• Keine Ergebnisse gefunden

Le juriste et le magistrat judiciaire

Im Dokument Sur les pas de Virgile Rossel (Seite 21-24)

I

Comme la

plupart

de ses devanciers et de ses après-venants, en

qualité de

juriste,

Virgile Rossel a débuté modestement. Malgré les appels pressants de la Muse,

il

a su organiser ses études de

droit

sans perte de temps notable, puisque, bachelier en 1876,

il

devenait

déjà avocat bernois en 1881, après avoir coiffé le bonnet de docteur en

droit

en 1879. Sa thèse sur les traités

d'extradition

de la Suisse

est modeste. On sait peu de choses sur son

activité

d'avocat

prati-quant à Courtelary, qui n'a duré que deux ans à peine, sinon

qu'il était

expéditif et que le développement de son étude s'annonçait bien.

Par ses écrits, en revanche, on apprend

qu'il

ne

goûtait

qu'un plaisir

relatif

à ce genre d'activité.

A

l'Université

de Berne,

il

enseigne le

droit,

d'abord le

droit

français, puis le

droit civil

suisse. Les renseignements que nous avons pu recueillir auprès de quelques-uns de ses anciens étudiants sont très élogieux. Son enseignement

était

clair, bien construit ; ses défi-nitions étaient précises, et son raisonnement impeccable.

Il

exposait

les grandes lignes et ne s'arrêtait pas aux détails. Accessible aux ques-tions de ses étudiants,

il

les examinait et répondait avec une grande bienveillance.

Aux

examens, sa bienveillance

était

également connue.

Mais

a-t-il

eu lui-même une grande satisfaction dans son ensei-gnement Nous n'avons pas de réponse exacte sur ce

point

; nous pouvons cependant l'admettre, car

il n'aurait

sans cela guère pu pratiquer cette profession pendant près de trente ans.

Il

ne

suffit

pas, en effet, au professeur de bien préparer ses cours,

il lui faut

encore présenter la matière à

l'étudiant

et l'intéresser à la vie

juri-dique du pays et aux grandes lignes du

droit. Il

doit capter son intérêt, car

l'étudiant

écoute librement, volontairement, et n'est plus tenu, comme au gymnase, de prendre des notes et de raconter dans une leçon ultérieure ce

qu'il

a appris pendant la précédente. La liberté d'enseignement et celle d'apprendre Le/w- Zerafrei/tetf »

j

comportent des avantages, mais aussi des inconvénients. Pour avoir quelque succès dans l'enseignement du

droit, il faut surtout

aimer

l'étudiant

et la jeunesse. Rien ne permet de dire que

Virgile

Rossel

y

ait manqué. Nous nous sommes cependant demandé pourquoi

il

n'a

pas

fait

davantage d'exercices pratiques avec ses étudiants. Les

pro-grammes de cours que nous avons consultés révèlent

qu'il

n'a guère pratiqué ce genre d'enseignement ; peut-être celui-ci

n'était-il

pas

encore en vogue à l'époque. Les exercices pratiques entretiennent un contact

étroit

entre le professeur et l'étudiant. Ils fournissent à ce

dernier l'occasion de résoudre des cas concrets sous la direction du professeur et ainsi de se former mieux à la pratique du barreau ou à l'exercice de la magistrature. En général, les étudiants aiment

ces exercices ; certains, les plus dynamiques, les préfèrent même aux cours. Au sujet des cours en général,

Virgile

Rossel s'est exprimé dans

le

Po/itücLej

/rt/wètt-c/t <Yer Atcfge-notj-gMJc/ta/r dans son

travail

sur

La

déwtocratî'e et jom éuoLttfo» '.

Il

a

dit

à cet égard : « Peut-être l'enseignement du

droit

à

l'uni-versité est-il

trop

sèchement

abstrait

ou trop froidement

utilitaire».

Il

trouve que disséquer imperturbablement des textes, c'est former

« des intelligences serves à la

lettre

et sourdes à la vie ». «

Il

manque

à cette jeunesse,

dit-il,

avec le sens aiguisé des réalités de sa tâche, avec la foi généreuse au rôle auguste de la loi, cette sorte d'entraî-nement moral que les universités négligent à l'excès. On

y

fabrique

des légistes. On ne

fait

pas des hommes. »

Il

est assez curieux que, dans ses œuvres,

il

ne soit pas davantage revenu sur son

activité

comme professeur de)

droit

; mais nous n'avons pas de raison d'admettre qu'elle ne lui convenait pas, au contraire.

En second lieu, et parallèlement à son enseignement,

Virgile

Rossel a collaboré très activement à la codification du

droit civil,

d'abord lorsqu'il s'est agi de conférer à la Confédération la compé-tence de légiférer sur

tout

le

droit civil,

puis lorsqu'il

fallut

mettre sur pied le Code

civil

suisse.

Il

a joui de l'immense privilège de collaborer directement avec le rédacteur du Code, le professeur Eugen Huber, de traduire le Code en français, d'assister aux séances des commissions d'experts, de participer à la rédaction de

l'avant-projet

et du

projet

du Conseil fédéral, puis de présenter le Code au Conseil national en

qualité de rapporteur de langue française pour une très large partie

de la matière. Toutes ces activités l'avaient

initié

complètement au

droit

nouveau. A tel

point

que lors de l'entrée en vigueur du Code

en 1912, il avait pu publier, en collaboration avec le professeur Mentha,

de Neuchâtel, son eAoif cfwzY

M««

et sa première édition

du Code annoté.

Il

est

jusqu'ici

le seul Romand a avoir tenté pareille publication.

C'est pendant cette période bernoise que sa production

juridique

est la plus intense. Comme on peut le

voir

par la liste des œuvres

"HfHques de

Virgile

Rossel, elle comprend plusieurs éditions du

Ma«/

r/w r/roft ciwlZ et

Jroft

dej oè/tgatfotw, un ouvrage histo-rique, deux discours de rectorat et quelques collaborations aux prin-cipales revues juridiques suisses. Ses manuels sont conçus selon le

1 Op. cit. année 1905, p. 230.

modèle des ouvrages de

droit

français, c'est-à-dire non selon un sys-tème scientifique serré, comme celui des ouvrages de langue allemande, mais en vue de l'analyse des articles du Code tels qu'ils se suivent

dans la loi. Virgile Rossel

dit

que son Mawwe/ de

droit

crut/

narre,

première édition,

n'était

à l'origne « qu'un modeste essai préparé et publié avant l'entrée en vigueur du Code, à un moment la nou-velle loi

n'avait

encore suscité aucun commentaire de quelque étendue et

il

n'existait pas de jurisprudence ». « La deuxième édition,

dit

l'auteur, est plus et mieux qu'un essai, sans que d'ailleurs nous nous

flattions

de

n'y

avoir laissé ni imperfections ni lacunes

\

» C'est un

des premiers manuels de

droit écrit

en Suisse, dans un style facile et dégagé. La pensée

n'y

est pas aussi concentrée que dans certains commentaires de langue allemande. Le d«.

droit

ctutZ r-zarre et celui du

droit

des obligations

furent

chaque fois bien accueillis dans toute la Suisse. La Suisse alémanique

était

heureuse

d'y

recourir, car pendant longtemps elle n'eut pas de manuel. Ces manuels ne remplacent naturellement pas les grands commentaires ; mais ils sont très utiles, notamment aux étudiants et à ceux qui veulent se

fami-liariser rapidement avec les principes généraux du

droit civil.

Ils sont encore régulièrement cités dans la bibliographie des thèses de doctorat en

droit civil.

Les autres

travaux

juridiques de

Virgile

Rossel sont essentiel-lement historiques. Le premier discours de rectorat se rapporte à un juriconsulte bernois du

XVIIL

siècle, Sigismond-Louis de Lerber, qui

fut

aussi professeur à

l'Université

de Berne, et également poète.

Vir-gile Rossel présente sa biographie et ses œuvres.

Il y fait

quelques discrètes allusions à son propre cas : « C'est un phénomène, non

point

unique, mais assez rare que cette persistance du bel esprit et

surtout

du rimeur chez un jurisconsulte

érudit

et un moraliste sévère.

Il

ne nous appartient évidemment pas de nous en étonner ni de nous en scandaliser. »

Et

d'ailleurs : «

Il

avait réussi à

unir

en

sa personne ce que d'autres jugeaient choses inconciliables : le Code et la Muse.

Il

ne semble pas que le Code

y ait

rien perdu ; la Muse

y

a

tout

gagné. »

Son second discours de rectorat a

trait

aux efforts accomplis en Suisse pour tenter la codification du

droit civil

sous le régime de la République helvétique de 1798-1802.

Quant au A/an««/ dtz

droit

ciztii de /a Swifte romande,

il

est le pendant, pour la Suisse romande, du Syrtem wnd Gerc/tic/tfe der Sc/tzeeiz. Priwafrec/ttr de Huber.

Il

contient l'analyse des principales

institutions

juridiques, du

droit

des cantons romands,

y

compris le Jura bernois, et prépare la codification du

droit civil

suisse.

Virgile

Rossel

fut

deux fois rapporteur à la Société suisse des juristes, sur

des sujets d'actualité, et ses rapports témoignent de l'estime de la

1 Préface de la Ile édition.

société pour lui. C'est en effet pour un

juriste

un grand honneur, doublé d'une charge de

travail

appréciable, que d'être sollicité par cette société

qui accomplit en Suisse un

travail

de pionnier dans

le secteur du

droit —

de présenter un rapport à son assemblée géné-raie. Ils sont extrêmement rares ceux qui à deux reprises se

virent

confier pareil mandat. Les autres publications de Virgie Rossel con-cernent des questions spéciales du droit,

II

Virgile

Rossel a exercé pendant

vingt

ans les fonctions d'un

ma-gistrat

judiciaire. De 1912 à 1932,

il

a servi dans la plus haute magistrature

judiciaire

du pays la cause de la justice. Pour pouvoir résumer en connaissance de cause cette

activité, il faudrait

avoir été constamment à ses côtés à la

IL

Section civile du

Tribunal

fédéral,

dans laquelle

il

siégea sans

interruption.

La vie du magistrat

judi-ciaire est dominée par le caractère anonyme de la fonction. Semaine après semaine, le juge fédéral prépare à

l'intention

de ses collègues

ses rapports dans les affaires qui lui sont confiées comme rapporteur et, en outre,

il

participe chaque semaine à la séance dans laquelle sont plaidées et jugées les causes de son ressort. Sa tâche, le juge

l'accom-plit

pour une bonne

part

dans le silence du bureau et à

l'abri

de

Im Dokument Sur les pas de Virgile Rossel (Seite 21-24)