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L'INSTRUCTION PUBLIQUE SOUS LE PREMIER EMPIRE

Quelle fut la place du français dans les programmes scolaires du ci-devant Evêché de Bâle avant son rattachement à la Suisse, en 1815?

Transformé en Ecole centrale, le Collège de Porrentruy continua la tradition des pères jésuites. Elle fut remplacée en 1804 par une école secondaire municipale de valeur, les maîtres principaux étant restés à leur poste. Le latin y était toujours privilégié, mais les écrits d'anciens élèves, ceux de Xavier Stockmar en particulier, attestent qu'ils maîtri-saient parfaitement la langue française.

Dans tout l'Empire, l'enseignement public était confié à l'Université.

En 1808, l'Académie de Strasbourg, dont dépendait le département du Haut-Rhin, comprenait les collèges de Colmar, ci'Altkirch, de Belfort et de Porrentruy, auxquels vinrent s'ajouter, en 1810, celui cle Montbéliard

et, en 1812, celui de Delémont. Ces collèges étaient des écoles secon-claires communales où l'on enseignait les éléments des langues anciennes et les principes de l'histoire et des sciences.

Le Collège de Delémont était dirigé par le Père François Berbier. Cet humaniste accorda une place de choix à l'enseignement du français.

Mais il n'est pas possible d'en apprécier les effets, la période française n'ayant duré que treize mois pour cet établissement.

L'Académie de Strasbourg comprenait également les Petites Ecoles ou écoles primaires. On y enseignait à lire, à écrire, et les premières notions du calcul. La classe était généralement tenue deux fois par jour de la Toussaint (ou de la Saint-Martin) à Pâques, et une fois par jour de Pâques à la Pentecôte.

Le rapport du sous-préfet de Porrentruy, clu 29 août 1812, fait état du salaire très modique des instituteurs: «Souvent ceux qui offrent de tenir l'école au moindre prix (environ 200 francs par an) sont nommés. Ce ne sont ni les plus dignes, ni les plus capables». Plusieurs communes ne peuvent satisfaire aux exigences de la loi: «Il ne s'est présenté aucun instituteur pour apprendre la langue françoise dans notre

com-mune»54. Quelques postulations de maîtres d'école sont bourrées de fautes d'orthographe.

Dans l'arrondissement de Delémont, 19 communes sur 106 sont pri-vées d'école primaire. Le 19 mai 1812, le sous-préfet constate que

«l'instruction primaire est généralement négligée dans les communes rurales de l'arrondissement, mais plus particulièrement dans les com-munes catholiques. Cet état d'abandon par le défaut d'instituteurs ins-truits et cette première cause dérive déjà de la modicité des traitements qui sera toujours un obstacle à ce que l'homme instruit se voue à cet état pénible; ainsi l'instruction est entre les mains de malheureux qui à peine connaissent les premiers éléments de l'écriture. Une autre cause

est la négligence et la nonchalance des parents à envoyer leurs enfants régulièrement en classe. Souvent leur pauvreté est le motif de cette négligence, clans le but de ne pas payer la rétribution convenue à l'ins-tituteur, enfin c'est la courte durée de la tenue de la classe que les élèves ne fréquentent que pendant les mois d'hiver. Il ne faut pas confondre avec les cantons de Bienne, Moutier, Delémont et Lauffon, dont on vient de trouver le tableau sous ce rapport, le canton de Cour-telary où les instituteurs méritent des éloges. Les communes de ce can-ton ont généralement à la tête de leurs écoles des hommes instruits et ayant toutes les connaissances que demande leur état. La jeunesse y fait des progrès et en sort avec les connaissances propres à la profes-sion qu'elle doit embrasser. On assure que ce succès est dû aux fonds qui ont été faits aux écoles pour assurer aux instituteurs un traitement convenable»55.

Si donc l'on excepte le canton de Courtelary et les villes de Delé-mont et de Porrentruy «l'instruction est aussi soignée que dans les écoles supérieures», les sous-préfets en arrivent à la conclusion que «la plus grande partie des jeunes gens de la campagne savent à peine lire et écrire et très peu de calcul; les autres restant dans la plus grande ignorance».

Ainsi, contrairement à ce que l'on pourrait supposer, le rattachement

à la France de l'ancienne Principauté épiscopale de Bâle n'y fit pas beaucoup progresser la langue française.

P.//.

Pierre Pfewty (Porren/ruy), c/?roragueur au Quotidien jurassien, est

/'auteurnfep/us/eurs outragessur/epar/er rég/oua/.

NOTES:

1TROUILLAT, I, 385.

2 Cette thèse a été reprise dans l'Awteo/ogze /wrâss/éwwe, SJE, Porrentruy, 1969, t. 1, p. 17.

3RAIS, André: Ztere d'or des_/amz7/es dup<ra, Ed. du Jura, Porrentruy, 1968, t. 1, p. 352.

-1TROUILLAT, V, 7.

5ZzPred'or..., op. cit., t. 1, p. 353.

6 -Les plus anciennes chartes en langue vulgaire rédigées en Ajoie», in Mé/anges de /Mtgzz/srtgae e/ de/t/n'fo/cgfe rowawes offerts dzV/gr P/emz Gardel/e, Travaux de linguistique et de littérature, Strasbourg, 1966, pp. 197-206.

7Z}/c//oM77aM-egéogra/>/?/f7«i? de /aSP/sse, Neuchâtel, 1908, t. 5, p. 262.

8RICHÉ, Pierre: Fcofes et ewsezgnementda/zs fe PTaa/A/openAge, Paris, 1979, p. 262.

9 WALZER, Pierre-Olivier: VzedesSax'wfs dt«/ara, Réclère, 1979, p. 279.

toLes précisions qui suivent, concernant l'enseignement dans le Haut Moyen Age, m'ont été communiquées par Pierre Riché, professeur honoraire à l'Uni-versité de Paris X. On trouvera d'autres précisions dans son livre, op. cit. pp.

227 à 236 notamment.

11TROUILLAT, I, 241.

12TROUILLAT, III, p. 790.

13TROUILLAT, III, p. 835.

h GRESSOT, Jean et RAIS, André: Porrera/rap, w'//e /rapér/'afe, Genève, 1956, p. 85. Voir aussi FOLLETÊTE, Eugène: Z'éco/eparo/ss/â/e dazzs /a Prmc/paM/é de /'Ffêcitéde Sd/ey/zspw /a Z&gü/aft'on, Porrentruy, 1946.

15KÖHLER, Xavier: «Note sur les écoles primaires de Porrentruy, du XVU siècle jusqu'à nos jours» in: /ÎS/F, 1873, p. 108.

16RICHÉ, Pierre, op. cit., p. 223.

12 FURET, François et OZOUF, Jacques: Lire e? écrire, /'a/pPaèéh'sadow des Frappaisde Ca/wn à/idesFerry, Paris, 1977, p. 89.

is Z'esco/eparoissiale om /a «zam'êre de feie« zwstrazre les ezr/azzte daws /es pefiies éco/es par un prêtre d'une paroisse de Paris, 1654, ouvrage cité par BORNE, Louis, dans Z'insfrwc/ion popidaz're e?7 Fraac/ze-Cow/é aitawi ZZ92, Paris, 1949, 2 vol.

19BORNE, Louis, op. cit., AMcé^sd'reselsp//ai>az'res, t. 2, pp. 205 ss.

20 CHARTIER, Jean; JULIA, Dominique et COMPÈRE, Marie-Madeleine:

Z'éducaiiow France daXV7eAUZ/Zesièc/e, Paris, 1976, p. 126.

21AAEB, Maîtres d'école, 276 a/1.

22 Fe/afio« de /a w'e i«dasirie//e ei co»7»?ercia/e de F.-X Gressoi, Porrentruy, 1855, p. 15. (Manuscrit inédit, collection Anne-Marie Gressot, Porrentruy).

23 Ordonnance du avril 1784 concernant l'établissement des Maîtres d'école, du prince-évêque Joseph de Roggenbach, art. IV. AAEB.

21 Caia/ogae des i/Pres repgieiw:, c/asszpaes ei d'édzzcartozz pwi se iroaizeni citezMco/asZecozz/e, ///traire àFo/rertirap, 1825, 31 p. (BiCJ s 47/155).

25 ibidem.

26PAUCHARD, Georges: Zes éco/es raudoisesà /a/in da régzwzeèerwo/s,

Lau-sanne, 1952, p. 148.

27 Collegium Societatis Jesu Bruntruti, Affaires d'études, AAEB A 37, fasci-cule 7.

28AMWEG, Gustave: «L'imprimerie à Porrentruy», in: AS/F, 1915, p. 254.

29 Archives communales de Soulce. Photocopie d'une lettre aimablement communiquée par François N'oirjean, archiviste cantonal.

30 Ordonnance de Simon-Nicolas de Montjoie, du 18 octobre 1773, pour la discipline intérieure et l'économie du Collège.

31 PtoM rf'êtztoe/ozzr fe Cb/Zège de /'Abfwfe de Zte/fctojy, dressé /'«««ée Z7SP,

Manuscrit, Bibliothèque cantonale et universitaire de Fribourg, pp. 16-106.

32 SAUCY, P.-S.: /-/zstoz're de /tofeZwye de Z?e//etoy, réédition, Delémont, 1958, p. 258.

33 BALIBAR, Renée et LAPORTE, Dominique: Ze/ra«p«zs naft'ow«/, po/ift2/«e et/>raft'#ue de /a tongMe waft'owafesows /a -ffitootodo«/rawpawe, Paris, 1974, p.

34. Voir aussi BALIBAR, Renée: Z'm^Mft'ow rfw/ranfaw, essaîswrte co/togzds-me cfes Caro//wgtewsà /aX?çpM®7Me, Paris, 1985.

34BRUNOT, Ferdinand: Z/teoirerite/a /aSfMô/raaça/se, Paris, 1967, t. IX.

355Mtee a«jr çwalretowgwes, ouvrage collectif publié sous la direction de Robert SCHLÄPFER, Lausanne, 1985, p. 144.

36 II découle de l'Ordonnance du 1er avril 1784 concernant l'établissement des Maîtres d'école, op. cit. C'est notre première loi scolaire.

37AAEB, B 276 a 3. Voir HENRY, Pierre: «La lutte de l'école contre le patois au KIXe siècle», in: A/mrm«c cMd?o&?MedM/ara, 1991, pp. 127-133.

38 Voir HENRY, Pierre: «La Révolution française et l'anéantissement des patois», in: /l/m««acZ c«too//g«edz//ara, 1990, pp. 102-107.

39AAEB, B 276 a 3.

GOUTARD, Maurice: Z'ensezgnementprimaire ew Frawce, rte /aYéao/aiiow

à /a toiGwfeoi, Paris, 1959, p. 38.

41 Voir BANDELIER, André: Porren/ray, soas-pré/éciare e/a XVaai-PPia, «Le français contre les patois», Neuchâtel, 1980, pp. 343-344.

42BRUNOT, Ferdinand: op. cit., t. IX, 1« partie, p. 525 ss. C'est un ouvrage fondamental, en 14 tomes, auquel se réfèrent tous les historiens de la langue française, même si les bibliographies, remises à jour dans les années soixante, datent un peu. Le nom de Ferdinand Brunot (1860-1938) me fut révélé par mon professeur de français, Charles Beuchat (1900-1981). Celui-ci, à Soulce, avait été l'élève du doyen de la Sorbonne, né dans les Vosges, à Saint-Dié. «Il me saluait en patois», rappelle Charles Beuchat, dans Pczrzsz/Mawd même, Bien-ne, 1977, p. 47.

43 Grâce aux démarches (patientes et répétées) des collaborateurs des archives de l'ancien Evêché de Bâle (AAEB), il a été possible de se procurer les photographies des brouillons de Coquebert de Montbret, la photocopie de ces précieux documents ayant été exclue par le conservateur français. Désormais, les chercheurs jurassiens qui entendront les exploiter pourront les consulter à

l'Hôtel de Gléresse, à Porrentruy, s'épargnant ainsi le voyage à Rouen.

44 Voir NOIRJEAN, François: «Les sources de l'étude démographique du jura», in: Zeszwférêfsdw/Mra, 10 octobre 1973, pp. 217-225.

45 Voir la bibliographie de Willy Baumann, Zes mtérêfs dzz /ara, 2 février

1965, p. 35.

46Attos lie to 5«tee, Langues II, planche 28, Service topographique fédéral, Waber-Berne, 1967.

47 Op. cit., t. IX, 1« partie, appendice, p. 586.

48 Cette légère erreur m'a occasionné de multiples démarches aux archives de Strasbourg, de Colmar, de Mulhouse, de Belfort et de Montbéliard et, finale-ment à la Bibliothèque nationale, à Paris. L'Annuaire de l'an XIV fut introu-vable. Il n'a sans doute jamais existé. Dès que je fus en possession de l'original de la lettre conservée à Rouen, j'ai constaté que les chiffres 13 et 14 se

chevau-chaient; il y a eu donc surchage de la part du secrétaire du sous-préfet Dau-bers. Ferdinand Brunot a lu 14, alors que l'an 13 était la bonne référence...

19Bibliothèque jurassienne Delémont, réédition 1959, pp. 276-278.

50TURLOTTE, Michel: «Les Montbéliardais et la République», in: Ze TYzj« cfe Monlfoéfczrc/, rft; Wnrtewberg à /ö.France, 7793, Montbéliard, 1992, p. 270.

51 Voir HENRY, Jacques: les höb/tonte rfe Po/renlr/ry en 7&50, mémoire de licence, Genève, 1992.

52Recensements de l'an VI et de 1807, AAEB, MT 369 A et AP 8/37.

53En 1800, sur les 2250 habitants que compte la ville de Porrentruy, 309, soit le 14% sont natifs de pays de langue allemande. 246 d'entre eux sont arrivés à Porrentruy après l'âge de 14 ans (données fournies parJacques Henry).

54AAEB, AP 10/6.

55AAEB, AD 1 T 7.