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Im Dokument INTEGRATION AND THE STATE (Seite 151-167)

D’ISLAM (VII

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–IX

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SIÈCLES)

Ahmed oulddali MSH-nantes/relmin

La christianisation de l’empire byzantin à partir du ive siècle affaiblit consirablement les cultes païens qui disparurent progressivement des territoires dé-sormais dans le giron de l’Église. Cependant, depuis l’antiquité, le paganisme possédait d’autres centres florissants en orient parmi lesquels se trouvait le Ḥiğāz.

Cette vaste région désertique de l’Arabie centrale est demeurée majoritairement polythéiste, même si elle comptait parmi sa population nombre de chrétiens et de juifs. organisé autour de la Mecque qui en abritait le principal sanctuaire, le polythéisme arabe se caractérisait par le culte des astres, des pierres et des arbres sacrés. Il accordait aussi une place très importante aux djinns, au mauvais œil ainsi qu’aux esprits des morts en raison de leur l’influence supposée sur la vie de l’in-dividu et de sa famille1. Ses institutions et ses pratiques étaient particulièrement adaptées au mode de vie tribal des bédouins. Ainsi, parmi les nombreuses divinités qui constituaient son panthéon, certaines étaient vénérées par une tribu ou un clan spécifique, d’autres faisaient l’objet d’un culte partagé par tous2. beaucoup d’entre elles avaient leurs statues dressées à La Mecque, notamment autour du sanctuaire de la Kaʿba. véritable pivot du paganisme arabe et haut lieu de pèleri-nage, celui-ci recevait les offrandes des visiteurs venant de toute la Péninsule. Les Mecquois, dont la subsistance dépendait essentiellement du commerce, tiraient profit de leur proximité avec le sanctuaire ainsi que des foires se tenant dans la cité3.

La domination païenne s’est maintenue jusqu’à l’apparition de l’islam pendant la première moitié du viie siècle. La nouvelle religion, résolument

1 Sur les particularités de l’ancienne religion de l’Arabie, voir T. Fahd, Le Panthéon de l’Arabie centrale à la veille de l’Hégire, Paris, geuthner, 1968, p. 2‒31 ; Ch. J. robin, « South Arabia, religion in Pre-Islamic », Encyclopaedia of the Qur’ān, Leyde, brill, 2001‒2006, v, p. 90 ; r. g. Hoyland, Arabia and the Arabs: From the Bronze Age to the coming of Islam, Londres, routledge, 2001, p. 139‒166.

2 Pour les divinités vénérées en Arabie antéislamique voir Ibn al-kalbī (Hishām b. M.), Kitāb al-aṣnām, éd. A. Zakī bāshā, Le Caire, Dār al-kutub al-miṣriyya, 1924, p. 5‒64 ; J. Wellhausen, Reste Arabischen Heidentums, berlin, g. reimer, 1897, p. 13‒64 ; T. Fahd, op. cit., p. 37‒200.

3 Ibn Hishām (ʿAbd al-Malik), al-Sīra al-nabawiyya, éd. Muṣṭafā al-saqqā, Le Caire, Maktabat Muṣṭafā bābī al-Ḥalabī, 1955, I, p. 123‒130 ; M. J. kister, « Some reports concerning Mecca from Jāhiliyya to Islam », JESHO, 15 (1972), p. 76‒93.

monothéiste, s’imposa en Arabie au terme d’une longue lutte qui s’acheva en l’an 8/630 avec la prise de La Mecque et la destruction des idoles. Cet évènement marqua la fin de la présence polythéiste dans le Ḥiğāz. Les Arabes se convertirent à l’islam et leurs anciens cultes furent interdits. La Kaʿba qui selon la tradition musulmane fut construite par Abraham, le père des croyants, et son fils Ismāʿīl, devint le premier lieu saint de l’Islam, celui en direction duquel prient tous les fidèles. Désormais, le pèlerinage s’y effectue selon des règles fixées par le Coran et la tradition du Prophète, même si certains de ses rites existaient déjà à l’époque antéislamique.

Il n’est pas nécessaire de rappeler ici les différentes phases de la lutte qui a précédé le triomphe de la religion musulmane en Arabie ni de s’attarder sur les batailles ayant opposé Muḥammad aux Mecquois hostiles à sa prédication.

notre objectif à travers cet essai consiste en effet à examiner l’attitude de l’Islam envers les polythéistes de la Péninsule arabique et des autres régions qu’il conquit pendant les premiers siècles de son histoire. Pour ce faire, il convient d’étudier en premier lieu le traitement réservé aux polythéistes dans le Coran qui, faut-il le rappeler, est le Livre fondateur et la principale source du droit musulman. Dans un second temps, nous nous intéresserons au statut de cette catégorie de non-mu-sulmans tel qu’il fut considéré par les différentes écoles de jurisprudence (fiqh).

Le Coran et les polythéistes

Si le Coran critique de manière directe ou indirecte toutes les croyances pré-sentes en orient au moment de sa révélation, il ne leur réserve pas le même traitement. En effet, certaines d’entre elles y sont jugées moins sévèrement que d’autres, compte tenu de leur origine et de la proximité qu’elles présentent avec la foi naissante. Dans le panorama des religions mentionnées dans le texte cora-nique, le polythéisme occupe une place particulière, non seulement en raison de son incompatibilité évidente avec le monothéisme islamique, mais aussi à cause de l’attitude franchement hostile que manifestèrent ses adeptes à l’encontre de la prophétie de Muḥammad. De nombreux versets dénoncent les cultes païens tels qu’ils étaient pratiqués en Arabie, insistant notamment sur le fait que leurs adeptes associent d’autres divinités au Dieu créateur. Cette association (shirk) est considérée comme une injustice énorme (Coran 31,13). g. Monnot écrit à ce propos : « Le shirk est un crime de lèse-majesté. Affirmer que Dieu a un associé (sharīk) dans la divinité, c’est poser face à Lui un égal, c’est-à-dire un rival. C’est un acte politique qui attente aux droits de l’absolutisme divin. »4. Les hommes

4 g. Monnot, « Les dieux dans le Coran », in Scholarly Approaches to Religion, Interreligious Perceptions, and Islam, ed. J. Waardenburg, Paris, berlin, P. Lang [Studia religiosa Helvetica, 1], 1995, p. 258. Sur

qui commettent une telle transgression n’auront droit à aucun pardon. Le Coran le dit clairement : « Certes, Allah ne pardonne pas qu’on Lui donne des associés.

À part cela, Il pardonne à qui Il veut. Quiconque donne des associés à Allah s’égare, très loin dans l’égarement »5. Seuls ceux qui se rendent à l’évidence et embrassent l’islam verront leurs fautes effacées (Coran 9, 5).

Il est à noter que le terme d’associateurs (mushrikūn), pris dans un sens plus large, peut s’appliquer non seulement à tous les païens mais aussi aux juifs et aux chrétiens à qui le Coran reproche d’avoir compromis leur foi monothéiste en donnant des fils à Dieu. Cette conception étendue du shirk se rencontre chez certains auteurs musulmans. C’est ainsi que, dans son commentaire coranique, Fakhr al-Dīn al-rāzī (m. 606/1210) déclare : « Il n’y a pas de différence entre celui qui adore une idole et celui qui adore Jésus ou d’autres êtres. Le mot shirk (association) veut simplement dire que l’homme prend, en plus de Dieu, un autre être qu’il adore. Si cette situation est réalisée, c’est l’association »6. nous avons là un exemple significatif du glissement sémantique des mots shirk et mushrikūn qui, dans un contexte polémique, finissent par définir des croyances diverses et variées, allant des religions bibliques, hindoues et animistes à certaines doc-trines confessées, au sein même de l’Islam, par les courants considérés comme hétérodoxes7.

Cependant, dans l’usage coranique le plus fréquent, le terme d’associateurs désigne les polythéistes. Les juifs et les chrétiens, quant à eux, sont respectivement appelés yahūd et naṣārā. Ils sont aussi nommés gens du Livre (ahl al-kitāb), en référence aux Écritures bibliques, la Torah et l’Évangile, dont ils se réclament et que le Coran reconnaît comme des révélations antérieures à lui. De cette déno-mination dérive le qualificatif de kitābī, appliqué par les auteurs musulmans aux membres des confessions juive et chrétienne. nous allons voir que la distinction entre mushrikūn et ahl al-kitāb ne se limite pas aux termes employés ; elle se tra-duit aussi dans les faits.

Le Coran polémique longuement contre les mushrikūn. Il réfute leurs croyances et tourne en dérision leurs idoles qu’ils sculptent eux-mêmes et qui n’ont le pouvoir de faire ni le bien ni le mal (Coran 37, 95 ; 25,55). Il les ac-cuse également de s’obstiner à adorer des divinités multiples alors qu’au fond

l’association (shirk) dans le Coran, voir D. gimaret, « Shirk », EI2, IX, p. 503 ; g. r. Hawting, « Idolatry and Idolaters », Encyclopaedia of the Qur’ān, op. cit., II, p. 475‒480.

5 Coran 4, 116. Ici, comme pour les autres versets coraniques cités dans cette étude, nous utilisons la traduction de kazimirski.

6 Al-rāzī (M. b. ʿUmar Fakhr al-Dīn), al-Tafsīr al-kabīr, Le Caire, al-MaṭbaʿaṭbaCbahiyya, 1938, XvI, p. 33 ; voir également J. Jomier, « Unité de Dieu, chrétiens et Coran selon Faḫr al-Dīn al-rāzī », Islamochristiana, 6 (1980), p. 153.

7 Sur ce sujet, g. r. Hawting, « Širk and “Idolatry” » in Monotheist polemic », Israel Oriental Studies, XvII (1997), p. 107‒126.

d’eux-mêmes, ils savent que c’est Dieu seul qui les a créés8. Plus tard, la tradition extra-coranique s’est efforcée d’expliquer ces accusations en les rattachant à des pratiques qui auraient existé chez les Arabes, comme la fabrication de figurines représentant des divinités et les divers rituels exercés à La Mecque et au sein des tribus9.

En critiquant ouvertement les cultes idolâtriques, Muḥammad s’attire la haine des notables de sa propre tribu, les qurayshites. Ces derniers s’en prennent aux musulmans, les contraignant à s’exiler, d’abord en Abyssinie chrétienne, puis à Médine. C’est alors que le Prophète reçoit l’ordre de lutter contre les polythéistes par tous les moyens, y compris par la guerre. Certains versets appellent explicite-ment à les combattre jusqu’à ce qu’ils se convertissent à l’islam, comme en 9, 5 :

« Après que les mois sacrés expirent, tuez les associateurs où que vous les trouviez.

Capturez-les, assiégez-les et guettez-les dans toute embuscade. Si ensuite ils se repentent, accomplissent la Salat et acquittent la Zakat, alors laissez-leur la voie libre, car Allah est Pardonneur et Miséricordieux ». Mais dans la même sourate, le Coran recommande aux musulmans de respecter les pactes conclus avec les polythéistes et d’accorder leur protection à quiconque la sollicite. Il s’agit des versets 9, 4 : « À l’exception des associateurs avec lesquels vous avez conclu un pacte, puis ils ne vous ont manqué en rien, et n’ont soutenu personne [à lut-ter] contre vous : respectez pleinement le pacte conclu avec eux jusqu’au terme convenu...» et 9, 6 : « Si un polythéiste cherche asile auprès de toi, accueille-le pour lui permettre d’entendre la Parole de Dieu ». La possibilité de traiter avec les polythéistes n’est donc pas complètement écartée, comme en témoignent ces deux derniers textes.

Dans le verset 9, 5 cité précédemment, la conversion des associateurs à l’islam est donnée comme condition préalable à l’arrêt du combat sacré (ğihād) contre eux. Ceux qui refusent de se faire musulmans n’auront d’autres alternatives que la mort. Un tel traitement ne vaut pas pour tous les non-musulmans. En effet, les juifs et les chrétiens sont régis par des règles différentes. C’est ce qui ressort du verset 29 de la sourate 9 : « Combattez ceux qui ne croient ni en Allah ni au Jour dernier, qui n’interdisent pas ce qu’Allah et Son messager ont interdit et qui ne professent pas la religion de la vérité, parmi ceux qui ont reçu le Livre, jusqu’à ce qu’ils versent la capitation par leurs propres mains, après s’être humiliés ».

8 Selon le Coran, les Polythéistes n’attribuent pas à leurs divinités le pouvoir de créer ; ils les considèrent seulement comme des associés à Dieu et des intercesseurs auprès de Lui (Coran, 29, 61‒65). C’est pour-quoi, dans la tradition musulmane, l’ancienne religion d’Arabie est souvent présentée comme une altéra-tion du monothéisme d’Abraham. Cf. g. r. Hawting, The Idea of Idolatry and the Emergence of Islam.

From Polemic to History, Cambridge, University Press, 1999, p. 23‒25.

9 g. r. Hawting, The Idea of Idolatry, op. cit., p. 106‒108.

Ici, la conversion à l’islam n’est pas exigée des infidèles. Ceux-ci peuvent donc conserver leur religion dès lors qu’ils reconnaissent la souveraineté musulmane et s’engagent à verser la capitation (ğizya). Les gens du Livre qui acceptent ces conditions obtiennent le droit de vivre en paix dans la cité musulmane. Ils béné-ficient d’une protection (dhimma) comprenant la sauvegarde de leurs personnes et de leurs biens ainsi que la liberté religieuse. Ce statut accordé aux juifs et aux chrétiens sur la base du Coran (5, 29) n’a pas d’équivalent pour les polythéistes dont les cultes ne sont pas reconnus.

La distinction qu’établit l’Islam entre les associateurs, d’une part et les kitābī-s d’autre part, se constate aussi dans d’autres domaines. Ainsi, par exemple, un homme musulman peut légalement épouser une juive ou une chrétienne, en re-vanche, il lui est défendu de prendre femme parmi les associateurs. La nourriture de ces derniers est également interdite aux musulmans, contrairement à celle des gens du Livre10. Ces règles sont fondées sur des textes coraniques explicites, tels que les versets 2, 221 et 5, 5, ainsi que sur la sunna.

Il y a donc une différence évidente dans le traitement des deux catégories de non-musulmans. Pour mieux comprendre l’attitude de l’Islam à l’égard de chacune d’elles, il faut remonter à la période fondatrice, celle du Prophète et des premiers califes.

Mushrik et kitābī

Dès l’époque de Muḥammad, on voit se dessiner les traits de ce qu’allait être le statut des populations non-musulmanes vivant dans les territoires conquis par les musulmans. Si l’on en croit l’historiographie musulmane11, le Prophète avait lui-même négocié et conclu des traités de paix avec les représentants de plusieurs localités chrétiennes situées dans la Péninsule arabique. Ce fut le cas avec les ha-bitants de nağrān, de bahreïn, d’Ayla et de Dumat al-ğandal. Les accords en question stipulaient que les chrétiens devaient acquitter une taxe fixe, versée en

10 Il s’agit en particulier des viandes. La consommation en est licite si l’animal est abattu par un juif ou un chrétien et illicite s’il est abattu par un polythéiste. Aussi, parmi les interdits alimentaires mentionnés dans Coran 5, 3, figurent les viandes d’animaux consacrés à une divinité autre qu’Allah. Pour les exégètes musulmans, les divinités dont il s’agit dans ce verset sont celles que vénèrent les idolâtres et à qui ils font des offrandes ; voir par exemple, Qurṭubī (M. b. Aḥmad), Ğāmiʿ li-aḥkām qur’ān, éd. ʿA. al-Turkī, beyrouth, Mu’assasat al-risāla, 2006, vII, p. 285‒286 ; M. H. benkheira, « Chairs illicites en Islam.

Essai d’interprétation anthropologique de la notion de mayta », Stud. Isl., 84 (1996), p. 7‒8.

11 Les sources historiographiques musulmanes les plus anciennes datent du début du ixe siècle. Les in-formations qu’elles fournissent sur l’époque du Prophète sont à prendre avec précaution, étant donné la longue période les séparant des événements relatés. v. à ce sujet, Th. bianquis, P. guichard et M. Tillier, Les débuts du monde musulman, viie–xe siècle. De Muḥammad aux dynasties autonomes, Paris, PUF, 2012, p. 12 ; A.-M. Eddé, F. Micheau et Ch. Picard, Communautés chrétiennes en pays d’Islam. Du début du viie siècle au milieu du xie siècle, Paris, SEDES, 1997, p. 55.

espèce ou en nature12. En échange de quoi, les musulmans s’engageaient à garantir leur sécurité et celle de leurs biens. Des conventions similaires eurent lieu avec les juifs de khaybar, de Fadak et de Wādī al-Qurā en vertu desquelles les habitants de ces oasis pouvaient continuer à cultiver leurs terres, moyennant le versement de la moitié des récoltes13.

Après la mort du Prophète, les califes orthodoxes maintiennent ces traités et en concluent d’autres avec les populations des pays conquis. Le dispositif prévu initialement pour les juifs et les chrétiens sera étendu aux adeptes des religions sa-béenne et zoroastrienne. bien qu‘ils ne soient pas à proprement parler des mono-théistes, les zoroastriens se virent assimilés aux gens du Livre. on leur octroya les mêmes droits que ces derniers, mais il n‘était pas permis aux musulmans d‘épouser leurs femmes ou de consommer leur nourriture14. Les pays conquis obéissaient à un régime différent selon qu’ils fussent pris par traité (ṣulḥ) ou de vive force (ʿanwa). Les habitants des territoires relevant de la première catégorie se voyaient accorder davantage de libertés, notamment en ce qui concerne la pratique de la religion15. L’autonomie administrative et judiciaire dont ils bénéficiaient per-mettait à chaque communauté d’organiser la vie quotidienne de ses membres selon ses propres lois et coutumes16. À partir du viiie siècle, les juristes musul-mans élaborèrent le statut des sujets « protégés » (dhimmīs) en s’appuyant sur le Coran et sur la tradition du Prophète et en s’inspirant des mesures prises sous les premiers califes.

Si l’on revient maintenant aux polythéistes, on constate que leur situation n’avait rien de commun avec celle des Ahl al-kitāb. En effet, la prise de la Mecque et les guerres d’apostasie (ḥurūb al-ridda) menées par le premier calife, Abū bakr (r. 632‒634), précipitèrent la disparition des cultes païens de la Péninsule arabique.

Les adeptes de ces cultes avaient cessé d’exister en tant que groupe social distinct, contrairement aux juifs et aux chrétiens qui constituaient encore des commu-nautés bien établies. Dès lors, la question du statut des polythéistes ne se po-sait même pas. C’est du moins l’opinion exprimée par Ibn Qayyim al-Ğawziyya

12 Sur ces traités, al-balādhurī (A. b. Ğābir), Futūḥ al-buldān, éd. ʿAbdallah al-Ṭabbāʿabbāllah al-Mu’as-sasat al-maʿārif, 1987, p. 83‒106 ; A. Fattal, Le statut légal des non-musulmans en pays d’Islam, beyrouth, Dar el-Machreq, 1986, p. 18‒24.

13 Al-balādhurī, Futūḥ, op. cit., p. 23‒41 ; Abū Yūsuf (Yaʿqūb b. Ibrāhīm), Kitāb al-kharāğ, beyrouth, Dār al-maʿrifa, 1989, p. 50‒51 ; W. kallfelz, Nichtmuslimische Untertanen im Islam: Grundlage, Ideologie und Praxis der Politik frühislamischer Herrscher gegenüber ihren nichtmuslimischen Untertanen mit besonderem Blick auf die Dynastie der Abbasiden (749‒1248), Wiesbaden, Harrassowitz, 1995, p. 19‒22.

14 voir Abū Yūsuf, Kitāb al-kharāğ, op. cit, p. 129 ; Al-Shāfiʿī (M. b. Idrīs), al-Umm, Maktabat al-kulliyyāt al-azhariyya, 1961, Iv, p. 241 ; A. Fattal, Le statut légal, op. cit., p. 13 ; 133 ; W. kallfelz, Nichtmuslimische Untertanen im Islam, op. cit., p. 91.

15 Abū Yūsuf, Kitāb al-kharāğ, op. cit., p. 138‒140.

16 voir A. Fattal, Le statut légal, op. cit., p. 13 ; J.-C. garcin (éd.), États, sociétés et cultures du monde mu-sulman médiéval (xe-xve siècle). III. Problèmes et perspectives de recherche, Paris, PUF, 2000, p. 136.

(m. 751/1350) dans son K. Aḥkām ahl al-dhimma. Cet auteur ḥanbalite souligne, en effet, que le verset instaurant la ğizya fut révélé à la suite de l’expédition de Tabūk qui eut lieu en l’an 09/630, soit après la conquête de La Mecque. or à cette date, le paganisme arabe avait été vaincu et ses adeptes s’étaient convertis à l’islam. C’est la raison pour laquelle, ajoute-t-il, ni le Prophète ni ses successeurs immédiats n’ont eu à se préoccuper du sort des polythéistes17. Les autorités mu-sulmanes de l’époque avaient fort à faire pour administrer les vastes territoires conquis en Syrie, en Égypte et en Perse, dont la population était majoritairement chrétienne ou zoroastrienne.

Avec la poursuite des conquêtes et leur progression rapide, notamment à l’époque umayyade, l’islam ne tarda pas à atteindre des nouveaux territoires ha-bités par des peuples païens, ou considérés comme tels. Ce fut le cas dans cer-taines parties de l’Asie et de l’Afrique où se pratiquaient divers cultes, de type bouddhiste, hindou ou animiste, que les musulmans assimilaient généralement au polythéisme et à l’idolâtrie. L’État califal procéda avec ces nouvelles populations de différentes manières, selon leur nombre et les circonstances de la prise de leurs villes. Il semble néanmoins que, dans beaucoup d’endroits, on adopta envers les habitants des régions concernées la même politique que celle concernant les gens de Livre, en leur appliquant les conditions de la dhimma18.

Pour le pouvoir central, cette solution était la mieux adaptée à la situation et la plus aisée à mettre en œuvre. Elle permettait d’insérer les provinces nouvellement conquises dans le cadre administratif et fiscal déjà existant. Mais chez les juristes, l’élargissement du champ d’application des lois de protection pour y inclure les populations païennes ne faisait pas l’unanimité. La raison en est, nous allons le voir, l’absence dans la sunna de cas pouvant servir de précédents.

Pour le pouvoir central, cette solution était la mieux adaptée à la situation et la plus aisée à mettre en œuvre. Elle permettait d’insérer les provinces nouvellement conquises dans le cadre administratif et fiscal déjà existant. Mais chez les juristes, l’élargissement du champ d’application des lois de protection pour y inclure les populations païennes ne faisait pas l’unanimité. La raison en est, nous allons le voir, l’absence dans la sunna de cas pouvant servir de précédents.

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