obstacles, il les voit comme des injustices à l’adresse de ses propres efforts à rendre sa mère heureuse, mais aussi à l’adresse directe de sa mère, déjà affaiblie physiquement par tant d’années de lutte et de dévouement maternel. Romain ne semble pas se fier à la justice métaphysique ou divine en laquelle sa mère met son espoir – il partage plutôt l’opinion de R. Gary que l’on retrouve exposée à un moment donné dans La Nuit sera calme : en partant de l’exemple de la vie pleine de tribulations de sa mère, l’auteur conclut que l’humanité subit à travers l’Histoire trop d’injustices et de souffrances pour pouvoir encore se fier à Dieu et à sa justice. Gary ne nie pas l’existence de ce dernier, mais le considère comme impuissant face aux changements sociopolitiques du XXe s : L’athéisme, ça ne m[R. Gary]’intéresse pas, et Dieu, j[R. Gary]’en suis tout à fait incapable. J’y ai réfléchi, je me souviens, quand j’avais seize-dix-sept ans, en regardant ma mère se démener et je me souviens, que je suis arrivé à la conclusion que croire en Dieu, c’est calomnier Dieu, c’est un blasphème, car il n’aurait pas fait ça à une femme. Si Dieu existait, ce serait un gentleman. (L. Nuit, 57.) Si Nina aspire toute sa vie à une justice finale qui se prolongera même dans l’au-delà, son fils essaye de lui rendre justice encore de son vivant. Cette attitude du fils converge de nouveau sur ce qu’affirme R.

Gary à propos du Christ, figure qui détient aussi, parmi ses qualités, celle de la justice : Pour moi [R. Gary] il s’agit là [au sujet du Christ] d’humanité et non d’au-delà, de l’humain et non de divin […]. (L. Nuit, 228.) Ceux qui essayent de récupérer mon [R. Gary] œuvre dans un but d’au-delà et de papauté, n’y ont rien compris. (L. Nuit, 230.) L’intérêt principal est donc porté au présent et à l’individu immanent. Le bonheur que les deux personnages veulent se forger de leur vivant est encore un trait du postmodernisme125. Puisque l’au-delà n’intéresse pas le protagoniste, il n’est pas question de reporter ce bonheur ; celui-ci doit être acquis quotidiennement, durant toute une vie. La somme de ces moments de bonheur forme le bonheur immanent, et c’est ce que veut démontrer le narrateur de La Promesse de l’aube en relatant les exploits de sa vie d’enfant, de jeune homme et d’homme mûr qui a atteint la quarantaine. Dans le roman cité, le bonheur apparaît sous l’acception d’une continuelle quête justicière qui transforme et ennoblit la vie individuelle. M. Maffesoli se sert du terme d’esthétisation pour désigner ce processus ; l’esthétisation ne se réfère pas seulement aux œuvres artistiques mais surtout aux émotions et aux intentions communes des individus qui les poussent à vivre et à agir d’une certaine manière. Ainsi, Nina et Romain ennoblissent leur vie par le mobile commun qui les anime au quotidien, à savoir leur « œuvre de justice». La

125 M. Maffesoli: Au creux des apparences. Pour une éthique de l’esthétique, 157.

volonté de fer de Romain d’exceller du vivant de sa mère en divers arts, comme la jonglerie, l’écriture, les bonnes manières, la carrière militaire, etc. exprime au fond la reconnaissance envers la peine que s’est donnée sa mère pour son éducation ; il traduit également un acte justicier dont le but est de prouver à Nina que ses attentes et ses rêves peuvent être exaucés dans le présent : Qu’on ne s’imagine pas, cependant, que j[Romain]’assistais à ses [de Nina] luttes sans tenter de venir à son secours. […] Ma mère méritait cela et je passais tous mes loisirs à m’entraîner. (L. Pr., 130.) La justice devient pour le personnage une obligation, une responsabilité envers sa mère qu’il ne réussit pas à accomplir complètement à cause de l’imperfection et des limites de l’homme : le narrateur cite en ce sens la figure du jongleur Rastelli. (L. Pr., 133.) qui est mort avant qu’il puisse faire son numéro avec une balle de plus, astuce dont il a rêvé toute sa vie. Romain craint le même échec vis-à-vis des attentes de sa mère, de sorte que ses efforts à rendre une justice totale à Nina traduisent au fond une obligation impossible, qui n’est pas à la portée de l’homme. La conclusion serait alors que la véritable justice est accordée par un être supérieur, donc Dieu. Le narrateur ne s’exprime pas paradoxalement sur la divinité qui pourrait suppléer à ce manque. Il croit que, malgré la condition humaine limitée, l’individu peut jouir d’une certaine victoire dans l’exercice constant des valeurs humaines. Les résultats de ses actions ne seront pas, certes, parfaits, mais ils seront, au moins, le reflet de ce qu’ils devraient être. La perspective sur la justice de Romain est différente de celle classique dont témoigne sa mère : pour lui, la justice peut se réaliser même sur terre ; l’au-delà est incertain et remettre une promesse à plus tard équivaut donc à ne pas tenir sa promesse ou à une illusion. En excluant la justice voire l’autorité divine, Romain change complètement la vision éthique classique et approche une vision postmoderne : Dieu n’est plus considéré comme le détenteur du Bien absolu ou de la justice absolue ; aux yeux de Romain, il a depuis longtemps perdu son pouvoir et à sa place s’installe l’art, plus précisément l’art littéraire. Notons que le remplacement de l’autorité divine par l’art est un choix individuel qui concerne le narrateur de La Promesse de l’aube ; celui-ci ne tâche aucunement à rendre ce choix universel ou à l’instaurer comme modèle.

Cependant l’attitude du narrateur de tenir sa promesse envers sa mère se distingue également par un esprit assidu du devoir. L’attitude majeure de Romain dans le roman consiste à rendre justice à sa mère tant que celle-ci est encore en vie, coûte que coûte pour lui.

Romain perçoit cette attitude comme une tâche, comme un dû envers les efforts surhumains de Nina. Ainsi la justice est-elle ici en rapport direct avec une attitude de devoir et de responsabilité à la fois, qui est déterminée par la conscience. Si l’on tient compte des propos

de Steven M. Duncan126, la conscience n’aurait qu’un rôle intermédiaire chez l’individu dans l’assimilation de l’esprit justicier : le devoir consciencieux ou scrupuleux de rendre justice n’est souhaitable que dans une phase primaire car, au moment où l’individu s’est forgé une vie morale, le scrupule devient inutile. C’est la conclusion à laquelle aboutit Romain lui-même, mais seulement aux abords de [sa] quarantième année (L. Pr., 131.) ; par ailleurs, il pense acquérir à travers le scrupule la perfection: le narrateur met ici en liaison la perfection artistique avec le scrupule voire la perfection justicières, dont il se considère comme redevable à sa mère : J[Romain]’avais commencé à jongler à Wilno […]. J’avais continué depuis, en pensant surtout à ma mère, et pour me faire pardonner mon manque d’autres talents. (L. Pr., 130.) La jonglerie est ici métaphore de la perfection artistique mais également métaphore d’une vie parfaite, accomplie; Romain essaye de répondre aux efforts de sa mère par une pratique infatigable de la perfection qu’il pense atteindre encore de son vivant : J’ai essayé toute ma vie.

[…] peu à peu la vérité se fit en moi, et [que] je compris que la dernière balle127 n’existait pas. (L. Pr., 132.) Les propos du narrateur ne renient pas la possibilité de la perfection ; ils mettent en évidence le fait que l’homme, par sa condition fragile, ne peut véritablement qu’aspirer à la perfection, que ce soit dans le domaine de l’art ou de l’éthique - la perfection en tant que telle ainsi qu’une justice immanente parfaite ne sont pas à la portée de l’homme.

b.) Défi à la justice et justice anticipée

La justice métaphysique à laquelle se fie Nina se traduit pour elle généralement par un défi. Le passage, où elle veut imposer du respect à ses colocataires à Wilno en leur affichant les qualités de son fils et en le présentant devant eux comme sur une scène de théâtre, en est un exemple. Nina intervient ici de force et invoque la justice à ses côtés dans la réalisation de ses plans d’avenir. Bien qu’elle continue de se fier à la justice métaphysique, dans le cas présent elle éprouve la nécessité d’agir et d’accélérer le destin et la justice en sa faveur: - Sales petites punaises bourgeoises ! vous ne savez pas à qui vous avez l`honneur de parler ! Mon fils sera ambassadeur de France, chevalier de la Légion d`honneur, grand auteur dramatique […].

(L. Pr., 52.) La scène qui est illustrée par cette citation met en valeur deux sortes de justice : premièrement, Nina considère comme légitime le fait de se défendre de cette façon contre la rumeur qui court parmi ses voisins, à savoir qu’elle serait une voleuse, et contre les visites inutiles de la police appelée en cette raison par ses colocataires. La scène est en deuxième lieu

126 Steven M. Duncan, A Primer of Modern Virtue Ethics, Universitiy Press of America, Lanham. New York.

London, 1995, p. 107: […] conscientious action belongs only to the intermediate stage between parental direction and moral maturity; it is a crucial activity at a crucial period of one’s life, but one which can be safely be left behind once the virtues themselves are firmly rooted in our souls.

127 métaphore pour la perfection.

un appel adressé à la justice métaphysique et à la légitimité de la matérialisation de ses propres rêves. Or le cadre dans lequel se passe tout l’incident est bien paradoxal : Nina et son fils ne sont encore que des réfugiés sans ressources et sans un statut social bien défini et donc le seul salut et la seule justice qui lui reste dans ces circonstances est la foi dans ses rêves et ses projets d’avenir. Ce qui, de plus, frappe, c’est l’affirmation du narrateur grâce à laquelle nous apprenons que la déclaration de la mère, que nous venons de citer, s`est en grande partie réalisée, puisqu`au moment où il écrit ce récit, il détient quelques titres importants en France. Dans ce cas, la situation paradoxale de jadis s`est bel et bien transformée en réalité, quelques dizaines d`années plus tard. Il y a dans ce passage surtout l’intuition et la conviction intérieure de la mère qu’elle peut imposer la justice vis-à-vis de ses ennemis avec la destinée glorieuse de son fils qu’elle leur présente d’avance : on peut parler d’une justice anticipée, vue comme telle par Nina. Pour les colocataires de l’immeuble, ce geste est perçu comme ridicule et insensé, de sorte qu’à leurs yeux il n’a aucune valeur et encore moins une valeur justicière. Le personnage de l’enfant, lui, ressent cette scène comme une humiliation et comme un défi à la fois ; le geste de sa mère ne se présente pas encore à son esprit comme un acte justicier. Ce n’est que lorsqu’il devient adulte que le narrateur se rend compte qu’au fond, Nina avait initié cette scène à bon escient, puisqu’elle savait (L. Pr., 53.) que le devenir de son fils serait brillant et qu’il désamorcerait ainsi les injustices subies par elle. La justice métaphysique à laquelle se fie Nina relève de l’éthique classique, cependant ses nombreuses interventions à précipiter le destin ainsi que ses défis constants envers la divinité rapprochent son attitude de l’éthique postmoderne. Ce n’est pas un personnage résigné, qui attend des miracles justiciers, mais, par contre, elle s’implique d’une manière acharnée dans sa quête de la justice, au prix de créer des situations ridicules. De plus, son engagement n’est pas égoïste, il est surtout adressé à son fils, et, à ce terme, le ridicule et le paradoxal ne la gênent plus.

b.1. La justice et les effets paradoxaux de la raillerie

Le passage avec les colocataires de Wilno est crucial pour le devenir de R.omain, pour sa perception de la justice et, non en dernier lieu, pour l’œuvre de justice de lui et de sa mère.

Si l’on se penche plus attentivement sur la scène qui vient de se dérouler, on constate que Romain se forge dès son enfance une image paradoxale de la justice. Le narrateur réalise que la seule solution qui se présentait à lui, à cet âge, contre d’autres attaques possibles de moquerie et d’humiliation, était en effet de tâcher de devenir une personne importante et puissante par son statut social ; il fallait donc poursuivre les consignes de sa mère. Le

narrateur explique qu’à ce moment, ce ne fut pas tant l’idée de justice qui le poussa à acquérir plus tard divers titres de grande envergure, mais plutôt la nécessité d’échapper pour toujours à l’obsession des rires moqueurs et menaçants des anciens colocataires polonais. Or, poursuivant la mise en œuvre du rêve de grandeur de sa mère, le narrateur accomplit involontairement un acte de justice.

Le narrateur affirme, par ailleurs, que c’est grâce à ces rires moqueurs qu’il est devenu la personne célèbre de l’époque où il écrit ce récit : Je crois qu’aucun événement n’a joué un rôle plus important dans ma vie que cet éclat de rire qui vint se jeter sur moi, dans l’escalier d’un vieil immeuble de Wilno […]. Je lui dois ce que je suis : pour le meilleur comme pour le pire, ce rire est devenu moi. (L. Pr., 53.) Ces propos sont paradoxaux : l’auteur avoue, d’un côté, qu’il dédie son devenir à sa mère et à leur cause commune de justice ; de l’autre côté, c’est l’obsession de

Le narrateur affirme, par ailleurs, que c’est grâce à ces rires moqueurs qu’il est devenu la personne célèbre de l’époque où il écrit ce récit : Je crois qu’aucun événement n’a joué un rôle plus important dans ma vie que cet éclat de rire qui vint se jeter sur moi, dans l’escalier d’un vieil immeuble de Wilno […]. Je lui dois ce que je suis : pour le meilleur comme pour le pire, ce rire est devenu moi. (L. Pr., 53.) Ces propos sont paradoxaux : l’auteur avoue, d’un côté, qu’il dédie son devenir à sa mère et à leur cause commune de justice ; de l’autre côté, c’est l’obsession de