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Le pédopsychiatre entre parole et loi

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Academic year: 2022

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(1)Le pédopsychiatre entre parole et loi. Autor(en):. Christe, Robert. Objekttyp:. Article. Zeitschrift:. Actes de la Société jurassienne d'émulation. Band (Jahr): 92 (1989). PDF erstellt am:. 29.01.2022. Persistenter Link: http://doi.org/10.5169/seals-555273. Nutzungsbedingungen Die ETH-Bibliothek ist Anbieterin der digitalisierten Zeitschriften. Sie besitzt keine Urheberrechte an den Inhalten der Zeitschriften. Die Rechte liegen in der Regel bei den Herausgebern. Die auf der Plattform e-periodica veröffentlichten Dokumente stehen für nicht-kommerzielle Zwecke in Lehre und Forschung sowie für die private Nutzung frei zur Verfügung. Einzelne Dateien oder Ausdrucke aus diesem Angebot können zusammen mit diesen Nutzungsbedingungen und den korrekten Herkunftsbezeichnungen weitergegeben werden. Das Veröffentlichen von Bildern in Print- und Online-Publikationen ist nur mit vorheriger Genehmigung der Rechteinhaber erlaubt. Die systematische Speicherung von Teilen des elektronischen Angebots auf anderen Servern bedarf ebenfalls des schriftlichen Einverständnisses der Rechteinhaber. Haftungsausschluss Alle Angaben erfolgen ohne Gewähr für Vollständigkeit oder Richtigkeit. Es wird keine Haftung übernommen für Schäden durch die Verwendung von Informationen aus diesem Online-Angebot oder durch das Fehlen von Informationen. Dies gilt auch für Inhalte Dritter, die über dieses Angebot zugänglich sind.. Ein Dienst der ETH-Bibliothek ETH Zürich, Rämistrasse 101, 8092 Zürich, Schweiz, www.library.ethz.ch http://www.e-periodica.ch.

(2) Le pédopsychiatre entre parole et loi /Mr Dr. Côriste. Introduction au Congrès annuel de la Société suisse des psychiatres d'enfants et d'adolescents sur l'ENFANT ET SA JUSTICE, à Porrentruy, les 15 et 16 juin 1989. Mesdames, Messieurs, c'est la deuxième fois que Porrentruy a l'honneur d'accueillir la SSPEA pour son assemblée annuelle. Le 27 avril 1963, nous nous étions retrouvés au Château, dans l'ancienne salle du trône du Prince-Evêque, devenue la salle d'audience du Tribunal. Nous avions invité la Société suisse de psychologie et l'Office fédéral des assurances sociales pour traiter du problème de. l'apport de l'examen psychométrique au diagnostic pédopsychiatrique. Un litige important avait, en effet, surgi entre plusieurs de nos membres et l'administration fédérale qui, sans nous consulter, avait posé comme condition impérieuse d'acceptation d'un enfant par l'Ai, un quotient d'intelligence inférieur à 75, quel que soit le diagnostic pédopsychiatrique. Ce problème d'alors n'a apparemment pas grand rapport avec notre thème d'aujourd'hui. Pourtant, les questions qu'ils soulèvent les deux au fond ne sont-elles peut-être pas si différentes qu'on pourrait le croire. Voyons. L'homme comprend, préalablement à la connaissance de toute loi de la pensée et de la morale, qu'il est impossible de se conduire avec un enfant comme avec un adulte, mais il sait intuitivement ce que l'on peut raisonnablement exiger de lui. Seul l'adulte a la capacité d'être pleinement conscient de ce sentiment; dans la vie courante cependant, les idées qu'il nourrit sur la nature de l'enfant, l'idéal qu'il poursuit dans son procès éducatif et les méthodes qu'il y emploie spontanément, ne sont qu'ttppresewfés h ^ et peuvent ainsi manquer de consistance : ces points de vue ne se tô&VMfzsewf que s'ils sont mis en question dans une situation de crise ou dans la réflexion. 2. Avant tout esprit critique, l'homme existe dans son projet en face de /M«tre ^ comme fzszzge et avec les autres, pour et envers qui il se sent obligé dès qu'il 1.. 1. Husserl, jWec&tattoras cartésiennes, 50, p. 91. Binswangen Afelanco/ie et manie, la doctrine A«sser/ienne tie /'a£p?ésen£arion et tie /'intersniyectira'tn PUF, 1987. 'Lévinas, Tôte/ite'et in/ini Kisage et sensiin'/izel p. 161, Nijhof, 1984. ^. 167.

(3) s'ouvre à sa destinée. L'homme peut alors devenir présent au monde et dans un monde se façonnant à la mesure de sa participation. Cette présence inclut le mouvement d'entraîner l'Autre avec soi, c'est-à-dire d'être attentif à lui donner la possibilité de se laisser tirer et à ce qu'il puisse suivre quand on le tire à soi, en ayant égard pour lui. Cet élan d'aider l'Autre à suivre, dans le respect de son projet d'existence, est ressenti d'une manière singulière face à l'enfant, dans son état particulier de dépendance riche de potentialités. 3. La signification originaire de ce mouvement constitutif de l'existence humaine se réalise dans la parole, sous forme d'une racine de la langue indoeuropéenne: «deuk-». Deuk- signifie «tirer, tirer à soi et avec soi, traîner avec soi, élever, cultiver, prendre en considération, avoir égard, tenir compte de, aider». Cette racine a donnée en latin «duc», puis ducere/ducare, et en allemand «ziehen», d'où aufziehen, erziehen. 4. Ce mouvement d'éduquer est une rencontre qui débouche sur un monde commun organisé avant que l'enfant y soit présent. Rencontrer c'est, avant toute chose, se sentir obligé face à l'Autre. Pour pouvoir accéder à ce monde commun, il est primordial que l'enfant soit d'abord pris en considération, c'est-à-dire qu'il soit écouté, entendu, suivi et compris jusque dans les formes premières de sa parole: c'est seulement en étant à même de prendre place dans ce monde où on lui fait place, que l'enfant peut être aidé à sortir de son existence pour y devenir présent; en y participant, il éprouve son espace de jeu en face de l'Autre et avec les autres mis au risque d'échouer à s'y comprendre. Ainsi peut-il apprendre la liberté en articulant ses désirs dans une forme originale unique, qui s'épanouit quand elle s'harmonise avec ce monde organisé 5. Qui dit monde commun dit langue et formes communes à ceux qui preny nent part, c'est-à-dire repères fixes, stables, structurés dans des règles communes. La présence la plus authentique s'obtient dans la maîtrise de ces formes: c'est en affinant sa sensibilité à «l'avant-science de lucidité»'' qu'apportent les formes en puissance^ retenues dans la langue avant toute connaissance positive de l'Univers, que l'on parvient à donner à la parole les accents et les sens les plus vrais et les plus personnels, aussi imprévisibles qu'inédits; c'est en se laissant emporter dans le regard de cette avant-science sur le monde vers les formes construites de la langue commune que l'on s'engage dans les modes de penser et de concevoir le monde qu'elle régit. 6. Le pédopsychiatre se sent spécifiquement interpellé par l'éducation : il va s'y trouver devant des difficultés de taille. Il devra d'abord affronter les opinions et les méthodes de tout acabit qui prétendent fonder l'approche éducative de l'enfant hors de sa présence et dont les contraintes souvent implacables compromettent sa. ^. 168. Guillaume, Azwripes cfe /ingwistj^Ke rfreoriçwe, p. 232, Klincksieck, 1973. Guillaume, I.e., p. 19..

(4) participation et son épanouissement. Fixées dans l'institution politique, elles mettent en échec le mouvement originaire d eduquer. Les résultats désastreux de cet échec entraînent le cercle vicieux bien connu d'une crispation progressive de l'institution, inapte par essence à modifier ses bases et donnant naissance à l'armée toujours plus nombreuse des troupes de choc de rééducateurs spécialisés. Ce mécanisme irréversible ne laisse bientôt plus à tout enfant en détresse que l'issue d'être considéré comme un handicapé du cerveau au bénéfice de l'Ai : les difficultés scolaites, notamment d'apprentissage du langage écrit, sont un exemple-type de cet échec de l'éduquer débouchant sur l'illettrisme inquiétant d'aujourd'hui. 7. Ensuite, le pédopsychiatre devra surtout tenter de ne pas succomber à la facilité de faire acte d'allégeance à l'impérialisme arrogant de la science, dont l'outrance est caractéristique de notre temps et marque l'aboutissement inéluctable et dramatique de la civilisation occidentale dans l'absolu universel. En effet, des voix particulièrement autorisées dénoncent de plus en plus fréquemment le manque de sérieux et l'opportunisme qui se cachent derrière la trivialité souvent désarmante des théories mécanistes psychologiques et éducatives. Sur un plan plus profond, la rigueur de l'analyse philosophique a montré depuis longtemps les apories d'une science humaine dont les fondements seraient les mêmes que ceux des sciences naturelles: les phénomènes psychiques et comportementaux ne peuvent à aucun prix être traités comme des faits stables et déterminés, tels que les connaissent les sciences de la nature. Ces phénomènes ne peuvent être lus et compris dans leur contenu et leur vécu que grâce au sens conféré par la visée intentionnelle portant l'être au-delà de son existence. Ce dépassement dans la transcendance rend illusoire et absurde la connaissance et la saisie de l'être humain comme entité positive, objectivable, interactive, éducable en tant que telle et existant en soi: on ne peut éduquer ni une chose, ni un sujet épistémique qui s'est totalement figé hors du mouvement de présence au monde ; un tel sujet est totalement étranger à d'autres sujets, indifférent aux choses à côté desquelles il est placé et à l'espace-temps objectif auquel il est rapporté, avec lesquels il n'est relié que par des mécaniques. 8. Des perspectives aussi fallacieuses que néfastes dans la compréhension humaine de l'échec d'un enfant dans l'existence, sont habituelles jusque dans bien des milieux de la recherche psychologique académique et s'imposent comme des a priori inconditionnels dans nombre de programmes pédagogiques, de méthodes de rééducation «rénovés», ou de procédés se déclarant thérapeutiques, qui se veulent tous «scientifiques». Aussi le pédopsychiatre, requis comme spécialiste dans un tel esprit, pourrait-il être mis au défi d'apporter des explications théoriques ou des interprétations abstraites à des phénomènes humains altérés par leur dévitalisation en faits objectifs: il s'engagerait alors à ne plus réfléchir que sur des éléments isolés n'entretenant entre eux aucune relation interne, privés de leur sens original et unique, réduits à une suite d'anecdotes. L'expert pédopsychiatre n'aurait alors plus d'autre solution que d'établir entre de tels faits des relations abitraires et où il 169.

(5) lui serait impossible de distinguer, dans le cas précis qui l'occupe, ce qui est important de ce qui ne l'est pas; il se condamnerait de ce fait à tomber dans un bavardage insignifiant fait d'interprétations et de considérations gratuites sans engagement. Pour surmonter cette impasse, il lui faudra d'abord rendre attentif aux vices de pensée qui se glisseraient ainsi dans l'appréciation d'un cas, rectifier les directions dans lesquelles cette appréciation se serait aventurée pour la resituer dans l'originalité et l'unicité de l'être en échec. 9. La spécificité du pédopsychiatre ne se limite cependant pas à cette tâche. L'homme-pédopsychiatre n'a-t-il pas avant tout développé une sensibilité particulière à certains aspects fondamentaux de l'existence humaine de l'enfant? N'aurat-il pas été amené, dans son aaivité clinique quotidienne, à pouvoir faire l'expérience intime des différentes formes d'échec de l'existence, à sentir avec plus de finesse le trouble du style rythmique et mélodique originaires d'un être et ses difficultés dans la manière d'entrer en résonance et en dissonance avec le style des autres? Ayant appris à faire les distinctions indispensables dans l'articulation des troubles multiples de la fonction vitale et de ceux de l'histoire intérieure de la vie, pourra-t-il alors s'orienter et se retrouver d'une manière spécifique dans les diverses formes cliniques de l'échec de ces mouvements de signification originaires du «tirer vers soi», d'«être en souci d'être suivi et de pouvoir suivre?» C'est une difficulté majeure de notre jeune société de présenter sa spécialité pédopsychiatrique, encore plus de la définir: peut-être ces journées permettrontelles de faire un pas aussi dans cette direction. 10. Quand l'éduquer se déroule d'une manière harmonieuse, le problème de la loi ne se pose pas et les contraintes du monde commun, inapparentes : sa réussite, c'est la génèse d'une nouvelle forme de présence avec et dans un monde préexistant structuré se réorganisant avec elle. Une forme n'est forme qu'en se formant dans quelque chose; elle est ordonnance mouvante en même temps qu'émergence d'une ligne souple et vivante qui la délimite, elle est aussi résistance à la fusion dans le chaos. L'opposition entre deux structures n'apparaît et ne se thématise que dans l'arrêt de ce mouvement génétique. Il faut que la parole se trouble ou devienne un objet de la réflexion pour que surgisse la notion de grammaire; l'image d'un code légal n'est présentifiée dans la vie que si ce dernier est mis en question. L'existence en formation créatrice harmonieuse s'annihilerait si elle devait invoquer la règle ou la loi à chaque instant de son mouvement H en va de même dans le problème qui va vous occuper ces deux jours: l'enfant et la Justice. C'est une modalité caractéristique de l'échec de l'éduquer de la présence humaine : dans ce cas spatial, la loi de la Justice s'affirme comme référence fixe du monde social commun disjointe du mouvement existentiel, dont l'éduquer entre en sécession et fait apparaître l'enfant désemparé 11. Cette rupture de forme en formation est un échec, qui invite le pédopsychiatre à s'introduire entre loi et parole débridée, mais en désarroi. L'expression de 170.

(6) ce dessein parallèlement en deux langues dans le. titre de cette introduction, «zwis-. chen Gesetz und Wort, entre loi et parole», va peut-être nous permettre de faire quelques distinctions utiles à la compréhension de l'intervention pédopsychia-. trique: Zwischen vient. de «duo, duei, duai» indoeuropéen, qui veut dire «partager, couper, deux parties»; alors que entre vient de «in», «inter», «enter», qui signifie «glissé à l'intérieur des deux (zwischen hinein), intérieur, interne, intime, depuis. l'intérieur (Intus)». Les deux langues dévoilent ici une différence importante dans le mouvement du pédopsychiatre en regard de la loi et de la parole. Cette différence est zVwp/zczte dans les termes de la langue, elle est ressewtz'e et, dans le langage courant, n'est pas. y. du ressort du perçu et de l'expliqué Cette différence ne surgit que lors de la comparaison et de la recherche étymologique. Qu'en est-il de la Loi Gesetz vient de setzen. Sa racine indo-européenne, «sed-» dit le mouvement d'asseoir, à la fois être assis et s'asseoir; en latin, elle donne sedeo et sedo, «être assis» et «calmer»; obsessus, c'est le siège; sessio, c'est la session, la séance, mais aussi le domicile, le nid, la place de repos. Pour les magistrats, c'est siéger. Demeurer, se tenir, être arrêté demeurer fixé C'est aussi la position d'une chose, le fondement anatomique, l'anus. On parle d'un «Arrêt» de justice, d'un «Arrêté» de l'autorité L'idée de l'accompli, du fixé est accentué par le préfixe «ge». Loi vient du latin Lex, dont la racine indoeuropéenne est «leg-», qui dit le mouvement de « mettre ensemble», «ramasser, cueillir», mais aussi « choisir» (ailemand: lesen, legen et leurs dérivés). Elle donne en grec: lego, logos. En latin, « legio » est ce qui a été choisi, recruté Inter-legere (qui a donné « intelligence »), c'est «mettre ensemble et lier de l'intérieur (entre)»; neg-legere, c'est «ne pas fier, abandonner le Hen intérieur de ce qui est ensemble, de ce qui est ramassé». Ainsi: la légalité, la normafité sociale, ce qui doit être la base stable et permanente du monde commun, est ressenti par l'allemand comme quelque chose qui est arrêté calme, fixé tranquille et peut, pour cette raison être un fondement sofide, une attitude qui se trouve dans l'«être assis», «en séance», sur son séant, son derrière. La justice se rend dans cette position. Pour le latin et le français, la loi est un «rassembler», «recueillir», un «mettre ensemble devant soi» comme un tout indépendant, une récolte, que l'on peut conserver et mettre l'abri, hors de vue. Ce mouvement de signification se réafise pleinement dans la langue indoeuropéenne grâce à sa strzzctzzre prérizriztzwe Hée au werfe «être»'': il débouche sur le phénomène fondateur de la pensée occidentale, l'émergence d'un sujet distinct d'un objet dont il se sépare, un objet existant en soi, «logique» : c'est l'origine de la notion de personne, puis de «moi». La loi occidentale peut ainsi se détacher de celui qui la ^Lohmann, /%r/oropi>ze «fe Spracirarcssenscfe/z; Dunker und Humbolt, 1975. 171.

(7) suit ou l'exécute, se généraliser, se neutraliser, devenir valable pour tous dans le monde commun, indépendamment des habitudes et des coutumes partisanes. Objet en soi, la loi peut s'organiser en un ensemble de prescriptions, d'instructions, de règles, retenues par des liens logiques rationnels, formant un ensemble cohérent en dehors des sujets auxquels il s'applique : elle devient oh/'ective. 13. L'exemple donné dans cette comparaison des deux sens profonds que prend la notion de loi comme «Gesetz», et comme «Lex» va nous permettre de préciser la notion de parole. Ces deux sens se complètent en faisant appel à des «directions de significations» différentes, mais les deux au même titre, sont, avec d'autres mouvements, inhérentes à l'existence humaine, constituent et articulent sa totalité dans un mouvement de génèse incessant. C'est dans ce mouvement de génèse que se révèle le sens profond originaire des formes verbales. Ce mouvement est senti d'une manière immédiate, protopatriigue et aspectuelle, indiférenciée, non distinctive, dans le rythme, l'accent, le timbre et la mélodie, comme style d'un mouvement de danse chantée: à son origine, la parole fait signe. Son développement dans la langue indoeuropéenne oriente ce mouvement vers les objets dans la désignation-nomination dont se charge le nom propre, puis se fixe, se généralise et s'abstrait dans la dénomination et la dé-finition des choses, des actes et des notions opérées par le nom commun. Le mouvement est alors acompli et disparaît en s'arrêtant dans la position finale durable où il est parvenu dans la langue commune, se caractérisant progressivement, par l'alphabétisation, dans l'organisation autonome de son lexique et sa grammaire, qui se détachent du sujet parlant: la parole alorsyùh «n signe après avoir d'abord fait signe''. Mais du même coup, le sens profond inhérent au mouvement de génèse se cache, pour laisser place à la notion du signe de la théorie linguistique moderne et du lien arbitraire entre son signifiant et son signifié: c'est alors seulement que la langue peut ainsi devenir l'objet d'une étude scientifique totalement séparée de la parole, qui elle, échappe à la prise de la pensée logique critique (episteme). 14. La parole vivante est par excellence le mouvement de génèse de l'être: elle est présence au monde et dans le monde au même titre que la présence au monde et dans le monde est parole vivante. Elle ne peut se résumer à une suite de mots étalés dans un temps chronologique de l'horloge, mais c'est en prenant un sens défini que la parole se sédimente dans les mots, qu'elle meurt, ce qui n'est accompli que dans l'écriture alphabétique'. Tel n'est cependant pas le cas et de loin, de la parole de l'enfant. Mouvement animé imprévisible, unique et éphé-. ^Lohmann, Pfefosopfee «m/ Spracfeeiisserascfeyt, Dunker und Humbolt, 1975. ^Heidegger, î/nterœegs z«r S/racfe, Das Rfeen der Sprache, Neske, 1959. Saussure, CoKrede&g«isliç«egriiéni/e, Payot, 1972. 'Humbolt, Defer die .BacfelafenscAri/t nnd ifeen Zwsammenfeng mit dem Sjfrracfew«, in 5cfei^en z«r Syrac^fe'/otopfee, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, volume HI, 1979.. 172.

(8) mère, la parole est la source de la pensée logique génératrice d'ob/etspermanents définis, s'oiganisant dans des structures fixes face à un sujet qui peut les observer d'une manière cn't/gue et consciente: l'erreur majeure est d'oublier que la parole est un mouvement vivant, pour ne considérer que son aboutissement mortifère dans des positions fixées. C'est bien à quoi mène inéluctablement la pensée logique mécaniste, pour qui la parole ne peut être rien d'autre qu'un instrument anatomo-. physiologique exprimant des pensées sans rapport avec lui. 15. Comprendre l'enfant dans la totalité de son existence et de ses difficultés, c'est danser avec lui le mouvement génétique de la parole jusqu'à son terme; c'est s'arrêter avec lui dans son échec, c'est tenter avec lui une reprise de ce mouvement en harmonie avec le monde. Alors nous pouvons nous poser les questions que le travail de ces deux prochaines journées permettront declaircir: Pensons-nous, comme pédopsychiatre-expert de l'enfant en échec devant la justice, nous mettre « zwischen Gesetz und Wort », c'est-à-dire envisager la parole et la loi comme deux parties déjà séparées, couper, partager la loi et la parole Pensonsnous davantage nous mettre «entre loi et parole», nous glisser à l'intérieur de cette dualité et voir de l'intérieur les rapports qu'entretiennent loi et parole dans la totalité qu'elles forment et où elles s'articulent? Et que ferons-nous comme pédopsychiatre-médecin engagé à apporter aide et soins à cet enfant en détresse «entre la loi et la parole», tout en même temps que «Zwischen Gesetz und Wort»? 16. Revenons à Porrentruy situé entre ses deux collines et au lieu de notre rencontre : une réponse aux questions que nous venons de nous poser peut-elle émaner de la parole de la loi que proclamait le Prince-Evêque du haut de son château, ou des arrêts de notre actuelle cour de justice qui l'a remplacé? Cette réponse viendrait-elle de l'esprit des Jésuites, de celui de l'Ecole ou de l'Université, qui plane sur la ville du haut de la colline d'en face? Où donc aurions-nous dû tenir notre rencontre pour lui donner le paysage le plus propice? Ce lieu me semble être plutôt sur le chemin que vous avez suivi il y a 25 ans pour vous rendre au château et que vous venez de faire aujourd'hui pour monter à cette aula, à l'endroit où il bifurque pour mener soit à l'un, soit à l'autre, là où ce chemin n'est pas encore décidé entre l'esprit de la loi juridique et l'esprit de l'école qui dicte les règles de la langue, de la pensée et du savoir : il est au milieu de la cité, là où, depuis plus de sept siècles, se tient le marché du jeudi, une des preuves encore tangibles de la lettre de franchises que lui octroya l'empereur Rodolphe de Habsbourg, faisant d'elle une ville libre. C'est là que les gens de la ville et de la campagne se rencontraient, s'affrontaient et se confrontaient, traitaient les affaires, discutaient, arrangeaient les conflits, trouvaient des solutions concrètes acceptées par la majorité C'est là que les produits des artisans et des paysans, des artistes et des philosophes étaient présentés, examinés et mis à l'épreuve. C'est dans tout ce bruit du marché auquel se mêlent les cris et les jeux des enfants, que naît la rumeur publique et que s'affirment les 173.

(9) points de vue pour forger l'opinion publique : bref, c'est là que se forme la parole vivante, que les mots se créent et s'enrichissent, se précisent et meurent. C'est là que tout se passe. C'est là aussi que depuis de longues années nous portons notre intérêt dans nos recherches sur la parole troublée *1 L'intuition certainement inconsciente des organisateurs de notre rencontre a fort bien fait les choses en y convoquant l'assemblée générale de notre société Pour y aller, vous devrez cependant descendre de la colline, comme tout homme doit descendre sur la place publique afin que son existence devienne présence au monde, dans le monde et puisse le dépasser. Descendre, c'est un deuil des hauteurs de l'esprit abstrait et de l'objet permanent, c'est consentir au risque de l'imprévisible, de l'éphémère, du mouvant. Ce mouvement est d'abord de modestie et d'acceptation de notre nature humaine, prix d'une vraie rencontre. Les gens de Porrentruy de la fin du Moyen Age le savaient : dans leur esprit de charité ils avaient pensé à l'Autre qui n'arrive plus à suivre les autres : c'est encore au milieu de la cité quelque peu en retrait de la rue du Marché qu'ils avaient fondé l'Hôtel-Dieu, l'hôpital. J'avais tenté une fois d'y instal1er l'ancien Service médico-psychologique du Jura. Signe des temps, Mesdames, Messieurs, en descendant dans la cité vous n'allez plus trouver de «rue du Marché». H semble bien que l'esprit savant de l'Ecole y domine aujourd'hui les commissions municipales: ce lieu a été rebaptisé dernièrement et le nom commun connu de tous, le Marché a dû caler sa place à un nom propre inscrit dans l'histoire de notre pays, celui d'un vénérable vieillard d'un villäge voisin, qui avait longtemps lutté contre les excès du pouvoir du Château, notre premier révolutionnaire, exécuté en 1740, en ce même lieu, par le bourreau du Prince. Je vous souhaite de passer d'agréables moments dans. notre ville et son pays. Aoûert Cûnste*. CAràfe et iwgnei,. parole tronè/ee, PUF, 1987.. Dr méd. Robert Christe, 2900 Porrentruy, spec. faculté de médecine, Université de Berne. 174. FMH psychiatrie et pédopsychiatrie, prof. hon..

(10) NUMISMATIQUE.

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